Consommer mieux mais plus malin

Les Français sont de plus en plus nombreux à se livrer à des pratiques de consommation qui sortent des sentiers marchands ordinaires. Est-ce le signe de l’épuisement du modèle de l’hyperconsommation ? Sont-elles le signe d’une consommation de crise ? La première vague de l’Observatoire des consommations émergentes (1), réalisée par l’ObSoCo avec le soutien de la FCD, l’Ilec et le PICOM (2), fait le point sur ces nouvelles formes de consommation, identifie le profil des consommateurs impliqués et permet de comprendre les logiques à l’œuvre.
Consommer autrement est une réalité largement partagée
Acheter des produits d’occasion est devenu aujourd’hui un geste presque banal qui concerne plus de 60 % des Français. Il s’agit là de la pratique émergente la plus diffusée. Au-delà, les pratiques de vente d’occasion, d’achat groupé, d’emprunt, de location connaissent un essor largement facilité par la mise en réseau à grande échelle via Internet. Ces pratiques ont atteint un tel niveau de diffusion au sein du corps social qu’on peut considérer qu’elles sont entrées dans la norme de consommation.
Une conséquence de la recherche de sens et une gestion des contraintes budgétaires
Le degré d’engagement des consommateurs dans les pratiques de consommation émergente est également lié à leur degré de sensibilité aux questions environnementales. Les Français sont nombreux à justifier leurs pratiques par des arguments renvoyant au développement durable. Cela va de soi, par exemple, pour les achats de produits bio. Mais l’argument écologique est également mis en avant pour justifier d’autres pratiques, comme les achats d’occasion ou l’emprunt, qui évitent le gaspillage. Parallèlement, faire des économies est souvent la première justification mise en avant par les consommateurs impliqués dans ces nouveaux comportements. Les pratiques de consommation émergente apparaissent souvent comme des solutions pour “consommer malin”, tirer davantage d’effets utiles, de satisfactions de chaque dépense.
Refonder la relation marchande
L’enquête montre que, loin de constituer une forme de dénonciation, l’essor de ces pratiques ne peut que marginalement s’interpréter comme la conséquence de la montée d’une posture critique à l’égard de la société d’hyperconsommation, d’une entrée en résistance massive des consommateurs. Pour autant, ces pratiques de consommation émergente trouvent une partie de leur attrait en ce qu’elles renouvellent l’expérience de consommation. Leur diffusion témoigne ainsi peut-être, en creux, d’une certaine érosion de la capacité d’enchantement – d’une banalisation – des formes ordinaires de la relation marchande.
(1) Enquête “Observatoire des consommations émergentes” réalisée en ligne par Opinéa du 9 au 23 juillet 2012, auprès d’un échantillon de 4 072 personnes, représentatif de la population française de 18 à 70 ans.
(2) Pôle de compétitivité des industries du commerce.