EN DÉTAIL
Consentement à payer?

Al'heure où l'intérêt pour la santé s'affirme de plus en plus, et en particulier où le rôle majeur de la nourriture saine occupe une place centrale dans les valeurs des consommateurs, il est paradoxal de voir l'ampleur de la question du prix des fruits et légumes dans l'actualité de cette fin d'été 2013.
Pourquoi le prix des fruits et légumes a-t-il fait la une des journaux ?
Il y a tout d'abord des effets de contexte. La baisse du pouvoir d'achat ravive des inquiétudes concernant l'alimentation. Second poste de dépenses des Français, après le logement, l'alimentation redevient le miroir des inégalités(1). La récente étude de l'Insee (juillet 2013) montre en effet que les dépenses alimentaires sont devenues prioritaires pour 16 % des ménages les plus modestes.
Ensuite la question du prix, de façon générale. La course aux prix bas n'est guère propice à la justesse de la perception de la valeur des produits.
Mais au-delà, c'est la place particulière qu'occupent les fruits et légumes dans l'imaginaire des Français qui est au cœur de cette actualité. Sa consommation fait l'objet d'une attention soutenue depuis plusieurs années (programme de santé publique, dynamisme des fédérations, offre travaillée par les parties prenantes, production et distribution…). Ceci est, d'une certaine façon, récompensé par un volume d'achat en augmentation de 3 % en 2012 et par la valorisation croissante de ces pratiques alimentaires.
La course aux prix bas n'est guère propice à la justesse de la perception de la valeur des produits. Mais au-delà, c'est la place particulière qu'occupent les fruits et légumes dans l'imaginaire des Français qui est au cœur de cette actualité. Car les fruits et et légumes ne sont pas perçus de la même facon que les produits transformés.
Pour autant cette valorisation se heurte au consentement à payer.
Car les fruits et légumes, les produits frais en général, ne sont pas perçus de la même façon que les produits transformés. Il y a, dans l'imaginaire des consommateurs, une association toujours présente entre fruits et légumes, jardin d'Eden et nostalgie des produits d'antan… l'abondance, le rythme des saisons, la valeur du vrai et de l'authentique… en bref, la facilité (il suffisait de tendre la main) et la gratuité. La juste valeur de ces produits n'est pas perçue par les consommateurs. Et, indépendamment de la valeur “technique”, les consommateurs connaissent mal les aléas de la production, la répercussion du climat sur les prix.
Une autre explication pourrait être à rechercher du côté de la perception des programmes de santé publique. Formidables boosters pour la consommation des fruits et légumes, ils génèrent en même temps l'idée d'accessibilité du prix… de sa modération… à (pour certains) la gratuité… « Si c'est obligatoire pour la santé, les fruits et légumes devraient être gratuits » en quelque sorte.
Il y a quelque chose d'assez injuste dans ces représentations, pour les métiers et les savoir-faire.
(1) Titre de l'article du Point du 17 juillet 2013.