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Comprendre son sol pour raisonner la fertilisation

Bien connaître le fonctionnement et l’état structural du sol est essentiel pour raisonner ses pratiques de fertilisation. C’est ce qu’a expliqué Jean-Pierre Scherer lors d’une journée organisée dans le cadre du groupe Dephy pomme de Poitou-Charentes.

"L'observation de la structure de son sol est essentielle pour raisonner ses apports de fertilisants", Jean-Pierre Scherer.
© V. Bargain

« La fertilité d’un sol n’est pas qu’une affaire de chimie », a souligné Jean-Pierre Scherer, formateur et pédologue lors d’une journée du groupe Dephy pomme de Poitou-Charentes, réuni aux Jardins de la Frolle, chez Simon et François Beneteau, qui exploitent 10 ha de vergers en libre cueillette près de Poitiers. « Une analyse de sol est intéressante mais insuffisante pour raisonner la fertilisation. La structure est essentielle au bon fonctionnement du sol et à une bonne efficacité des apports », continuait le spécialiste. A la base, il y a la roche mère qui libère peu à peu ses éléments et détermine le potentiel « génétique » du sol. A partir de ce potentiel, du climat, des pratiques, le sol évolue dans l’année et au fil du temps. La structure repose sur des feuillets d’argile sur lesquels, grâce au fer, est fixé de l’humus, le tout étant stabilisé par du calcium. Au printemps, si les conditions d’aération, humidité et température le permettent, les bactéries fractionnent l’humus, libérant le calcium qui migre vers les racines, et le transforment en nutriments qui vont alimenter les plantes. A l’automne, la plante cesse de s’alimenter. Les bactéries et champignons transforment la cellulose des feuilles en humus, qui va se fixer sur l’argile et le calcium va resaturer le complexe argilo-humique. « La structure du sol détermine sa porosité et donc la bonne circulation de l’air et de l’eau, son réchauffement, la vie microbienne, la disponibilité des nutriments issus du sol ou apportés, un bon développement racinaire. Un sol pauvre en phosphore peut être productif si sa structure est bonne, alors que si elle est dégradée, le risque de décrochage est élevé. »

Adapter les apports à la structure du sol

Tous les sols n’ont pas la même quantité d’argile, humus, fer ou calcium. Un sol pauvre en calcium a une structure qui se tient moins bien, avec une tendance à l’acidification, un cycle de la matière organique perturbé, une tendance au lessivage. De même, le taux d’argile détermine le pouvoir tampon du sol, sa capacité à se réchauffer, sa souplesse et, avec la profondeur de sol, la Capacité de Fixation des éléments. « La quantité et le rythme des apports doivent être raisonnés selon la Capacité de Fixation du sol, insiste le pédologue. Un sol de plus de 70 cm et comptant plus de 20 % d’argile a une forte Capacité de Fixation et peut accepter des apports calciques ou organiques élevés. S’il a moins de 10 % d’argile et moins de 50 cm de profondeur, les apports doivent être plus limités car le risque de lessivage est élevé. » La structure et la composition du sol peuvent aussi entraîner des carences. « En France, moins de 2/3 des carences sont des carences vraies, liées à la roche mère. La plupart sont induites par des excès de minéraux dans le sol (un excès de fer bloque le phosphore, le manganèse, le molybdène), le climat (températures basses ou élevées pour la saison, sécheresse) ou le sol. » Une forte part de calcaire actif, un pH supérieur à 7 ou inférieur à 5,5, un excès ou un manque de matière organique, la compaction, des conditions lessivantes, une tendance à l’hydromorphie peuvent bloquer des minéraux. Certaines pratiques permettent de limiter les problèmes (apport de calcium pour remonter le pH, apport de matière organique, griffage du sol pour injecter de l’oxygène dans le sol et favoriser l’activité biologique, maintien d’un couvert pour la stabiliser, réduction du compactage…). « Mais il est difficile d’agir sur un pH élevé, un excès de matière organique, le lessivage, l’hydromorphie, analyse Jean-Pierre Scherer. Il est donc essentiel de bien connaître son sol pour que les apports soient réellement efficaces. Cela passe d’abord par l’observation du profil de sol (voir dans notre prochain numéro, ndlr), que l’on complète ensuite en regardant ses analyses de sol. »

Des marges de progression

Le groupe Dephy pomme de Poitou-Charentes réunit 12 producteurs bio et conventionnels et le lycée de Montmorillon. « Les pratiques de fertilisation sont souvent empiriques, constate Virginie Roulon, de la Fredon Poitou-Charentes, animatrice du groupe. Mieux connaître le sol, premier outil vivant et de base pour l’agriculteur, peut permettre d’améliorer l’efficacité des apports. » « En fertilisation, nous intervenons comme cela s’est toujours fait, admet Simon Beneteau, arboriculteur à Bonnes (86). Nous avons besoin d’en savoir plus sur nos sols. Observer et interpréter un profil de sol peut nous apporter beaucoup. » « Nous n’avons pas fait de profil de sol depuis la plantation, indique Pascal Poublanc, producteur à Soutiers (79). Après cette journée, je pense que je vais en refaire. »

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