DÉBUT DE CAMPAGNE
Bejo soigne ses variétés “aux petits oignons”
Installé en France depuis vingt-cinq ans, le semencier hollandais contribue à améliorer les variétés d'oignons. Il s'investit beaucoup dans le bio.




Le hollandais Bejo est leader mondial en sélec-tion de semences d'oignons. Jaunes ou rouges, ces produits sont présents aujourd'hui toute l'année sur les étals. Pour y parvenir, les sélec-tionneurs “rusent” avec les caractéristiques physiologiques des variétés. En mai-juin, sont commercialisés les oignons jaunes dits de jours courts car semés en hiver de l'année précédente. Viennent ensuite les oignons issus de bulbilles(1), dans les rayons seulement entre juillet et août. Ces oignons au collet plus grossier et à la qualité de peau différente d'un oignon semé, ont été replantés entre février et mars de la même année. Les premiers oignons de jours longs, semés en mars-avril, arrivent en août-septembre. Certains d'entre eux sont adaptés à la longue conservation. Stockés en chambre froide, ils approvisionnent le marché jusqu'en mai-juin de l'année suivante. La boucle est ainsi bouclée. La sélection de variétés qui se conservent plus longtemps a donc contribué à fournir des oignons toute l'année.
Le calibre reste le critère essentiel de l'homogénéité des lots d'oignons.
Le rendement, la précocité, la conservation et l'adaptabilité aux régions restent les enjeux majeurs de la sélection. Depuis quinze ans, aucun “saut technologique” n'est venu véritablement bousculer la donne. « Il existe toujours un dilemme entre créer une variété qui se conserve très bien et la productivité, affirme Yannick Chevray, responsable marketing et support de ventes de Beaufort-en-Vallée (Maine-et-Loire) où Bejo a installé ses équipes de multiplication depuis 1988. Aujourd'hui, le challenge consiste à améliorer la productivité des variétés qui se conservent bien. » Néanmoins, les sélectionneurs pourraient aussi répondre aux sollicitations des producteurs qui craignent que les anti-germinatifs à base d'hydra-zide maléique ne soient plus autorisés. Pulvérisé sur la culture moins de quatorze jours avant la récolte, ce produit inhibe la germination des bulbes durant le stockage. « Si éventuellement les anti-germinatifs n'étaient plus autorisés, souligne le responsable marketing, seules la génétique et la technicité frigorifique pourront pallier ce manque. »
Les bulbilles sont un moyen de se soustraire à la germination des bulbes. « Aujourd'hui, les oignons de plus en plus précoces, explique Eric Gossart, attaché commercial spécialiste des oignons, permettent de raccourcir le temps de commercialisation des bulbilles à deux mois. » Ces bulbilles, s'ils ont l'avantage d'éviter la rupture d'approvisionnement, présentent quelques défauts majeurs comme celui de véhiculer des parasites. Bejo, qui propose une trentaine d'oignons à son catalogue dont cinq en bulbille, a mis en place un protocole et un label, Quality Inside, pour limiter les propagations fongiques. Les bulbilles, jaunes ou rouges, sont produites par une filiale de Bejo, Broer BV, située aux Pays-Bas. Elle cultive ces bulbilles sur des sols agréés après avoir été analysés indemnes de parasites comme les nématodes.
Des variétés résistantesLe calibre reste le critère essentiel de l'homogénéité des lots. Les variétés, toutes hybrides, y contribuent avec la modulation des densités d'implantation. Le calibre 50/70 mm est encore le créneau le plus demandé, même si de plus gros oignons (60/80 mm) attirent quelques clients sur le marché de Rungis. L'oignon fait toujours partie des légumes qui se développent, notamment grâce à la restauration hors domicile et aux nombreux plats qui en contiennent. En France, les producteurs en cultivent entre 500 000 à 600 000 t selon les années.
Après le jaune et le rouge, le rose serait l'une des diversifications possibles à l'avenir. Mais le principal défi pour les semenciers consiste à proposer des variétés résistantes aux maladies. La première variété résistante au mildiou, Hylander F1, issue de la génétique Bejo, a reçu le Sival d'Argent en 2010. Cela a permis de diminuer de 75 % le nombre de traitements contre le mildiou et de mieux gérer les plannings d'irrigation. Aujourd'hui la gamme s'est étoffée de deux autres variétés. « Dans les cinq ans, nous serons capables de proposer une gamme complète qui répond aux exigences de toutes les régions de France, dévoile Yannick Chevray, ce qui n'est pas le cas encore aujourd'hui. Hylander étant une variété tardive qui n'est guère adaptée au sud de la France. »
Des semences bio disponiblesParallèlement aux semences traditionnelles, Bejo offre aussi toute une gamme de semences bio, dont certaines créées spécifiquement pour ce créneau. En oignon, les critères de sélection adaptés au bio sont identiques à ceux du conventionnel. Seules les priorités changent. La résistance aux maladies prime sur la productivité. Selon Yannick Chevray, les programmes bio influencent ceux du conventionnel. « En multiplication de semences, affirme-t-il, la même technique employée sur deux sites, l'un en conventionnel et l'autre en bio, a donné l'avantage aux parcelles bio, notamment en termes de faculté germinative. » Bejo travaille sur la résistance aux fusarioses, une maladie qui n'a pas de solution chimique actuellement. Des premiers essais ont lieu cette année chez des producteurs. Bejo propose toute une gamme de semences bio disponible en termes de volume. « Néanmoins regrette le responsable marketing, les bio continuent à utiliser des semences conventionnelles exemptes de traitements et à produire de l'oignon à partir de bulbilles. Cela limite fortement la durée de leur conservation. La technique dite de la plantation en motte n'est guère connue en France par les bio contrairement en Allemagne. Nous devons nous rapprocher des instituts techniques pour la développer. »
(1) Oignons de petit calibre cultivés à partir de semences puis plantés, à la différence des autres oignons qui sont semés directement en terre.