Sud-Ouest
Agri Abri Aquitaine, le facilitateur de développement
L'outil structurant du développement des serres en Aquitaine, c'est Agri Abri Aquitaine. Il accompagne la construction de serres et abris depuis une vingtaine d'années.
Agri Abri Aquitaine a été créé il y a une vingtaine d'années, « au moment où des producteurs, fragilisés par les tempêtes, cherchaient des solutions financières pour abriter leurs cultures ». Cet outil a permis de construire des tunnels 5 m puis des abris modernes (tunnels 9 m, serres double paroi gonflable, serres verre…) Au total, ce sont 420 ha de serres qui ont été construits surtout dédiés à la production de tomates et de fraises.
« Avant la naissance d'Agri Abri Aquitaine, on comptait quelque 200 ha de serres verre, chapelles et abris en Lot-et-Garonne, essentiellement dans le Marmandais, un peu dans le Néracais et le Villeneuvois, avant de s'étendre sur la Vallée de la Garonne », explique Christophe Lacoste, gestionnaire du programme Agri Abri Aquitaine. En Dordogne, sur cinq ans, 140 ha d'abris légers 5 ou 6 m avaient été construits. Au total sur l'ensemble de l'Aquitaine, en ajoutant les serres de la ceinture maraîchère bordelaise, l'ensemble représentait 350 à 400 ha d'abris, plus nombreux en Marmandais et autour de Vergt, alors capitale de la fraise.
Sur la période 1994-2014, ce parc a été augmenté de 380 ha d'abris froids. « Avec Agri Abri, jusqu'en 2000, il s'agissait de sauver la production de plein champ du risque de grêle et de répondre aux exigences qualitatives formulées par la grande distribution », rappelle Christophe Lacoste. Près de 260 ha concernent surtout tomates, fraises, melon, salades et poivrons-aubergines-courgettes.
Un outil de reconquête pour la fraise
Le deuxième contrat de projet Etat-Région 20002007 a donné une impulsion au développement de la production couverte en Aquitaine. Après la crise de la fraise, la profession fraise conduit « un travail énorme pour moderniser l'outil de production (recherche variétale, outils commerciaux) et éviter une crise du genre de celle qui avait frappé la tomate, souligne Christophe Lacoste. On a concentré nos efforts pour construire une centaine d'hectares pratiquement dédiés à la fraise (60 ha d'abris lourds, 40 ha de serres chapelles lourdes, chauffées ou froides) et géré la reconversion d'environ une centaine de dossiers de reconversion d'abris 5 m ou 9 m fraises, représentant 50 ha. »
C'est dans les Landes que se poursuit l'éclosion des programmes de construction autour de la récupération de nouvelles sources d'énergie.
Sur cette période, le total construit atteint 150 ha : 80 % des surfaces en Lot-et-Garonne, 10 % en Dordogne. Les 10 % restants sont répartis en Gironde, Landes, Limousin et Charente (la zone d'action de l'ancien comité économique f&l d'Aquitaine-Limousin-Charente). La fraise a représenté 95 % des surfaces en Lot-et-Garonne et 5 % en Dordogne. Les différences stratégiques de la production fraisicole entre les deux départements expliquent la différence. En Lot-et-Garonne, un basculement vers le hors-sol en s'appuyant sur une reconnaissance variétale et en Dordogne le choix d'une stratégie de terroir avec l'IGP Fraise du Périgord, mettant en valeur la production en pleine terre. « Le parc de serres chapelles et hors-sol a permis d'enrayer la chute de la production de fraises et de reconquérir une partie des volumes », se félicite Christophe Lacoste.
De nouvelles sources d'énergie
Des contrats de location concernant jusqu'à trois cents agriculteurs ont été gérés par Christophe Lacoste, puis une centaine et, depuis 2008, une cinquantaine de dossiers. Agri Abri Aquitaine a continué son action de facilitateur. La vingtaine d'hectares construite depuis 2008 (chapelle et verre) concerne la fraise, sauf un programme dédié à la production de tomates cerise dans les Landes, chez Jean-Jacques Reygades. Le moteur de ce développement, c'est le groupe Rougeline, très impliqué dans la généralisation des énergies alternatives. C'est dans ce département que se poursuit l'éclosion des programmes de construction autour de la récupération de nouvelles sources d'énergie (qui représente environ un tiers des charges d'exploitation). Un parc de serres verre modernes naît dans le Pays de Born, autour de Parentis-en-Born (Landes). Vermilion, premier producteur d'hydrocarbures liquides en France, produit du pétrole brut dans les Landes. Le groupe a noué un partenariat avec Rougeline. L'énergie dégagée par les puits de pétrole est utilisée dans les serres de Tom d'Aqui, société née en 2009, à Parentis-en-Born pour produire des tomates sous serre. Ce pôle de production de tomates, au milieu de la forêt de pins maritimes, se conforte d'année en année. Dernier investissement inauguré, la serre de l'EARL Reygades, chauffée à la biomasse issue de plaquettes forestières, construite avec le portage financier d'Agri Abri Aquitaine. La chaudière bois, qui doit permettre de chauffer 5 ha de serres, va consommer 1 700 t de bois par hectare et par an, souligne le Conseil Régional d'Aquitaine qui a soutenu cet investissement (1,7 M€) à hauteur de près de 133 000 €. Elle évitera aussi le rejet de 600 t de CO2 par an.
Le fonds de garantie associe la région Aquitaine, le département et l'organisation des producteurs.
A Pontenx-les-Forges, l'énergie utilisée est issue de déchets ménagers. La SARL Grands Lacs Energie (qui associe six agriculteurs) et la société Traitement industriel des résidus urbains (TIRU) qui exploite l'unité de valorisation des déchets du Sivom (Syndicat intercommunal à vocations multiples) des cantons du Pays de Born sont engagées par un protocole d'accord qui débouchera sur la fourniture de 40 000 MWh/an à la SARL Grands Lacs Energie pour chauffer 10 ha de serres sur la commune. Une trentaine d'hectares de serres verre modernes est donc venue s'ajouter au parc existant, pour les deux tiers dans les Landes.
La dizaine d'hectares restante concerne le Lot-et-Garonne, autour des opérateurs VDL et Cadralbret principalement. D'une manière générale, on peut dire que dans les Landes ces nouvelles serres utilisent la récupération d'eau chaude et dans le Lot-et-Garonne plutôt la biomasse. Le mouvement continue. Christophe Lacoste annonce que 2015 verra la réapparition des serres chapelles pour la production de légumes, avec un projet de 24 ha (dont 4 ha en Gironde, à Lapouyade, le reste en Lot-et-Garonne).
En projet également, 18 ha de serres fraises et 6 ha de serres à légumes (5 ha dans les Landes et 19 ha en Lot-et-Garonne)… et, pour la première fois, un hectare de serres fraises dans les Landes, toujours sur le parc de Parentis-en-Born.
Conforter le fonds de garantie
Le Conseil régional d'Aquitaine avait mis en place un système d'appui à la construction de serres sous forme d'avances remboursables à hauteur de 30 % de l'investissement. Cet outil avait dopé le développement de l'outil serre au point qu'il a peut-être été victime de son succès.
Un fonds de garantie a donc été créé en 2012. Il associe la région Aquitaine, le département et l'organisation des producteurs avec un taux individualisé en fonction de la situation de chacun. Cela ne coûte pas très cher à ceux qui ont une bonne situation financière et cela permet de consolider la situation d'Agri Abri Aquitaine. Le fonds de garantie se consolide à hauteur de 20 % du montant des emprunts.
Pour faire face aux nombreux projets de constructions de serres et abris pour la production de fraises ou de tomates, Agri Abri Aquitaine « cherche à accroître son fonds de garantie pour augmenter sa capacité d'emprunt et ainsi pouvoir intervenir sur des projets dont la consistance financière a beaucoup augmenté, en particulier dans le cas de projets portés par des jeunes ou de nouveaux installés ».
A la demande du producteur, Agri Abri Aquitaine s'engage, par un bail à construction, à réaliser sur sa parcelle une serre ou un abri qu'il s'engage à louer au producteur, avec un bail rural de cinq, dix ou quinze ans. A la fin de ce bail, la société s'engage à céder le bien à l'agriculteur pour une valeur définie à l'entrée. Agri Abri Aquitaine souligne que « le montant du loyer est strictement basé sur le prix d'achat du matériel, des frais financiers de l'emprunt, des frais d'assurance, des frais de gestion, avec déduction des subventions reçues ». Le financement de ce bien est assuré par les apports de l'agriculteur, les soutiens publics, l'emprunt et l'apport de l'opérateur commercial de l'exploitant. P. C.