« En tant que gérante, je dois être prête à tout faire sur mon élevage porc»
Gérante d’un élevage de 850 truies naisseur engraisseur dans le Sud Ouest, Sandrine Paybou s’implique à fond dans son métier. Elle accorde une attention particulière à la gestion de son équipe de huit salariés.
Gérante d’un élevage de 850 truies naisseur engraisseur dans le Sud Ouest, Sandrine Paybou s’implique à fond dans son métier. Elle accorde une attention particulière à la gestion de son équipe de huit salariés.




Sandrine Paybou est la gérante de la SCEA Domenyuc à Asson, dans les Pyrénées Atlantique. Associée avec son père désormais retraité depuis son installation en 2012 après treize ans de salariat dans l’exploitation familiale, elle et à la tête d’un élevage de 850 truies naisseur-engraisseur sur deux sites équipés d’une fabrique d’aliments à la ferme et éloignés de 26 kilomètres.
Lire aussi : Sandrine Paybou « Nous sommes fiers de nos élevages de porcs »
Une équipe de huit salariés l’assiste dans son travail. « En tant que chef d’entreprise, je me dois d’être prête à faire face à tous les imprévus qui peuvent survenir dans mon élevage », souligne-t-elle.
Lire aussi L’élevage de porc se féminise
S’impliquer dans les postes stratégiques
Aujourd’hui, du fait de sa fonction de gérante, elle s’implique dans tous les postes stratégiques de l’élevage. Actuellement, elle assure seule la conduite de l’engraissement à la suite du départ du salarié en charge de ce poste : tris des porcs charcutiers, pesées, chargement… « Tout cela est bien physique, surtout quand on pèse 50 kg » ! Elle veut aussi gérer tous les imprévus techniques qui peuvent survenir sur l’exploitation, que ce soit à l’élevage ou dans la fabrique d’aliments à la ferme. Une volonté qui a parfois été mal comprise, certains de ses interlocuteurs étant peu habitués à avoir affaire à une femme dirigeante. « Au début, ils me prenaient de haut. Ils n’imaginaient pas que je voulais comprendre pourquoi un équipement était en panne et savoir si je pouvais le réparer moi-même. Désormais, ce n’est plus le cas », précise-t-elle.
Faire confiance aux salariés
Sandrine justifie également cette volonté de tout connaître dans son élevage par sa manière de gérer son équipe de salariés. « Je veux comprendre et savoir faire les tâches avant de leur confier un travail ». Tôt le matin, elle fait son tour d’élevage, ce qui lui permet de confier à ses collaborateurs leur feuille de route pour la journée quand ils arrivent. Dans cette région particulièrement marquée par la difficulté de recruter, elle met tout en œuvre pour que chacun se sente bien. « Je leur donne toutes les clés pour réussir en leur transmettant mes connaissances. Ensuite, je leur fais confiance. Leur travail est évalué sur les résultats, pas sur leur manière de les obtenir. Être tout le temps sur leur dos les empêcherait de prendre des initiatives et réduirait l’intérêt du travail ». Par ailleurs, elle investit actuellement dans un nouveau local technique comprenant des douches, une salle de repas, un coin pour se reposer, une télévision, un baby-foot… Elle est cependant consciente que ce qui compte le plus pour les salariés, c’est le chiffre en bas de la feuille de paie. « Je fais donc en sorte qu’on arrête de dire que le travail en agriculture ne paie pas. Tous mes salariés reçoivent une prime pour Noël et une autre pour les vacances d’été, correspondant à un treizième mois ». En travaillant ainsi, Sandrine se sent bien avec son équipe. « Chaque départ est difficile pour moi. J’ai un caractère avenant. Mais en tant que gestionnaire, il faut faire attention à ne pas trop s’attacher, » regrette-t-elle.
« Tu devrais aller avec tes enfants »
Cette manière de gérer son élevage et son équipe, Sandrine l’a apprise en autodidacte. Elle n’a suivi aucune formation de management. « Je suis arrivé sur l’élevage familial directement après mes études à l’école d’ingénieur agricole de Purpan-Toulouse, en 1997 », se souvient-elle. L’élevage avait été dépeuplé et 6 000 m2 de bâtiments avaient été construits pour augmenter la taille du cheptel. Elle voulait être présente pour aider son père au démarrage de la nouvelle structure. « J’étais motivé pour venir travailler sur l’exploitation familiale. Mais j’aurais préféré passer quelques années à l’extérieur pour voir ce qui se fait ailleurs, dans des entreprises de l’amont ou de l’aval de la filière notamment, afin de développer un esprit critique. L’impression que les choix familiaux sont les meilleurs est fausse ». Par ailleurs, durant sa phase de salariat avant son installation en 2012, elle travaillait essentiellement dans la partie naissage et reproduction, « un poste traditionnellement attribué à une femme », sourit-elle. Elle garde cependant un souvenir mitigé de cette période : « Difficile au départ d’être performante quand on a longtemps entendu le discours « Va, je m’en occupe…. Tu devrais aller avec les enfants… » ».
S’investir dans des causes extraprofessionnelles
À cinquante ans et presque trente ans d’activité dans son élevage, Sandrine ressent aujourd’hui le besoin de prendre du recul et de s’investir dans des causes extraprofessionnelles. « Œuvrer hors de mon exploitation m’enrichit au niveau personnel et relationnel ». Elle avoue également ne plus avoir envie d’un « excès de travail ». « Si on n’y fait pas attention, on peut passer 16 heures par jour dans l’élevage sans en voir le bout. Il y a toujours quelque chose à faire ». C’est pour cela qu’elle envisage l’embauche d’un chef d’élevage capable de manager l’équipe et de la remplacer en cas d’absence ou de soucis de santé. « Mon objectif est de trouver un meilleur équilibre entre ma vie professionnelle et ma vie familiale ».
Sandrine envisage sereinement la suite de l’exploitation familiale. Deux de ses enfants bientôt en âge de travailler s’intéressent sérieusement à l’entreprise familiale. « Mais je leur conseille bien sûr d’aller voir ce qui se fait de bien ailleurs pendant quelques années ». L’élevage est bien structuré, le modèle économique est solide. La fabrique d’aliments permet de bien maîtriser le coût alimentaire. « Les porcs charcutiers sont vendus à la coopérative Lur Berri. Actuellement la demande en viande de porc régionale est forte, tirée par les IGP Jambon de Bayonne et Porc du Sud-Ouest. Les projets de création ou d’extension d’élevages sont encouragés par la coopérative. Cependant, il est difficile dans la région de monter un projet d’augmentation du cheptel sans opposition de la population ». Par ailleurs, Sandrine avait rêvé à ses débuts professionnels de développer une activité de vente directe. « La taille importante de l’élevage et les difficultés de recrutement ont été rédhibitoires », conclut-elle.