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En Auvergne Rhône-Alpes, l’adaptation au changement climatique au menu des journées techniques ovines

Début mars, les moutonniers d’Auvergne Rhône-Alpes ont pu prendre part à deux journées techniques ovines dans la Drôme et le Puy-de-Dôme. Les adaptations face au changement climatique étaient au menu.

Dans le Puy-de-Dôme, la cinquantaine de participants à la journée porte ouverte du 1er mars, essentiellement des éleveurs, des porteurs de projets et des techniciens, se sont réunis sur l’exploitation du Gaec Lassalas, à Beaune-le-Chaud, au centre du département. L’évènement s’articulait autour de cinq ateliers thématiques, allant de la protection des troupeaux face à la prédation à l’équipement en contention. L’atelier qui a attiré le plus de monde portait sur l’adaptation au changement climatique.

Faire de la diversité des prairies un atout

Le changement climatique est déjà bien visible dans cette zone et va devenir de plus en plus prégnant comme en témoignent les projections climatiques réalisées dans le cadre du projet AP3C. Les éleveurs en ont conscience et s’interrogent sur les adaptations à mettre en place progressivement sur leurs exploitations. Sur son exploitation en zone volcanique, Camille Lassalas témoigne des pratiques mises en place au fur et à mesure des années pour nourrir ses 780 brebis Rava, conduites en reproduction accélérée avec une production d’agneaux légers de bergerie. « C’est un challenge à relever », confie l’éleveur en quête d’autonomie fourragère.

Le parcellaire s’étale entre 900 à 1 000 m d’altitude. Cet écart garantit une diversité de typologies des prairies avec des graminées plus ou moins tardives, mais aussi un étalement de leurs utilisations. Récemment une parcelle d’estive individuelle a été intégrée dans la surface de l’exploitation, ce qui permet de profiter d’une flore de qualité plus tardivement dans la saison.

Réaliser des fauches précoces et gérer finement le pâturage

La mise à l’herbe est relativement précoce pour permettre un passage de pâture supplémentaire et libérer des parcelles pour la fauche. Au pré, les brebis bénéficient d’un pâturage tournant rationné. Une pratique exigeante en temps de travail qui nécessite de poser des filets avant et arrière, mais qui évite le gaspillage d’herbe. « Les filets avant sont déplacés tous les jours ». Chaque pose de filet est une opportunité qu’il saisit pour observer ses prairies et adapter le temps de séjour et la surface à disposition des brebis. La mise bas a été retardée d’un mois en novembre afin de valoriser au maximum le pâturage d’automne et économiser un mois de stock fourrager.

Pour maximiser l’utilisation de l’herbe, 17 ha de prairies permanentes sont enrubannés précocement. Ces parcelles seront réintégrées dans le circuit de pâturage en début d’été. « Enrubanner un foin de qualité me permet de ne pas perdre les feuilles », explique l’éleveur. Au total, 75 ha destinés à la fauche (55 % de la surface totale) sont récoltés deux fois à un stade optimum (15 % au stade végétatif, 59 % à épi 10 cm et 26 % à épiaison). Comme les stocks représentent 65 % des fourrages consommés par les brebis (508 kg de matière sèche distribués par brebis), la réalisation de stocks en quantité et en qualité est capitale dans cet élevage d’altitude avec un hivernage long et des performances de reproduction élevées (1,76 de productivité numérique par brebis en 2020).

Réimplanter des prairies permanentes après un méteil

L’objectif d’autonomie fourragère a amené l’éleveur à revoir aussi sa conduite des prairies. « Depuis 2020, j’ai décidé de faire vivre mes prairies permanentes », souligne Camille Lassalas. Les sécheresses à répétition ayant détérioré certaines prairies l’éleveur a décidé d’en réimplanter avec un mélange suisse multi-espèces. Ces prairies sont semées en direct au 25 mai après l’enrubannage d’un méteil fourrager (triticale, pois, vesce) coupé au début de la floraison du pois.

Chiffres clés

2 associés dans le Gaec avec aide-familial et apprenti
780 brebis Rava
167 hectares
0,8 UGB/ha SFP de chargement

Dans la Drôme, les brebis vont dans les vergers et les vignes

Dans la Drôme, une quarantaine d’éleveurs ovins, d’arboriculteurs et de techniciens ont répondu présent le 4 mars dernier à la station expérimentale fruitière de Rhône-Alpes. Quatre ateliers thématiques étaient proposés tout au long de l’après-midi, favorisant les échanges entre professionnels. Les organisateurs ont également proposé un atelier sur l’adaptation aux changements climatiques via le pâturage sur des cultures pérennes de type verger ou vigne. C’est justement ce dernier atelier qui était le plus attendu et qui a été le plus plébiscité par les participants. L’atelier a été conduit à plusieurs voix, laissant la place à plusieurs acteurs de terrain (éleveurs et arboriculteurs). Ceux-ci ont accepté de témoigner sur les complémentarités évidentes entre vergers de pommiers ou de noyers et pâturage par les ovins.

" On redécouvre les atouts de la complémentarité entre production ovine et cultures pérennes "

 

 

 

Louise Riffard, animatrice de la Fédération départementale ovine de la Drôme. Créer des synergies entre les différentes productions agricoles est selon elle un modèle agricole d’avenir. Le pâturage des brebis dans les vergers et les vignes est un exemple qui fait sens.

Quelle importance ont les rencontres techniques pour le progrès agricole ?

Louise Riffard - Les moments de rencontre et de discussions entre pairs se sont raréfiés en 2020, contexte sanitaire oblige. Nous avions l’objectif avec cette journée de proposer des moments d’échanges techniques entre éleveurs et acteurs de l’agriculture. La ferme expérimentale de la Sefra dans la Drôme, qui a accueilli pour la première fois une troupe ovine, était toute désignée pour créer des liens entre arboriculteurs et éleveurs.

Pourquoi avoir mis l’accent sur le pâturage des vergers par les ovins ?

L. R. - Le pâturage des cultures pérennes est un sujet à la mode qui intéresse de nombreux acteurs agricoles et de plus en plus d’agriculteurs. En effet, malgré la spécialisation des exploitations qui a fait pratiquement disparaître cette pratique, les nombreux atouts de cette complémentarité sont redécouverts de part et d’autre.

Quels sont les intérêts pour la mise en place de ces synergies ?

L. R. - Pour les éleveurs, un potentiel fourrager non négligeable, notamment en contexte de sécheresses fréquentes. En moyenne montagne, avec l’abandon des espaces les plus sensibles à la prédation, ces surfaces cultivées prennent également de la valeur. Pour les producteurs, la présence des troupeaux, permet principalement de gérer l’enherbement des parcelles de façon qualitative, efficace et à faible coût. Certains cultivateurs soulignent également des avantages complémentaires dans la gestion de la culture, l’amélioration de la qualité du sol (apport de matière organique, diversité floristique…), dans la gestion sanitaire (consommation des fruits au sol, piétinement des feuilles, régulation des ravageurs… ), ou encore le gain de temps passé dans la parcelle.

Quels sont aujourd’hui les besoins pour améliorer ces partenariats gagnant-gagnant ?

L. R. - De nombreuses questions n’ont pas encore de réponses précises et nécessiteraient de nouvelles références techniques : gain de fumure versus herbe consommée, comment prévoir et réduire les dégâts, etc. Des points réglementaires, liés aux exigences de la PAC par exemple, restent également aujourd’hui en suspens. L’accompagnement des éleveurs et producteurs dans les relations partenariales est également un enjeu : la mise en lien est une première étape et des outils se développent en ce sens. Une animation reste nécessaire pour les faire se connaître et parfois pour accompagner la construction du partenariat qui doit rester gagnant-gagnant.

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