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Agriculture bio : l’Inrae prépare le changement d’échelle

La bio peut-elle devenir majoritaire en 2030 ? C’est une question que se pose l’Inrae. L’Institut de recherche mène actuellement des recherches qui mobilisent une vaste équipe de chercheurs, dans plusieurs disciplines. Le programme Metabio est destiné à donner sa place au bio demandé par les consommateurs et plus largement à favoriser les leviers de la transition écologique dont l'agriculture biologique est un des axes.

Pour l’Inrae, l’agriculture biologique est un « système global de gestion agricole et de production alimentaire alliant fourniture de denrées, protection de l’environnement, respect du bien-être animal et développement rural ».
© Michel Meuret / Inra

Comment accompagner et favoriser le développement de l’agriculture biologique ? Cette question est au centre des recherches menées par les équipes de l’Inrae qui suivent les 17 dispositifs expérimentaux en agriculture biologique que compte l’organisme de recherche. Depuis 2016, l’Institut national de la recherche agronomique est le « premier acteur mondial sur le bio » a précisé Philippe Mauguin, PDG d’Inrae, lors de la conférence de presse du 7 septembre sur le thème : « Agriculture biologique : vers un changement d’échelle ».

En 2020, plus de 9 Français sur 10 ont consommé des produits biologiques, et 13 % déclarent même en consommer tous les jours. L’augmentation de la part du bio est un des objectifs de l’Union européenne qui vise 25 % d’agriculture bio en 2030. En France, le bio représente actuellement 10 % des surfaces cultivées et l’objectif est d’atteindre 13 % à la fin du quinquennat. « On sort de la niche du bio qui était plutôt pour les bobos et les clientèles aisés, » assure Philippe Mauguin.

Métabio rassemble plusieurs programmes de recherche

Pour lever les verrous et favoriser les leviers de cette transition écologique, l’Inrae a mis en place Metabio, un meta programme de recherche sur la bio qui rassemble plusieurs programmes intermédiaires à la frontière de plusieurs disciplines.

Différentes problématiques sont étudiées au sein de l’Inrae, notamment celle de la fertilisation des cultures biologiques. Nouvelle réglementation sur les fertilisants, raréfaction de certaines ressources minérales (en particulier du phosphore), augmentation du coût des engrais… différents sujets préoccupent les producteurs bio. Les travaux de Claire Jouanny, chargée de recherche au sein de l’Unité mixte agroécologie innovation et territoires (Agir) à Toulouse, portent sur le cycle du phosphore dans les systèmes de culture. Le projet PhosphoBio, mené en partenariat avec Arvalis et spécifiquement dédié à l’agriculture biologique, fait partie de ces travaux.

« Assurer la production avec des éléments nutritifs qui deviennent rares, » tenir compte à la fois des enjeux de conservation de la biodiversité, de l’adaptation de cultures aux systèmes climatiques, pour Lionel Alletto, chercheur en agroécologie au sein de l’Unité Agir, c’est cela « changer d’échelle ». Un projet européen va prochainement démarrer pour travailler sur les mélanges d’espèces et les cultures intermédiaires pour l’amélioration globale de la fertilité des sols et le stockage du CO2.

Un choix des consommateurs pour la santé et la qualité

L’argument santé est le premier critère qui pousse les consommateurs à choisir le bio. Vient ensuite la qualité associée au goût. « Le consommateur demande de plus en plus de qualité des produits, » confirme Sophie Prache qui travaille sur la qualité des aliments d’origine animale. Pendant deux ans, l’ingénieur de recherche a notamment mené au sein d’une équipe de 20 scientifiques une expertise pour évaluer l’influence des conditions de production et de transformation. En élevage biologique, « les analyses montrent une meilleure teneur en nutriments, » assure-t-elle. Une alimentation des animaux avec plus de fourrage et plus de légumineuses augmente la teneur des aliments issus de l’élevage en oméga 3 et anti-oxydants. En revanche, ces systèmes d’élevage sont plus sensibles aux aléas climatiques et les animaux de plein air sont également plus exposés aux contaminants de l’environnement.

Evaluer le « consentement à payer » pour le bio

L’Inrae cherche aussi à évaluer au travers de ses recherches si la demande pour le bio va continuer à se développer et être durable sur le long terme. C’est la question que se pose Eric Giraud-Héraud, directeur de recherche à Bordeaux. Ses études portent sur le vin. Il cherche à évaluer si le bio déclenche l’achat du consommateur et le prix que le consommateur est prêt à payer en fonction du procédé de production, ce qu’il appelle le « consentement à payer ».

Le logo AB a une force connue et reconnue mais le chercheur constate une « multiplicité des labels » qui peuvent « brouiller le message ».

Les différents travaux menés par l’Inrae montrent que l’estampille « local » est bien valorisée, souligne Cécile Détang-Dessendre, économiste et directrice de recherche à l’Inrae.

Deux tiers des achats en bio sont Français. Sur le tiers des achats en importation, une bonne moitié correspond aux achats dits « Marco Polo », de denrées alimentaires qui ne sont pas cultivées en France métropolitaine comme le café et les bananes. Mais une partie de ces importations concerne des achats de contre-saison. « Il y a un travail à faire par les professionnels auprès des consommateurs pour expliquer ce que veut dire consommer à contre-saison, estime l’économiste.

Du bio accessible à tous

« L’ambition de ce métaprogramme est qu’il serve aussi à la transition agroécologique, pas nécessairement jusqu’au bio, » explique Françoise Médale, directrice de Métabio. L’idée est d’aller vers une transition où le bio aura toute sa place mais ne sera pas seul. Est-ce que la bio peut devenir majoritaire en 2030 ? La réponse à cette question est liée à des enjeux environnementaux, sociaux… et pour la chercheuse, elle dépend aussi des politiques publiques, qui ont un rôle clé à jouer pour accompagner les transitions.

Il ne peut pas y avoir de « massification du bio clivée socialement », affirme Philippe Mauguin. « Pas de fracture sociale dans l’accès au bio », pour le directeur de l’Inrae, c’est la condition pour réussir la transition écolologique.

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