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Spoutnic : un robot pour réduire la ponte au sol

Benoît et Lætitia Savary ont participé à l'élaboration du projet Ti One qui pourrait améliorer les conditions de travail de beaucoup d’éleveurs de poules pondeuses reproductrices élevées au sol.

Depuis plusieurs mois, un petit engin à quatre roues motrices sillonne de temps en temps les parquets de l’élevage de reproducteurs de poulets de chair de sélection Hubbard tenu par Lætitia et Benoît Savary. Le prototype est encore en phase de mise au point, mais les ingénieurs de Cimtech qui l’ont conçu progressent vite. Ti One ressemble pour l’instant à une caisse métallique de huit kilos montée sur quatre roues motrices. Ses 18 cm de haut, 24 cm de long et 50 cm de large, roues comprises, lui permettent de se glisser sous le matériel occupant le gisoir où évoluent coqs et poules repros. Son rôle sera simplissime : circuler en permanence pour activer les oiseaux et surtout éviter que certaines poules pondent au sol plutôt que dans les pondoirs. En effet, avec l’évolution des attentes sociétales, notamment la réduction des antibiotiques en élevage, ces œufs ne sont plus incubés et engendrent des non-valeurs pour l’éleveur et pour le sélectionneur.

Soulager l’éleveur au quotidien

Le point de départ fut un « gros coup de fatigue » de Lætitia durant la période critique de maîtrise des pontes au sol. Pour soulager son épouse, Benoît a cherché des solutions compatibles avec le bien-être animal, et différentes des ballons ou autres objets d’effarouchement bricolés. Sans succès. « À l’heure où l’on envoie des robots dans l’espace, aucune solution mécanique (robot de tonte, robot aspirateur, jouet buggy télécommandé…) n’était adaptable et satisfaisante. J’ai donc cherché des gens capables de concevoir un tel appareil », résume l’éleveur. Après des discussions sur les attentes du couple et des recherches sur l’existant, l’équipe de la société Cimtech(1), dirigée par Lionel Planquette et Yves Beaulieu, a imaginé et fabriqué un engin simple d’installation et d’utilisation. Muni de roues crantées de 17 cm de diamètre motorisées, Ti One tourne à la manière d’un char et peut évoluer sur un sol irrégulier. Pour le guidage, plusieurs « ancres » électroniques sont disposées dans le poulailler. Elles émettent des ondes radios, non perturbantes pour les oiseaux, et selon Cimtech plus fiables en milieu poussiéreux que des rayons laser ou qu’une vision par caméra posée sur le robot. Elles permettent à Ti One de se géolocaliser à 10 cm près. L’engin suit une trajectoire déterminée à la vitesse d’un mètre par seconde (marche lente). Elle lui a été assignée par programmation modifiable à tout moment. Il suffit de porter le robot sur le trajet choisi et d’indiquer les points de passage par pression sur un écran du robot. Pour les premiers essais, Ti One a suivi le trajet habituel des éleveurs, avec l’aller entre les deux lignes de mangeoires près des pondoirs et le retour le long de la ligne d’alimentation des coqs.

D’autres applications à imaginer et à tester

Avant d’arriver à la version finale, Ti One va être testé en continu durant le prochain lot du couple Savary. Ce test de faisabilité et de durabilité (résistance, nettoyabilité, autonomie énergétique, efficacité et comportement des poules…), sera aussi suivi par des éthologues de l’université de Rennes et par l’Itavi, qui l’évalueront dans d’autres élevages. « Nous allons découvrir et quantifier ce qu’il apporte vraiment aux éleveurs », souligne Lionel Planquette, qui espère que d’autres applications émergeront. Une fonctionnalité liée aux pontes au sol sera attentivement suivie par les Savary. L’engin pourrait aussi être équipé d’émetteurs de stimuli (sons, lumières) ou de capteurs (température, gaz…), ouvrant la voie à de nouvelles utilisations dans ou hors de bâtiment (surveillance, alerte, stimulations différenciées des volailles…). Ti one n’est encore qu’au début de son histoire, estiment les partenaires du projet qui se sont associés pour créer la société Tibot. Prenant le relais de Cimtech, Tibot est chargée de la production et de la commercialisation des robots, avec un démarrage prévu pour l’automne 2017.

(1) Installée à Bourgbarré en Ille-et-Vilaine, l’entreprise de sept personnes conçoit des appareils de A à Z pour d’autres sociétés — notamment des objets connectés — qui mêlent mécanique et électronique.

Un travail fastidieux mais indispensable

« Quand le chat est parti, les souris dansent », résume Benoît Savary pour illustrer la problématique de la ponte au sol. Dès le premier œuf pondu, sa femme Lætitia commence une ronde qui va durer cinq à six semaines du matin au soir, voire plus longtemps. Une bataille s’engage entre l’éleveuse et les 7 500 poules réparties dans quatre parquets. L’une déloge les poules et ramasse les œufs quand les autres essaient de pondre là où elles veulent (angles, bordures, dessous de lignes d’équipement…). À mesure que le pic de ponte approche, ces œufs au sol augmentent en nombre et en pourcentage. « On peut atteindre 25 % des œufs pondus hors nids au moment de la montée en ponte, voire plus », souligne Benoît en montrant le carnet que Lætitia remplit consciencieusement à chaque tour de parquet (d’une demi-heure en moyenne). Il faut passer le plus souvent possible pour réduire l’intervalle durant lequel la poule a l’opportunité de pondre. Benoît a calculé qu’avec son bâton d’effarouchement et son seau, sa femme parcourt jusqu’à 8 km par jour. Moyennant ce travail très chronophage, le taux de ponte retombe peu à peu à un seuil de 3 à 4 %.

Au moins neuf millions d’OAC récupérés

Selon Jacky Michard, directeur de la production Hubbard, la France compte environ 600 bâtiments de reproducteurs Gallus chair, confrontés à la ponte au sol à des degrés variables : un tiers sont à un niveau difficilement compressible (2-3 % d’œufs pondus au sol), un tiers de 3 à 5 %, et probablement un tiers au-delà de 5 %. Le robot aurait donc un intérêt économique décroissant avec la maîtrise technique, mais le gain de pénibilité concerne tous les élevages. Avec une réduction des pontes au sol d’un à deux points, Jacky Michard estime que l’économie pour la filière repro chair serait de neuf millions d’œufs à couver par an (15 000 OAC gagnés pour un atelier moyen et 30 000 OAC pour un atelier du dernier tiers).

Un marché naissant

Le marché des machines d’assistance à la conduite d’élevage est tout juste naissant, avec très peu d’offres :

Poultrybot a été conçu par l’université néerlandaise de Wageningen pour collecter les œufs au sol, mais reste encore expérimental au vu des vidéos sur YouTube ;
Octopus poultry safe est l’autre robot français présenté cette année au Space (Innov’Space une étoile). De grande taille (il ne passe pas sous les lignes d’équipements) et pesant une trentaine de kilos, ce robot guidé par laser et caméra est équipé d’une herse rotative (ou deux) destinée à décroûter le sol et à y injecter un désinfectant en présence d’animaux. De plus, il pulvérise des produits biocides dans l’air ambiant et est équipé de capteurs (température, hygrométrie, CO2). Ses concepteurs envisagent de l’équiper d’un bras préhenseur pour collecter les œufs pondus hors nid.
Octopus Biosafety, cousin du précédent, est un outil généraliste qui pulvérise du biocide par voie aérienne (hôpital, magasin, entrepôt…), mais pourrait-il réaliser des vaccinations par voie aérienne ?

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