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Un plan d’actions pour moins traiter en poulet standard

Le groupe vétérinaire Cristal propose un plan à long terme aux éleveurs de poulet standard pour leur permettre de réduire les frais de traitement des colibacilloses en incluant la vaccination.

La production de poulet standard est une des principales cibles du seul vaccin commercial bactérien vivant et atténué contre le colibacille 078, mais moins de 2 % des lots seraient vaccinés. Le vaccin est surtout employé par importance décroissante en élevage de reproduction, en poulette œuf de consommation, en dinde et en canard de chair(1). « Nous avons des éleveurs mixtes poulet-dinde qui vaccinent pour la dinde, mais ils n’y pensent pas pour le poulet », constate Jocelyn Marguerie, vétérinaire du réseau Cristal. Pourtant, des essais terrain, comme ceux présentés par son collègue Charles Facon, montrent son intérêt sur la réduction des traitements antibiotiques en poulet. Les deux freins à son utilisation sont le coût élevé (environ 3 centimes la dose par poussin) et l’obligation de non-usage d’un antibiotique une semaine avant et après la vaccination. Les éleveurs hésitent à prendre ce risque sur une durée d’élevage de 35 jours. Par ailleurs, le traitement antibiotique est souvent efficace, même si cela peut vite coûter plus cher que la vaccination. « Pour emporter l’adhésion vis-à-vis de la vaccination, il nous manquait de la méthode, constate Jocelyn Marguerie. Et c’est ce qui nous a poussés à préparer un plan d’actions. »

C’est dans ce contexte que le vétérinaire et ses collègues ligériens du réseau Cristal ont élaboré une démarche pour convaincre et accompagner des éleveurs. Pour que la vaccination ait le maximum de réussite, certains préalables doivent être réunis. Il n’est donc pas question de préconiser une vaccination généralisée sans tenir compte des contextes individuels. « La sélection des élevages est fondamentale », estime son confrère Charles Facon. Il faut prendre en compte la réceptivité de l’éleveur à l’égard de la réduction de l’usage des antibiotiques et la possibilité du retour sur investissement. S’ajoute l’historique vis-à-vis de la colibacillose. « Il est plus facile de présenter la vaccination avec de la colibacillose respiratoire répétée, qu’avec des accidents ponctuels de cellulite », souligne le vétérinaire.

Création d’une démarche "boîte à outils"

Plutôt qu’un audit ponctuel sur la vaccination, le groupe de travail a préféré une méthode d’approche et d’accompagnement sur le long terme, lot après lot, à travers une "boîte à outils" utilisant des documents préexistants. Elle permet au vétérinaire d’adapter sa démarche vaccinale à des situations variées, tout en laissant des traces écrites propres à la problématique colibacille. « Il n’est pas non plus question de dérouler un argumentaire standard et des préconisations trop générales, sous peine de décourager », ajoute Jocelyn Marguerie.

L’enclenchement du plan est à l’initiative du vétérinaire ou du technicien. Cela démarre par le bilan de fin de lot ou par le bilan sanitaire annuel (BSE). Le bilan de fin de lot est réalisé « à chaud », assez souvent en présence du technicien. « Lorsqu’un lot s’est mal passé, c’est l’occasion de proposer la vaccination dans une optique d’amélioration », souligne le vétérinaire. Proposée lors du BSE, la démarche s’adresse plutôt aux éleveurs qui veulent encore progresser.

Réalisée un peu plus tard, la seconde étape repose sur deux audits de la biosécurité et de la qualité de l’eau, en se basant sur des modèles d’audits simplifiés préexistants. « C’est un préalable nécessaire pour maximiser l’effet de la vaccination. La biosécurité ne concerne pas que l’influenza aviaire et l’eau est un vecteur important de la contamination en E. coli. » S’ajoutent des bilans d’analyses (bactériologie, histologie, PCR…) ou de pratiques vaccinales (Gumboro, bronchite infectieuse). Plusieurs options sont ensuite possibles. Le vétérinaire peut reporter la vaccination tant que l’éleveur n’aura pas résolu les défauts sanitaires majeurs ; il peut prioriser la résolution de problèmes respiratoires avant d’envisager la vaccination E. coli ; il peut alléger le programme vaccinal pour contenir son budget. Jocelyn Marguerie estime que la vaccination E. coli améliore la qualité finale et l’homogénéité des poulets. « Idéalement, l’évaluation de son intérêt doit aussi inclure l’évaluation de l’impact à l’abattoir », conclut-il.

(1) L’autorisation de mise en marché concerne les espèces Gallus (poule et poulet) et dinde.
 
Avis d'expert

Jocelyn Marguerie, vétérinaire du réseau Cristal

" Une baisse de 75 % des frais antibiotiques "

" Je vais citer le cas d’un éleveur en Deux-Sèvres qui élève du poulet standard sur 7 000 m2. Il consommait 30 % d’antibiotiques en plus par rapport à la moyenne de son secteur. Après cinq bandes vaccinées contre les colibacilles, il a amélioré sa marge poussin-aliment de 0,2 € en moyenne et son résultat net de 0,5 €/m2 et par lot. L’amélioration est venue d’une réduction de la mortalité en fin de lot. Les frais antibiotiques ont diminué de 0,6 €/m2 (moins 75 %) et le programme de vaccination n’a augmenté que de 0,3 €/m2 du fait d’un allégement du programme de vaccination Gumboro. Sur une année, le gain serait de l’ordre de 20 000 €. "

Une démarche ciblée

Vingt à vingt-cinq pourcents des élevages de volailles consomment la moitié des antibiotiques, concluait Émilie Merigoux en 2015, après une enquête réalisée dans le réseau Cristal dans le cadre de sa thèse vétérinaire. C’est donc cette frange qu’il faudrait cibler pour réduire significativement les quantités globales d’antibiotiques. S’inspirant d’une typologie réalisée en production de lapin, le groupe de travail a aussi défini quatre profils-types d’éleveurs de poulets en fonction de leur sensibilité à la démédication et de l’impact économique des problèmes qu’ils rencontrent avec E. coli. Le conseil est ainsi adapté à chaque catégorie.

Vacciner réduit les frais sanitaires

Un essai de vaccination E. coli a été réalisé dans sept élevages de poulets standards Ross PM3 (abattus 35 jours vers 1,85 kg) qui avaient régulièrement des infections à E. coli. Ils ont produit 127 lots (3 millions d’oiseaux), dont 66 ont reçu le vaccin vivant à l’élevage.

Le nombre de traitements antibiotiques réalisés est significativement différent entre les lots vaccinés ou pas, souligne Charles Facon, vétérinaire réseau Cristal. Il constate que la vaccination a eu un impact positif sur la baisse des traitements, y compris dans des élevages qui n’étaient pas atteints de manière chronique par du E. coli O78 à cible respiratoire.

En revanche, les résultats techniques ne sont pas significativement différents entre les deux groupes, même s’il existe une tendance à moins de mortalité et de saisies pour les poulets vaccinés. Néanmoins, l’analyse statistique poussée dans un élevage qui a cessé de vacciner montre un effet significatif sur le poids vif. Celui-ci atteint 1,92 kg sur les huit premiers lots vaccinés, contre 1,78 kg sur les sept lots suivants non vaccinés.

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