Mieux connaître les usages des antibiotiques pour communiquer
Alors que l’exposition des volailles aux antibiotiques a fortement baissé, la filière manque de données précises sur les usages, ce qui l’empêche de communiquer sur ses progrès.
Alors que l’exposition des volailles aux antibiotiques a fortement baissé, la filière manque de données précises sur les usages, ce qui l’empêche de communiquer sur ses progrès.
De 2011 à 2016, l’exposition des volailles aux antibiotiques mesurée par l’Alea, l’indicateur de référence, a diminué de 42,8 %. La baisse a été de 45,3 % pour les fluoroquinolones et de 26,7 % pour la colistine, deux familles particulièrement visées par le plan de réduction. « L’objectif d’Ecoantibio 1 (2012-2017), qui visait une baisse de 25 % de l’exposition, a donc été dépassé grâce à un engagement fort des vétérinaires, des équipes techniques et des éleveurs, a souligné Nathalie Rousset de l’Itavi, lors de l’assemblée générale du Cravi Pays de la Loire. Les efforts doivent se poursuivre pour réduire l’exposition aux antibiotiques, surtout critiques, améliorer la prévention, développer les solutions alternatives et communiquer. » Le plan Ecoantibio 2 (2017-2021) vise à évaluer les impacts du premier plan, à valoriser les résultats et à poursuivre la dynamique en consolidant les acquis. En s’appuyant sur trois thèmes : développer les mesures de prévention des maladies et faciliter les traitements alternatifs ; communiquer et former à la lutte contre l’antibiorésistance, à la prescription raisonnée et aux autres moyens de maîtrise des maladies ; mettre à disposition des outils de suivi du recours aux antibiotiques ainsi que de prescription et d’administration responsables.
Connaître les usages par espèce
Selon le rapport de l’European Medecines Agency (EMA) d’octobre 2017 sur les ventes d’antibiotiques vétérinaires, la France se situe désormais au 12e rang des États membres par ordre décroissant d’exposition, en net recul. Alors que la moyenne européenne est de 135,5 mg/PCU (mg/kg de poids vif standard), celle de la France est de 70,2 mg/kg, largement inférieure à l’Espagne (400 mg), l’Italie (plus de 300 mg), la Belgique (150 mg) ou la Pologne. Et alors que l’exposition moyenne en Europe a baissé de 13,4 % depuis 2010, en France la baisse a été de 48 %.
Pourtant, alors que l’Allemagne, le Royaume-Uni ou le Danemark communiquent sur la baisse de l’exposition aux antibiotiques, la France ne peut le faire pour cause de méconnaissance de leurs usages précis. Une difficulté réside dans l’approche « toutes volailles » qui rend l’interprétation malaisée. « Jusqu’en 2012, il y a quelques données en poulet de chair, précise Nathalie Rousset. Mais depuis, il n’y a plus de distinction entre les espèces. » En 2016, les filières volailles de chair ont signé une Charte d’engagement dans laquelle elles s’engageaient à appuyer la démarche collective RefA2vi (Réseau professionnel de références sur les usages d’antibiotiques en élevages avicoles), outil de remontée des usages par espèce. « Il est urgent d’activer RefA2vi, note Anne Richard, de l’Itavi. Plus on attend, plus le point zéro de référence sera bas et donc les baisses constatées plus faibles. » Le schéma de fonctionnement pourrait reposer sur un consortium de volontaires (sans doute les OP) fournissant anonymement les données aux comités interprofessionnels et sur des calculs par l’Itavi. « Un éleveur peut avoir plusieurs vétérinaires, alors que les OP font déjà un travail de centralisation », souligne Vincent Turblin, vétérinaire du Réseau Cristal. « Il faut communiquer sur les progrès réalisés, mais aussi expliquer que les antibiotiques sont indispensables, a complété Isabelle Leballeur, secrétaire générale du Cravi. La communication et les attentes pour du zéro antibiotique suscitent beaucoup d’inquiétudes chez les éleveurs. »
« Des dépenses de santé en baisse »
« Les dépenses de santé des élevages diminuent grâce à une baisse très nette des ventes d’antibiotiques, compensée par plus de prévention et d’hygiène. Le trio éleveur-technicien d’OP-vétérinaire est essentiel, avec la nécessité d’indicateurs clairement partagés et un rôle central du Bilan sanitaire d’élevage pour aligner les stratégies de démédication. À un certain niveau plateau des actions de masse, la démédicalisation devient réellement une méthode au cas par cas. Il faudrait plus valoriser le temps passé par les vétérinaires. »
Vincent Turblin, vétérinaire du Réseau Cristal