Rester vigilant face aux tordeuses
La pression des vers de grappe est très variable selon les vignobles, et peut exploser à la faveur d’un climat favorable. Il est recommandé de surveiller de près les 2e, 3e voire 4e génération de tordeuses.
Avec le réchauffement climatique, les deux espèces de tordeuses de la grappe, Eudémis et Cochylis sont désormais présentes dans tous les vignobles. « Si Cochylis domine encore dans le vignoble champenois, la présence de l’Eudémis est plus marquée sur ces dernières années », remarque ainsi Pascale Pienne du comité Champagne.
D’une année à l’autre, la pression des tordeuses peut être très différente, essentiellement en liaison avec les conditions climatiques. « Les années fraîches et pluvieuses sont plutôt favorables à Cochylis et les années chaudes à Eudémis, souligne Denis Thiéry, de l’Inra de Bordeaux. Mais des températures caniculaires supérieures à 35 °C contrarient le développement des vers de la grappe. » En Aquitaine, dans le Libournais « la pression tordeuses a été particulièrement forte en 2012 et 2016, avec un IFT (Indicateur de fréquence de traitement) tordeuses de 1,45, remarque Antoine Verpy, du GDON du Libournais. Alors que 2017 était très calme ». En Val de Loire, les populations sont jugées à la baisse ces dernières années, mais comme le commente Nadège Borchard de la chambre d’agriculture des Pays de Loire, « il peut y avoir une concentration sur certains secteurs, des vols plus étalés sur 18 jours et des pontes sur 28 jours qui nécessitent de bien positionner l’ovicide avec une spécialité qui peut couvrir la génération, en général la G2 ». Et, il faut rester très vigilant, ajoute Denis Thiéry, « car on peut avoir une G2 peu visible et une G3 explosive. Et, avec le réchauffement climatique, certains vignobles méridionaux peuvent même craindre une G4 ».
Compter les pontes pour plus de pertinence et d'efficacité
Pour évaluer le risque, l’indicateur traditionnellement utilisé, le piégeage des papillons, ne suffit pas. En effet, la période clef qui permet de juger le risque est celle des pontes. Le comptage des pontes est donc plus pertinent, mais souvent difficile à mettre en œuvre compte tenu de la période étalée de ces pontes. « Toute la difficulté est de bien positionner un insecticide qui aura une rémanence suffisante pour gérer la génération ou plutôt les générations d’Eudémis et de Cochylis qui ne sont pas toujours concomitantes », remarque Benoît Bazerolle, de la chambre d’agriculture de la Côte-d’Or.
Réguler naturellement les tordeuses
Face à ces ravageurs qui peuvent être très dommageables pour la qualité de la vendange, de plus en plus de vignerons mettent en œuvre la confusion sexuelle (73 000 hectares en 2017, 90 000 hectares en 2018). Cette méthode de lutte, tout comme la gestion raisonnée des tordeuses associées à des pratiques culturales comme l’enherbement expliquent sans doute le développement des auxiliaires dans les vignobles. Ainsi, selon le BSV bilan 2017, en Aquitaine, on signale pour la campagne 2017 un fort développement des opilions, forficules ou larves de coccinelles. Un signe encourageant, mais qui ne dispense pas des observations y compris en confusion sexuelle.
« Une montée en puissance des vers de grappe »
« Mis à part en 2017, j’ai pu constater une montée en puissance de la problématique vers de grappe sur la propriété pour la période 2014-2016. Il faut être particulièrement vigilant sur la G2 et la G3 car cela peut occasionner des dégâts importants au moment de la maturation des raisins. En conversion bio, nous avons mis en place, depuis deux ans, la confusion sexuelle. Cela nous permet d’être plus sereins mais ne nous dispense pas des observations, en particulier lorsque le climat est favorable aux vers de grappe. Nous avons choisi les Rak 1+2 car ils permettent de couvrir une période de 180 jours alors que les périodes de couverture des autres solutions en confusion en développement sont plus courtes et ne gèrent pas nécessairement une possible fin de 3e génération. »
Karl Todeschini, du château Mangot à Saint-Émilion, en Gironde