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Produire sa propre énergie sur une exploitation viticole, c’est possible

 Les énergies renouvelables, notamment la solaire et la géothermie, sont une aubaine pour les vignerons. Mais les projets doivent être mûrement réfléchis.

Le solaire reste une solution intéressante

Qu’on se le dise, la période d’euphorie du photovoltaïque est derrière nous. « Il y a quelques années, tous les projets étaient rentables, se souvient Julien Ménaut, chargé de développement chez Inélia. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. » Selon lui, le photovoltaïque présente toujours un intérêt, mais dans des cas plus ciblés. C’est vrai notamment sur des installations inférieures à 9 kilowatts crête (kWc), soit environ 60 m2 de panneaux, davantage appuyées par les pouvoirs publics. Grâce à un prix de rachat fixé à environ 20 centimes du kilowatt (kW), l’investissement initial, de l’ordre de 20 000 euros, est quasi systématiquement rentabilisé en huit ans en moyenne. Le marché des plus grosses installations, quant à lui, a souffert d’une baisse des prix de rachat de l’électricité (environ 13 c€ à l’heure actuelle). « Deux éléments déterminent maintenant la rentabilité de ces projets, explique Gaël Grosjean, chargé de mission énergie à la chambre d’agriculture de la Gironde. Il s’agit d’une part du coût de raccordement au réseau, qui peut être compris entre 10 000 et 120 000 euros selon votre emplacement géographique. Et d’autre part, si le bâtiment existe ou non. Le moment de la conception est le plus opportun. » À la faveur d’une forte baisse du coût des technologies, le retour sur investissement peut être au rendez-vous dès dix ans lorsque les conditions sont réunies.

Mais le rapprochement entre prix d’achat et prix de vente pousse de plus en plus de viticulteurs à l’autoconsommation. Un système qui ne permet pas de se rémunérer, mais qui allège la facture. « Il y a une vraie dynamique, remarque Julien Ménaut. Jusqu’ici personne n’en parlait car c’était moins intéressant que la revente, mais je pense que c’est un marché d’avenir. » Un sentiment que partage Jérémie Baudou, directeur du développement territorial Champagne Ardenne chez EDF. L’entreprise faisait d’ailleurs la promotion de la Smartflower sur le salon Viti-Vini. Une sorte de tournesol design et photovoltaïque de 5 mètres d’envergure pour 2,31 kWc de puissance. Conçue pour l’autoconsommation, elle suit le soleil afin d’optimiser la production. « Production qui n’est pas énorme, mais permet de recharger une voiture ou des chariots élévateurs », illustre le directeur. Il faut compter environ 20 000 euros pour une telle installation prête à l’emploi. « En terme purement économique, le retour sur investissement est plus long. Mais certains viticulteurs l’utilisent comme vitrine, notamment pour la clientèle d’Europe du Nord qui est très sensible à cela », confie-t-il. Toutefois, mieux vaut ne pas dépasser 30 % de ses besoins, car la production ne colle pas toujours à la consommation.

L’éolien est difficilement rentable

« Le petit et moyen éolien était un secteur plein de promesse pour le milieu agricole, mais il y a eu beaucoup de déconvenues », regrette Isabelle Hascoët, conseillère à la chambre d’agriculture d’Ille-et-Vilaine. Dans ce domaine, les mauvaises expériences technico-économiques se sont multipliées, les générateurs se révélant souvent décevants vis-à-vis des kilowatts heure (kWh) produits annoncés. Pour la conseillère, le problème vient d’un marché trop peu développé pour faire diminuer le coût d’investissement, et de la difficulté à trouver du matériel performant.

« La rentabilité n’est pas évidente, avoue-t-elle. Mais certains franchissent le pas par conviction. D’ailleurs, pour celui qui fait de la vente directe, il peut y avoir une plus-value en termes d’image. » Avant de se lancer, il est indispensable de réaliser une étude sur le potentiel de vent, surtout sur les projets de moins de 11 mètres de haut, non soumis au permis de construire. La conseillère préconise également de mettre le prix dans l’éolienne, et cite en exemple un agriculteur dont l’installation fonctionne bien, mais qui a investi plus de 100 000 euros pour une puissance de 20 kWc. « Si l’on en croit la Cour des comptes, le tarif de rachat devrait augmenter dans les années futures. C’est peut-être un pari sur l’avenir… », conclut Isabelle Hascoët.

La géothermie est encore trop peu plébiscitée

« La géothermie est une solution très intéressante pour le milieu vinicole, assure François Bodin, ingénieur à l’Ademe. Mais elle souffre d’un déficit d’image. » C’est pourtant une source d’énergie renouvelable dont le système de production est maintenant éprouvé. Il permet de répondre efficacement aux besoins en chaud et en froid de la cave et peut être installé partout. Mais il nécessite un investissement initial plus conséquent. Par exemple, une puissance installée de 200 kW nécessite 200 000 à 300 000 euros, selon la technologie (l’énergie thermique peut être captée via une nappe ou via le sol).

« Avec les aides de l’Ademe, qui peuvent atteindre 40 à 50 % actuellement, le retour sur investissement descend sous la barre des dix ans », assure l’ingénieur. Il faut dire qu’une pompe à chaleur géothermique à la cave permet de diminuer a minima par deux la facture d’électricité. De plus, le matériel robuste utilisé dans la conception de ces systèmes demande peu d’entretien, et la durée de vie peut atteindre plus de cinquante ans. « Ce type de projet est plutôt destiné à des caves qui ont une vision sur le long terme », consent François Bodin. De son côté, Gaël Grosjean conseille de faire appel à un bureau d’études en amont, pour vérifier la faisabilité du projet.

Dans la même veine, les calories du sol peuvent être récupérées par un échangeur air-sol, ou puits canadien. Cette entrée d’air passant à travers le sol permet d’aider à réguler la température des locaux tout au long de l’année. Ce type d’équipement est prioritaire sur les dossiers d’aides de FranceAgriMer.
 

 

Témoignage
Fabien Mistre, président de la cave de Correns, dans le Var

La production d’électricité finance notre nouvelle toiture

" Il y a six ans, nous nous sommes lancés dans un projet photovoltaïque. Nous devions refaire le toit de la cave, et produire notre électricité est apparu comme le meilleur moyen de financer la rénovation. Nous avons donc installé 1 000 m2 de panneaux sur la nouvelle toiture, pour un coût total de près d’un million d’euros. D’un côté nous avons un contrat de revente de l’électricité à EDF sur vingt ans, de l’autre côté un crédit sur la même période. Et les comptes s’équilibrent tous les ans ! Nous avons même un petit excédent qui nous permet de nettoyer régulièrement les panneaux. Car sur un chai, les fermentations entraînent le développement d’un champignon qui peut faire baisser l’efficacité. Dans une quinzaine d’années, cela nous rapportera même de l’argent, donc c’est un réel succès. Au point d’inspirer les viticulteurs pour leurs propres exploitations. J’ai moi-même un projet de 800 m2, qui reste intéressant malgré la baisse des tarifs de rachat. "



 

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