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Mildiou sur grappe : la prudence est de mise

Dans le Bordelais, l’apparition du mildiou est de plus en plus chaotique. Une observation plus fine des conditions météo et une bonne connaissance des nouveaux produits phyto sont nécessaire pour ne pas se faire piéger.

L'installation du mildiou dans le Bordelais devient plus brutale qu'auparavant, comme sur ces grappes.
© X. Delbecque

« Ces dernières années, je n’ai eu aucun mildiou sur feuille ; il est sorti directement sur grappes », constate un vigneron bordelais. Même écho au château Canon La Gaffelière, à Saint-Émilion, en Gironde. « Depuis 2010, nous constatons que le mildiou arrive directement sur grappes, et qu’il est beaucoup plus difficile de lutter contre cette maladie, rapporte Nicola Fagotto, responsable R & D du domaine. Dès que c’est le cas, nous appliquons du compost liquide avant de traiter au cuivre. La vigne réagit ainsi plus vite. »

Les souches de mildiou auraient-elles muté, ou bien son cycle aurait-il changé ? À l’IFV, Marc Raynal considère qu’il est difficile de généraliser ou d’affirmer que le pathogène aurait dorénavant tendance à attaquer la grappe avant la feuille. Toutefois, sur le Bordelais, il établit une tendance d’installation et de développement des épidémies de mildiou plus chaotique qu’au début des années quatre-vingt-dix. « Le scénario avec installation des foyers primaires puis incubations et repiquages par voie secondaire n’est plus forcément le schéma classique du développement de l’épidémie, indique-t-il. Sa mise en place et son développement sont parfois très brutaux et moins progressifs. » Mais pour lui, la cause n’est pas forcément à rechercher du côté d’une variation de la biologie du pathogène, mais serait imputable à une conséquence des perturbations climatiques actuelles. L’étude des données météorologiques récentes traduit en effet une fréquence plus marquée de variations climatiques brutales, notamment des températures, susceptible d’être à l’origine de ces développements de maladie plus chaotiques.

Des décalages de rémanence possibles entre feuilles et grappes

« Ces variations de températures, avec de fortes amplitudes sur des périodes parfois très courtes de quelques jours, étaient jusqu’alors peu habituelles ; elles entraînent, d’après le modèle utilisé par l’IFV, un stress du parasite qui génère des sursauts épidémiques d’autant plus intenses lorsque les conditions redeviennent favorables au mildiou », explique l’ingénieur. La meilleure façon de prévenir ces situations reste alors de s’appuyer sur la modélisation, seule à même d’analyser ces variations et d’anticiper le développement de la maladie.

Pour Joël Ortiz, conseiller viticole à la chambre d’agriculture de la Gironde, une partie de la réponse se trouve aussi dans l’utilisation des produits phytosanitaires et dans leur fonctionnement. Car certains ont une rémanence sur feuille plus longue que celle sur grappe. « C’est le cas notamment des phosphonates, précise-t-il. Le feuillage est bien protégé pendant 14 jours, mais au bout de 12 jours les fruits sont à découvert. Donc si on renouvelle systématiquement le quatorzième jour et que les symptômes apparaissent, ils arrivent tout de suite sur grappe. » Il préconise donc d’être suivi par des techniciens, qui connaissent bien les nouvelles molécules, et de renforcer l’analyse du risque, en fonction de la phénologie (stades de sensibilité), de la présence d’inoculum, et de la météo (température et humidité). Pour les experts, la solution se trouve donc dans la technicité, et pas forcément dans le renforcement des programmes phytosanitaires.

voir plus loin

Un scénario typique du bassin méditerranéen

Le mildiou qui s’installe directement sur grappe est un schéma assez classique dans le Sud-Est, selon Jacques Rousseau, de l’ICV. « On peut peut-être y voir un signe que le climat bordelais se rapproche du climat méditerranéen », observe-t-il. Pour lui, il faut faire attention lors de la floraison quand les températures sont plus élevées, car la pousse de la grappe se déroule plus vite, les nouveaux tissus sont plus sensibles et la migration des produits systémiques n’est pas toujours assez rapide. « Depuis plusieurs années on observe que la fenêtre pour le relevage se raccourcit, ce qui prouve que la pousse s’accélère. Cela a forcément un impact en termes de protection », analyse-t-il. Le technicien conseille également de s’appuyer sur les modèles de développement de la maladie. De son côté, il observe que les vignobles du Sud-Est sont sujets à l’oïdium de plus en plus tôt et de façon plus virulente.

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