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Levée de boucliers pour défendre le contrat vendange

Annoncé le premier octobre, le projet de loi de finances de la sécurité sociale prévoit de mettre fin à l'exonération des charges salariales. Les représentants syndicaux y sont opposés.

© Infographie Réussir

Comme l'avait annoncé Les Echos en septembre, le contrat vendange risque de perdre son atout principal : le gouvernement veut supprimer l'exonération de charges salariales de 7,8 % dont bénéficiait ce type de contrat depuis 2002. Et n'en déplaise à Stéphane Le Foll, ministre de l'Agriculture, qui estime que le contrat vendange continue, la fin de l'exonération est synonyme de perte nette pour le salarié. " Le ministre a un degré d'humour qui est un peu particulier ", commente Jérôme Despey, vice-président de la FNSEA. " C'est tout de même vingt millions d'euros, (NDLR : montant de l'exonération de la charge salariale estimée par Les Echos) qui ne seront plus versés aux salariés. Tout l'intérêt du dispositif était de pouvoir verser une rémunération attractive à des étudiants, des fonctionnaires, des salariés en congés payés. Il faut avoir le courage politique d'affirmer que, si la proposition de loi passe, le contrat vendange : c'est terminé ! "
Pour Bercy, " le contrat vendange n'est pas parvenu à rendre les emplois plus attractifs ", avance l'exposé des motifs de la loi. C'est faux, répondent en choeur les organisations professionnelles. Selon un amendement au texte, rédigé par la Cnaoc, " ce dispositif est parfaitement parvenu à rendre ces emplois plus attractifs en augmentant le salaire net de près de 8 % (1). Cela est d'autant plus vrai qu'il est reconnu que les emplois de vendangeurs sont mieux rémunérés que les autres saisonniers agricoles ". Par ailleurs, la masse salariale brute a augmenté de 50 % en treize ans alors que le nombre de contrats, s'il subit des variations, est sensiblement le même en 2000 et 2013.

Inquiétude face à la perte d'attractivité


La suppression de l'exonération fait peser un sérieux doute sur l'attractivité du contrat vendange l'année prochaine. 550 000 contrats ont été signés en 2013 : ce chiffre va-t-il baisser en 2015 ? Comment annoncer à ses salariés qu'ils seront moins payés ? Séverin Barioz, directeur de la Confédération des appellations et des vignerons de Bourgogne a fait les comptes : " Pour 48 heures de travail sur six jours, sans prise en charge des repas, un coupeur perçoit un salaire net de 468,11 euros. L'année prochaine, il touchera 42,93 euros de moins. " La situation va être délicate, surtout quand les employeurs ont affaire à une main-d'oeuvre d'habitués. Faudra-t-il maintenir les salaires ? L'amendement de la Cnaoc l'envisage.
Pour ce faire, " les vignerons devront augmenter la rémunération brute. Ce qui évidemment fera augmenter le coût du travail ", indique le document. Or, la seule parade à l'augmentation du coût du travail est le recours à la machine à vendanger, dont la conséquence sur l'emploi est négative.
Quant à Jérôme Despey, c'est surtout l'aspect disponibilité de la main-d'oeuvre qui l'inquiète. " La date des vendanges n'est jamais la même. Or, le contrat vendange permettait d'employer une main-d'oeuvre locale qui peut s'adapter à ce genre de contraintes. "
En Champagne, Christophe Pernet, président du Groupement des employeurs au sein du SGV (2) pointe du doigt un autre effet pervers : le risque d'accentuer le recours à la main-d'oeuvre étrangère. " Depuis quelques années, nous constatons en Champagne une progression de la main-d'oeuvre issue d'Europe de l'Est et du Sud. La fin de l'exonération de la charge salariale ne modifiera pas l'attractivité du contrat pour cette main-d'oeuvre, alors qu'elle aura un vrai impact sur les ressortissants français. " Certains s'inquiètent, par ailleurs, d'une possible recrudescence du travail clandestin. Si dans toutes les régions viticoles, le travail au noir est estimé à un niveau très faible, la fin de l'exonération pourrait tenter certains, d'autant qu'elle fait suite à la coupe franche opérée, cette année, sur les exonérations des charges patronales sur la main d'oeuvre saisonnière.

CICE ne fait pas recette


La mesure, indique Bercy, doit être mise " en regard du crédit d'impôt pour la compétitivité et pour l'emploi (CICE) dont bénéficient les entreprises ". " Le CICE et une exonération de charges salariales : ce n'est pas la même chose. Le premier bénéficie à l'employeur quand le second bonifie un salaire ", tempête Alexandre Imbert, directeur de la Fédération des AOC du Sud-Est. Par ailleurs, il semble que la viticulture n'ait pas massivement souscrit à cet allègement de l'assiette fiscale. Trop compliqué, nombre importants d'entreprises au forfait (ce qui exclut de pouvoir souscrire au CICE) sont les raisons invoquées pour cette faible implication. " Nous sommes un tissus de TPE ", martèle la Fédération viticole d'Anjou-Saumur. En Champagne, Christophe Pernet fait les comptes : " entre les modifications d'exonération de cotisations patronales sur les emplois saisonniers qui ont coûté 20 millions d'euros, cette année, en Champagne, et la fin du contrat vendange, c'est au moins 40 millions d'euros que la viticulture donne en plus à l'Etat ".
Le texte portant sur la suppression du contrat vendange devait être présenté à l'Assemblée nationale fin octobre, début décembre. Les organisations professionnelles s'activaient pour le faire supprimer. Et Jérôme Despey d'espérer : " une forte mobilisation des parlementaires ".

(1) NDLR : En fait, 7,8 %
(2) Syndicat général des vignerons de la Champagne

La suppression de l'exonération fait peser un sérieux doute sur l'attractivité du contrat
vendange l'année prochaine. 550 000 contrats ont été signés en 2013 : ce chiffre va-t-il baisser en 2015 ?

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