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L’Afrique, la nouvelle Chine ?

Vinexpo organisait cette année une conférence sur le marché du vin en Afrique. Géographiquement proche mais éloigné des marchés historiques, le continent africain intéresse de plus en plus les acteurs du monde viti-vinicole. À juste titre ?

La consommation de vin en Afrique, encore faible actuellement, est en croissance.
La consommation de vin en Afrique, encore faible actuellement, est en croissance.
© J.-C. Gutner

L’Afrique du vin ne peut plus se résumer à quelques pays producteurs, Afrique du Sud en tête. Le continent propose un marché en croissance (+ 3 %) bien que disparate selon les pays, leur histoire et leur contexte géopolitique. L’analyste Daniel Mettyear, de l’IWSR, explique : « si l’on met à part l’Afrique du Sud dont le marché, mûr, ressemble à celui de l’Europe, l’Afrique subsaharienne concentre plus de 85 % de la consommation de vins en Afrique. Sur la côte Ouest, des pays comme la Côte d’Ivoire et surtout le Nigeria, première économie d’Afrique, portent le marché. La côte Est est également très prometteuse notamment à travers les marchés éthiopiens et kényans. Pour tous ces pays, on enregistre des prévisions de croissance à un an de 4,5 à 5 % ! ».

Les volumes importés, notamment de vins français, sont toutefois modestes. La Côte d’Ivoire, premier pourvoyeur de vins hexagonaux, a importé 36 540 hectolitres en 2014, le Cameroun 33 140 hectolitres et le Gabon 23 340 hectolitres. C’est donc bel et bien vers l’évolution de ces volumes qu’il faut se pencher, pour entrevoir un avenir radieux pour nos vins. Les cinq premiers importateurs de vins français, à savoir la Côte d’Ivoire, le Cameroun, le Gabon, le Congo et le Nigeria, ont tous vu leurs volumes d’importation de vins français croître sur les dix dernières années.

En effet, ces pays jouissent d’une certaine stabilité politique, de bonnes ressources, d’une démographie galopante, et voient l’émergence d’une classe moyenne consommatrice de vin. Pierre Castel, président du groupe éponyme, ajoute : « les Africains sont de plus en plus connaisseurs. Ces classes moyennes de Côte d’Ivoire, du Cameroun ou encore du Nigeria sont très exigeantes sur la qualité des vins qu’ils veulent acheter ».

De fait, si la Côte d’Ivoire importe environ la même quantité de vins tranquilles d’IGP et d’AOP (autour de 14 000 hectolitres chacun), en valeur, les importations d’AOP sont plus de deux fois supérieures à celle des IGP. Le prix moyen par bouteille, toutes couleurs confondues, reste toutefois modeste, avec 3 euros en AOP et 1,3 euro en IGP. Dans les deux catégories, les vins blancs sont largement minoritaires (environ de 4 % du volume total). Au Cameroun en revanche, le volume d’AOP est plus de quatre fois supérieur à celui des IGP, rouges et rosés en tête, avec des prix moyens par bouteille comparables à ceux de la Côte d’Ivoire. Quant au Nigéria, ce sont surtout les vins effervescents qui portent le marché, le champagne dominant sans partage les importations françaises, notamment en valeur : 23,7 millions d’euros pour les seuls champagnes, contre 4,71 milliards d’euros pour l’ensemble des vins tranquilles ! Soit un prix moyen d’environ 31 euros par bouteille de champagne, contre 5,4 par bouteille de vin tranquille (couleur et origine confondues).

 

Peu d’infrastructures portuaires ou de stockage adéquates

Pour proposer cette gamme éclectique de vins aux amateurs, l’organisation du marché est basée sur des circuits de distribution courts, où un importateur possède son réseau de distribution. Cependant, selon Daniel Mettyear, « il est difficile de trouver des partenaires fiables. Il faut établir des circuits de distribution solides pour établir sa marque, et les approvisionner de manière régulière ». Les grands groupes comme Castel ne s’embarrassent pas d’intermédiaires et implantent directement sur place des locaux adaptés (sécurité, climatisation, etc.), qui fournissent directement détaillants et grossistes. « Les infrastructures adéquates manquent, et la conservation du vin en pâtit. Il y a également un phénomène de congestion portuaire, comme au Cameroun, où les bouteilles peuvent être bloquées de nombreuses semaines dans des conteneurs non frigorifiés », précise Pierre Castel. Pour les entreprises plus modestes, Daniel Mettyear conseille d’avoir « au moins un représentant de sa marque sur place ».

Les marges de distribution varient selon les pays, et représentent une somme non négligeable à répercuter sur le prix de vente. En Côte d’Ivoire par exemple, la marge est d’environ 25 %… avant négociation.

Il faudra également faire face au marché « gris », ou « informel ». Des ventes plus ou moins au grand jour, mais en dehors de toutes taxes et contrôles. Il va sans dire que de telles pratiques sont illégales, mais dans des pays où l’organisation d’un contrôle systématique relève parfois de l’utopie, la présence d’un représentant de sa marque devient un atout indispensable.

Des exportations qui ont triplé en dix ans

En dix ans, si les volumes de vins français exportés vers certains pays du continent ont plus que triplé (entre 2004 et 2014 : Côte d’Ivoire, + 308 % ; Congo, + 571 %), les chiffres restent tout de même faibles, et représentent moins de 1,5 % de nos exportations. La marge de manœuvre est donc large pour les viticulteurs tricolores. Avec une consommation moyenne par habitant très faible, des volumes importés bas, et une croissance en expansion, les pays consommateurs de vin en Afrique forment un marché encore loin de la maturité et donc une opportunité à saisir.

L’Afrique du Sud : un cas à part

L’Afrique du Sud est depuis toujours un cas à part sur le continent africain. Le marché du vin y est bien développé, bien structuré, et bien contrôlé. Les Sud-Africains consomment à 85 % la production locale ; les importations faisant la part belle à l’Espagne.

Les consommateurs, à l’instar des autres pays industrialisés, se détournent de plus en plus des critiques classiques, et se réfèrent aux réseaux sociaux, nouveaux prescripteurs de tendance. Ainsi, on observe une croissance de vente de vins internationaux, dans une diversité de styles et de prix tout à fait remarquable.

Les cépages rouges du Bordelais, merlot en tête, sont très prisés, pour une gamme de prix allant de 4 à… 80 euros. Le chardonnay, quant à lui, règne sur les vins blancs tranquilles. Les rosés doux (+ 8 % en 2014) sont en pleine croissance car l’attrait pour les vins « sucrés » est de plus en plus fort. Il en va de même pour les « sparkling wines » (vins effervescents), notamment les prosecco demi-secs qui semblent être l’autre nouvelle tendance.

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