Australie
A chaque style de chardonnay sa levure
Une étude réalisée par l’AWRI montre que selon la souche de levure utilisée, des profils de chardonnay différents peuvent être obtenus. Ce qui permet ainsi d’adapter le vin à une cible de consommateur donnée
A l'occasion du Lallemand Tour 2010, Chris Curtin, chercheur de l'AWRI* a présenté quelques résultats d'une vaste étude menée par le centre de recherche australien sur les chardonnays. Dans un contexte de « guerre des cépages » où les sauvignon blanc néo-zélandais supplantent les traditionnels chardonnay australiens, l'AWRI a lancé plusieurs expérimentations afin de trouver des solutions pour ramener les consommateurs vers le chardonnay. Des essais ont notamment consisté à produire des vins de chardonnays différents avec la levure comme unique variable. « Un même moût de chardonnay de la Margaret River a été ensemencé avec des levures différentes : des levures non Saccharomyces qui simulent une fermentation spontanée (LFS), des levures typiques du chardonnay (LTC), des levures neutres (LN), des levures qui favorisent les notes variétales (LV) et des levures aromatiques (LA) », explique Chris Curtin. Les premiers résultats ont notamment montré que chaque typologie de levure donne des chardonnay différents. En terme aromatique, certaines comme les LFS et les LTC ont privilégié la formation de thiols volatils comme le 3MH** donnant des chardonnays aux arômes plutôt fruités. D'autres, comme les LA ont favorisé la production de l'acétate de 3MH*** qui confère des notes plus fraîches voire plus végétales. Il en résulte des profils de chardonnay différents en terme aromatique.
Cibler le consommateur
« En faisant déguster ces différents vins à un panel de consommateurs australiens amateurs de vins blancs, on s'est aperçu qu'aucune catégorie était préférée par la majorité mais qu'il se dégage plutôt trois types de consommateurs », constate Chris Curtin. Le premier segment, dont le profil type de consommateur correspond à un homme d'une cinquantaine d'années avec une expérience du vin significative, préfère les vins fruités sur des notes exotiques et rejette les notes florales. Les levures LFS semblent favoriser ce style de vin. Le deuxième segment (profil type : femme plutôt jeune) se caractérise par le rejet des vins avec des notes de buis et de pipi de chat et préfère des vins avec des arômes de confiserie, bonbon. Pour ces derniers, les levures qui ont favorisé ce style de vin sont les levures dites aromatiques ou plutôt fortes productrices d'esters. Enfin, le troisième groupe préfère des notes buis, pipi de chat dans les vins et rejette les arômes type bonbon, confiseries, amyliques. « Ainsi, l'utilisation de la souche de levure peut contribuer à styler les chardonnay pour une cible précise », indique Chris Curtin. Seul hic soulevé par cette étude : quand un vin était apprécié du consommateur australien il l'associait systématiquement à un sauvignon blanc.
*Australian research institute
** 3-mercaptohexanol (pamplemousse, agrumes)
*** 3-mercaptohexyl acétate (buis, fruits exotiques)