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Brésil, une classe moyenne à initier au vin

La très faible consommation de vin par individu au Brésil fonde les espoirs des importateurs et distributeurs. La forte concurrence chilienne laisse place à des vins diversifiés, auprès d’une population curieuse à éduquer à la culture du vin.

Avec 200 millions d’habitants ne consommant que deux litres de vin par an et par personne, en moyenne, et une production locale circonscrite à la pointe sud de son immense territoire, le Brésil est un marché d’exportation au potentiel de croissance énorme. Les récents aléas de son économie et les dérives de son système politique, qui font les gros titres de la presse généraliste, ne semblent pas avoir affecté le rythme de ses importations de vins. Selon le ministère de l’Agriculture du Brésil, elles représentent déjà 80 % du marché des vins de qualité commercialisés dans le pays. Le tiers des livraisons entrent au pays via le port de Santos, proche de Sao Paulo.

Le Brésil, c’est surtout, pour ceux qui font des affaires, une classe moyenne qui a véritablement grossi au cours des vingt ou trente dernières années. Elle représenterait actuellement 53 % de la population totale du pays, soit 104 millions de personnes, contre 27 % en 2002, selon le gouvernement. Or, celle-ci est amatrice de bière et de cachaça, l’alcool de canne à sucre… Pas facile pour le vin, faute de tradition, de s’y faire une place. Plusieurs sources consultées remarquent que le rouge en particulier suscite l’intérêt des amateurs. Des groupements de vignerons et de commerçants ont ainsi créé des clubs de vin et proposé des livraisons à domicile sur abonnement. Toujours pour fomenter la culture du vin, certains distributeurs ont même engagé des sommeliers formés en Europe.

Certes, le Brésil compte aussi une importante classe sociale élevée. Le champagne coule à flots dans certains palais de l’Amazonie et du Nordeste depuis l’époque coloniale.

De jeunes villes en pleine expansion

Aujourd’hui, la partie se joue plutôt à Sao Paulo, Rio de Janeiro et les grandes villes du Sud comme Porto Alegre et Curitiba. « Brasilia aussi est intéressante », remarque Geoffroy de la Croix, un importateur de vins français expérimenté (voir témoignage). Pour compléter le tableau, et c’est peut-être là que les besoins et les marges envisageables sont les plus conséquents, les toutes jeunes villes du Mato Grosso et du centre-ouest en général, qui ont poussé comme des champignons avec le boum du soja-maïs et celui du porc-poulet, encore en cours. Le flux d’agro-dollars qu’il génère favorise l’éclosion de commerces, et les élevages et abattoirs construits de fraîche date embauchent une main-d’œuvre abondante venue du Nordeste, désireuse d’accéder à la classe moyenne.

Selon le ministère brésilien du Développement industriel, le pays aurait importé en 2014 pour près de 350 millions d’euros de bouteilles provenant essentiellement de six pays : le Chili, l’Argentine, la France, le Portugal, l’Italie et l’Espagne. Cette valeur a décuplé en quinze ans. Moins onéreuse que l’argentine, l’origine chilienne en accapare environ le tiers. De grandes caves chiliennes telles que Santa Helena, Santa Carolina et Concha y Toro occupent le bas des rayons vin des hypers et supermarchés du Brésil depuis les années 1980. « Les vins des Andes, c’est un peu toujours la même chose, glisse une source. De jeunes rouges qui arrachent côté argentin et des sauvignons ou chardonnays plaisants côté chilien. » Les vins français doivent jouer la carte de leur diversité. L’intérêt naissant des Brésiliens pour le vin passe par la formation professionnelle et l’événementiel, ajoute-t-elle en citant le salon Expovinis de Sao Paulo comme l’un des grands rendez-vous du secteur, qui a lieu cette année du 15 au 17 juin.

Une croissance en valeur des exportations françaises

Les vins français ont relativement bien accompagné la croissance brésilienne de l’ère du président Lula da Silva. Leur valeur approximative à la douane étant passée de 17 à 46 millions d’euros par an (M€/an) de 2003 à 2013, de source officielle (voir graphique). Il s’agit essentiellement de rouges de Bourgogne et du Bordelais. Les deux tiers des pétillants importés par le Brésil seraient ainsi d’origine française, un segment de marché de quelque 30 M€/an.

Malgré la récession économique qui frappe le pays depuis des mois et la hausse récente des taxes d’importation, la demande brésilienne de vins d’origine étrangère demeure soutenue. Ces taxes s’élevaient l’an dernier à 82,25 % de la valeur des vins provenant hors du Mercosur, tandis que les opérateurs chiliens et argentins paient 27 %, selon l’avocat Carlos André. Ils ont aussi l’avantage de la proximité et donc des frais de transport moindres.

Les importateurs reçoivent généralement le gros des livraisons quelques mois avant l’hiver austral, période de hausse de la consommation. L’autorisation d’importer du vin est obtenue après une analyse chimique de la boisson par le ministère de l’Agriculture du Brésil, qui exige pour ce faire deux bouteilles témoins, d’un volume total d’au moins un litre.

TÉMOIGNAGE

« Une tranche de valeur de 15 à 80 euros la bouteille de vin de qualité »

« Nous sommes spécialisés dans le secteur boutique, et commercialisons des vins de terroir, bio ou biodynamiques, de grande qualité et compétitifs avec les vins du Mercosur. Au début des années 2000, le prix minimum d’une bouteille de tels vins était de 39 réaux (soit 20 €). Aujourd’hui, il est de 58 réaux (soit 15 €). Le prix maximum est de 300 ou 400 réaux, soit 80-100 €, car à ce niveau de prix, il devient difficile de séduire des consommateurs cosmopolites qui préfèrent acheter de grands vins lors de leurs déplacements à l’étranger.

Les dévaluations monétaires et l’inflation restent courantes au Brésil et sont autant d’embûches à l’importation. Récemment, la valeur du réal s’est effondrée et il y a eu de nombreux changements législatifs et fiscaux défavorables à l’import de vin. À l’époque de la présidence de Lula da Silva, c’était fantastique, alors que l’équipe économique de Dilma Roussef a plutôt refermé les frontières.

Il y a, au Brésil, une véritable curiosité pour le vin. Cela a commencé par le blond doux Liebfraumilch, qui a été un phénomène social dans les années 1990. Souvent, les Brésiliens goûtent d’abord aux vins chiliens et argentins, mais s’en lassent vite. Ils recherchent alors des vins différents, plus fins. Il faut offrir un vin qui a une vraie histoire. Sao Paulo est la ville qui propose la plus grande diversité de vins au monde dans ses boutiques. »

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