Vinification : « Les remontages automatisés permettent de gagner en finesse et en main-d’œuvre »
Le Château de Saint Pey, en Gironde, s’est équipé de pompes automatiques pour des questions de main-d’œuvre. Cet investissement a permis de gagner en finesse d’extraction lors des remontages.
Le Château de Saint Pey, en Gironde, s’est équipé de pompes automatiques pour des questions de main-d’œuvre. Cet investissement a permis de gagner en finesse d’extraction lors des remontages.

« L’investissement a été amorti en cinq ans si on compare avec ce qu’aurait coûté de la main-d’œuvre », se réjouit Anthony Appollot, directeur général délégué de Sarments Vignobles, en Gironde. Par investissement, il entend des pompes à lobes de chez Cazaux, dotées d’un réducteur spécifique adapté à la forme de ses cuves béton rectangulaires et équipées d’une application Smartphone permettant d’automatiser leur gestion. « Ce que je trouvais sur le marché était en partie prédéterminé, indique-t-il. Or je souhaitais pouvoir tout gérer finement. » Au final, AP3M lui a développé une application permettant de choisir le temps de remontage souhaité en secondes, la fréquence de remontage en secondes, de passer la pompe en marche forcée ou encore de la verrouiller à distance.

Après avoir minutieusement choisi ses pompes, Anthony Appollot s’est penché sur les cycles les plus intéressants. « Nous avons réalisé des tests en 2023, avec six modalités », se remémore-t-il. Trois cuves « témoins » ont été gérées avec des remontages classiques effectués par des opérateurs, chacune contenant un cépage : merlot, cabernet sauvignon et cabernet franc. Trois autres cuves ont constitué la série « tests », avec également une cuve par cépage. Dans le programme classique, les remontages ont duré environ 45 minutes par cuve, et ont été effectués deux fois par jour, entre 7 heures et 20 heures. « La cuve restait donc au moins 5 ou 6 heures sans remontage, voire plus la nuit », note le directeur.
Davantage d’inertie avec les opérateurs
À l’inverse, la modalité automatique a été mouillée moins longtemps mais plus fréquemment. « On pouvait par exemple débuter en douceur, en arrosant le chapeau deux minutes toutes les 20 minutes, illustre Anthony Appollot. Si à la dégustation, on se rendait compte que ce n’était pas assez, on pouvait passer sur 3 minutes toutes les 20 minutes pour le cycle suivant. » Car c’est l’un des atouts de l’automatisation : le cycle d’extraction peut être ajusté dans les minutes suivant la dégustation. En revanche, dans la modalité « opérateurs », il y a davantage d’inertie. La moindre modification ne peut être prise en compte que 24 heures plus tard au mieux.
Des tanins plus ronds, moins verts
Au final, Anthony Appollot a constaté un net gain qualitatif sur la modalité automatisée. « Au départ, nous nous sommes équipés de ces automatismes afin de pouvoir doubler la capacité de vinification du chai, sans avoir à embaucher de personnel en plus, plante-t-il. Mais avec les essais, nous nous sommes aperçus que ce système permettait en outre de gagner en finesse. Plus le marc est humidifié régulièrement, plus cela permet au potentiel aromatique de se libérer. Les tanins sont plus ronds, moins verts, même sur cabernet sauvignon. » Pour lui, rien ne sert d’arroser le chapeau 10 minutes toutes les heures, mieux vaut le mouiller trois minutes toutes les 20 minutes.
Autre atout de ce système : l’impact sur les cinétiques fermentaires. « En 2024, nous avions une cuve avec de la vendange un peu altérée, sur laquelle nous voulions que la FA dure au plus cinq jours. En augmentant le temps d’extraction et en diminuant la fréquence de mouillage du marc, nous avons réussi à avoir une FA de trois jours et demi », rapporte-t-il.
Enfin, cette automatisation lui a permis de décrocher un marché kasher, un gain non négligeable en cette période de crise. « Les clients ont une application avec leurs codes et ils lancent leurs remontages à distance, lorsqu’ils le souhaitent, sans avoir besoin de se déplacer, témoigne-t-il. Cela évite les déviations. » Sans cela, les vinifications tombant à une période religieuse, il peut s'écouler plusieurs jours avant qu'un opérateur ne se rende sur place, avec les problèmes que cela implique.
repères
Château de Saint Pey, à Saint-Pey-d’Armens
Surface 26 ha plantés
Dénomination AOC saint-émilion grand cru
Encépagement 85 % merlot, 10 % cabernet franc et 5 % cabernet sauvignon
Nombre de salariés 3 temps plein
Volume produit par an environ 1 000 à 1 200 hl
Circuits de commercialisation 60 % place de Bordeaux et CHR, 40 % particuliers