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Un climat plus favorable à la cicadelle verte de la vigne

En 2021, une forte pression de cicadelle verte, aussi appelée cicadelle des grillures, a été constatée sur de nombreux vignobles, notamment à l’ouest. En cas de forte infestation, une intervention spécifique peut s’avérer nécessaire.

Les dégâts de cicadelle des grillures se voient rapidement.
Les dégâts de cicadelle des grillures se voient rapidement.
© P. Dubois

En 2021, des attaques importantes de cicadelle des grillures (Empoasca vitis) ont été constatées sur de nombreux vignobles, notamment en Val de Loire et sur la façade atlantique. « La tendance était plutôt à la baisse des attaques, note Guillaume Delanoue, de l’IFV Val de Loire. Mais en 2021, il y a eu une forte pression et beaucoup de grillures sur tout le bassin, en particulier sur le côt. Dans nos essais, toutes les feuilles avaient au moins une ou deux larves. »

Une pression inhabituelle du ravageur a aussi été observée en Maine-et-Loire. « Et ce qui est notable, c’est qu’il y a eu des symptômes sur cabernet franc, assez sensible au ravageur, mais aussi sur chenin, normalement peu sensible », précise Perrine Dubois, de l’ATV 49. De fortes attaques ont également été observées en Charentes et dans le Bordelais. « Il y a eu des attaques sur tout le cognaçais, même sur ugni blanc, en général épargné par Empoasca vitis », indique Magdalena Girard, animatrice BSV du vignoble de Cognac. Principale explication : le climat de 2021. « Ces dernières années, les coups de chaleur brûlaient les œufs de cicadelle, analyse Guillaume Delanoue. En 2021, le climat humide et moins chaud y a été plus favorable et les générations se sont multipliées rapidement»

L’absence de longues périodes de froid les derniers hivers pourrait aussi avoir favorisé le maintien des populations. Enfin une moindre utilisation d’insecticides, en l’absence notamment de tordeuses en 2021, ou un positionnement des traitements cicadelles axé sur l’agent de la flavescence dorée, mais mal positionné cette année par rapport à Empoasca vitis, ont pu aussi faciliter le développement des cicadelles des grillures.

Importance des comptages sur 10-15 jours

L’impact sur la vigne reste difficile à évaluer, l’année ayant par ailleurs été marquée par le gel et le mildiou. « Empoasca vitis est un ravageur secondaire de la vigne, souligne François-Michel Bernard, de l’IFV Bourgogne. Globalement, même si les grillures sont visibles sur le feuillage et que les populations paraissent parfois importantes, les dégâts fortement impactants liés à la cicadelle des grillures demeurent rares et souvent très localisés. Il arrive toutefois qu’une parcelle ou une partie de parcelle puisse être massivement infestée, avec la possibilité d’un impact sur la maturité du raisin»

 

 
En observant la face inférieur des feuilles à la base des rameaux, on peut voir les adultes, les larves et les mues des larves.
En observant la face inférieur des feuilles à la base des rameaux, on peut voir les adultes, les larves et les mues des larves. © P. Dubois

La prophylaxie s’avère compliquée. Équilibrer la vigueur de la vigne, aérer le feuillage et favoriser les auxiliaires (chrysopes, punaises, araignées…) diminue les risques d’attaques. Une lutte biologique est également possible avec Anagrus atomus, microhyménoptère qui pond dans les œufs de cicadelle. « Nous avons fait des lâchers d’Anagrus atomus dans nos essais en 2014, indique Guillaume Delanoue. Leurs populations augmentent, mais sont restées insuffisantes en 2021. » Si nécessaire, plusieurs spécialités sont homologuées contre Empoasca vitis, avec un seuil en été historiquement fixé à 50 larves par feuille, mais plutôt revu à la hausse aujourd’hui. « Un traitement ne se justifie qu’en cas de forte pullulation locale, et seulement sur la base de suivis de populations, insiste François-Michel Bernard. Le plus important est de vérifier préalablement l’évolution des populations en réalisant plusieurs comptages sur 10-15 jours. Et lorsqu’un traitement s’avère nécessaire, son positionnement doit alors être raisonné en fonction du cycle biologique d’Empoasca vitis. »

 

Créer une barrière physique avec de la kaolinite calcinée

Une autre piste est l’application de kaolinite calcinée. « Les feuilles blanchies attirent moins les adultes, explique Perrine Dubois. Et la kaolinite se colle à l’insecte, gênant la ponte et les larves. Nous préconisons son application au début du deuxième vol, en repérant le vol avec des pièges jaunes englués. La technique est de plus en plus utilisée sur les parcelles à historique de cicadelle des grillures, notamment en bio. » L’argile peut être apportée en mélange avec la protection mildiou ou oïdium, à raison de 15-20 kg/ha, puis de 10 kg/ha en cas de lessivage.

En Charente-Maritime, la chambre d’agriculture a testé la kaolinite en 2021. « Le résultat n’a pas été parfait, car un troisième traitement aurait été nécessaire, précise Magdalena Girard. Et l’application est délicate et peut abîmer les pompes. Malgré tout, la partie traitée à la kaolinite a été moins touchée que celle non traitée. La technique commence à se développer. » Du lait de chaux, qui agit comme la kaolinite mais est moins abrasif, peut aussi être appliqué en préventif, à la dose de 5 %. « Et dans nos essais, l’argile ou le lait de chaux n’ont pas diminué la maturité », souligne Perrine Dubois.

Autre alternative : les produits à base d’huile essentielle d’orange douce, homologués contre les cicadelles. Le mode d’action attendu est une dégradation de la cuticule des insectes, un dessèchement du corps et des ailes et le blocage des voies respiratoires. Enfin, une autre piste, assez aléatoire, est le purin de fougère, insectifuge, à appliquer à partir du début du deuxième vol puis tous les 8-10 jours. « Même si la cicadelle des grillures reste un ravageur secondaire, il pourrait être utile d’accompagner davantage les vignerons sur ce bioagresseur, de repréciser les cycles, les seuils de traitement et les produits autorisés, en insistant sur la nécessité de comptages », note Éric Chantelot, de l’IFV Rhône-Méditerranée.

Un ravageur lié au climat

 

 
Même si la cicadelle des grillures est très liée au climat, une plus grande vigilance en milieu de saison pourrait être nécessaire, notamment sur les cépages sensibles.
Même si la cicadelle des grillures est très liée au climat, une plus grande vigilance en milieu de saison pourrait être nécessaire, notamment sur les cépages sensibles. © M. Girard

Empoasca vitis est un insecte piqueur-suceur. Les adultes, verts ou roses, de 3 mm, hivernent dans diverses espèces arbustives (conifères, ronces, troène, lierre…). Au printemps, les femelles migrent sur la vigne et pondent sur les feuilles à la base des rameaux. Les larves, blanches au début puis vertes ou roses, se développent sous la feuille en changeant de mues. Leur forme de bâtonnet et leur déplacement « en crabe » sont caractéristiques. La durée du cycle est 55-60 jours, avec 2-3 générations de mai à septembre.

 

Un insecte qui n’aime ni le vent ni la chaleur

Les températures optimales sont de 15 °C la nuit et 25 °C le jour. Les œufs ne résistent pas à plus de 32 °C. La cicadelle des grillures préfère aussi les zones abritées humides et évite les lieux ventés et le soleil direct. Les larves se nourrissent de la sève en piquant les nervures de la face inférieure des feuilles. Les symptômes apparaissent sous forme de rougissements (cépages rouges) ou jaunissements (cépages blancs) de formes géométriques. Puis la périphérie se dessèche, donnant à la feuille un aspect grillé. Les feuilles grillées ayant moins d’activité photosynthétique, une baisse du taux de sucre et un retard de maturité peuvent être observés. La sensibilité dépend du cépage, le côt y étant très sensible, et à un moindre degré le grolleau, le pinot, le cabernet franc et le cabernet sauvignon.

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