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Pour assurer sa biosécurité, le porc Kintoa a trouvé une arme anti-sanglier

Les éleveurs de porcs Kintoa en plein air veulent renforcer la biosécurité de leurs parcours. Certains d’entre eux ont opté pour la stérilisation immunologique des cochettes par voie vaccinale une solution efficace contre les intrusions de sangliers.

Au Pays basque, 38 producteurs de porcs Kintoa élevés en plein air ont choisi la vaccination Improvac des femelles pour réduire les intrusions de sangliers dans leurs parcs. 

Cette vaccination supprime en effet la fonction ovarienne des cochettes pubères. « Les venues en chaleur représentaient au moins 80 % des causes d’intrusion de sangliers mâles dans nos parcs », estime Pierre Oteiza, éleveur de porcs Kintoa dans la vallée des Aldudes (Pyrénées Atlantiques) et principal artisan du renouveau de la race Porc basque dans les années quatre-vingt. « Depuis que nous vaccinons les cochettes, nos troupeaux sont mieux protégés de la faune sauvage et leur biosécurité est mieux assurée ». Un soulagement pour ces éleveurs Kintoa du Pays basque et des cantons limitrophes dont les porcs charcutiers doivent être placés sur des parcours en plein air dès cinq mois d’âge, jusqu’à leur abattage, à quinze mois en moyenne. « Le problème de notre production, c’est que beaucoup de parcours sont situés en zone de montagne. Les clôtures qui nous sont imposées par la réglementation biosécurité ne sont pas efficaces sur ce type de terrain ». Pierre Oteiza se souvient amèrement des huit kilomètres et demi de grillage doublé de deux fils électriques posés en 2021 autour de ses parcours sur les terrains pentus et accidentés au-dessus du village des Aldudes. « Cela nous a coûté 90 000 euros, subventionné à 40 %, et un nombre d’heures de travail incalculable. Mais dès l’hiver suivant, des chutes d’arbres et de branches ont réduit notre travail à néant. Par ailleurs, il faudrait plusieurs personnes à temps plein avec des débroussailleuses pour empêcher chaque année l’herbe et les broussailles de toucher les fils électriques, ce qui est économiquement impossible à faire ».

Un modèle de production sanitairement fragile

Pourtant, la biosécurité est une préoccupation majeure pour tous les éleveurs Kintoa. Un cas de maladie d’Aujeszky survenu en février 2024 dans l’un des élevages, provoqué par l’intrusion d’un sanglier mâle porteur du virus et attiré par des cochettes en chaleur, les a fait prendre conscience de la fragilité de leur modèle de production. Tous les animaux de l’élevage ont été abattus et la circulation des animaux autour du foyer a été strictement réglementée pendant plusieurs semaines, selon la réglementation. « Cet événement nous a fait prendre conscience que la stérilisation des cochettes était la solution pour réduire les risques de contamination chez beaucoup d’éleveurs », se souvient Manuel Cela, vétérinaire à la clinique Abiopole qui suit certains élevages de la filière Kintoa. Mais pour lui, pas question de recourir à la stérilisation chirurgicale, faite obligatoirement par un vétérinaire. Cette approche nécessite une anesthésie générale et une ovariectomie, « incompatibles avec le bien-être animal et La réalité du terrain, trop coûteux et compliqué en termes de logistique à mettre en œuvre dans les conditions d’élevages du Kintoa ». Par ailleurs, le risque de mortalité lié à cette opération est réel, « estimé à 10 % des femelles », précise le vétérinaire. Avec un prix de vente pouvant aller jusqu’à cinq euros le kilo, chaque perte de porc charcutier provoque un préjudice financier important !

Quatre à cinq injections par animal

Le choix de la filière se porte donc sur la vaccination Improvac des cochettes. Pour les porcs mâles, la castration sous anesthésie locale et la gestion de la douleur post opératoire n’est pas remise en cause. Dès le mois de mars 2024, 24 éleveurs de porcs Kintoa sont formés par l’équipe technique de Zoetis. Il ne faut pas moins de quatre à cinq injections de l’âge de cinq mois jusqu’au départ des animaux à l’abattoir pour bloquer efficacement la fonction ovarienne des cochettes. Les deux premières injections sont réalisées à quatre semaines d’intervalle. Les suivantes se font toutes les huit semaines. « Nous étions confiants, car en Espagne, 900 000 cochettes ayant accès à des parcours extérieurs sont vaccinées avec des rappels toutes les douze semaines, un intervalle autorisé par l’AMM espagnole », constate Manuel Cela. Au Pays basque français, les résultats sont également au rendez-vous. « Dans tous les élevages qui ont opté pour cette solution, il n’y a quasiment plus d’intrusion de sangliers », constate Manuel Cela. Le vétérinaire insiste aussi lors de ses visites d‘élevage sur la mise en place d’éléments de biosécurité externe, en particulier la protection du site vis-à-vis des visiteurs. Des aires d’alimentation protégées ont été construites pour éviter que les sangliers soient attirés par l’aliment. En parallèle, les sociétés de chasse sont incitées à réguler la population de la faune sauvage. « Tous ces éléments de biosécurité nous permettent enfin de mieux préserver le statut sanitaire de nos élevages, et de garantir ainsi leur pérennité », conclut Pierre Oteiza.

« Entre trois solutions, j’ai choisi l’Improvac »

Arnaud Maintenu, président de la filière Kintoa

« La contamination d’un élevage de porcs Kintoa par un sanglier porteur de la maladie d’Aujeszky a provoqué une prise de conscience du risque sanitaire majeur qui menace la filière tout entière. Pour réduire ce risque, nous avons trois solutions : poser une double clôture, composée de grillages de 1,3 mètre de hauteur, enterrée à 50 cm de profondeur, et complétée par deux fils électriques ; procéder à l’ovariectomie sous anesthésie des femelles, une solution risquée, onéreuse et qui va à l’encontre du bien-être animal ; et enfin, vacciner les femelles pour qu’elles n’expriment pas des chaleurs liées à l’œstrus. Personnellement, j’avais des craintes sur le risque de perception négative de cette vaccination par le grand public. Mais ce n’est pas un traitement hormonal, le bien-être des animaux est préservé et c’est la solution la plus simple à mettre en œuvre. C’est pour ces raisons que je l’ai choisie ».

En chiffres

La filière Kintoa

72 éleveurs de porcs de race basque (naisseurs, naisseurs-engraisseurs et engraisseurs)
3 500 porcs produits par an
1 territoire de production sur 231 communes du Pays basque, du Béarn et des Landes
1 abattoir (Sain Jean Pied de Port)
5 transformateurs artisanaux
2 signes de qualité AOP (jambon et viande fraîche Kintoa)

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