Une communication simple pour expliquer les mécanismes compliqués de l'immunité
Lors du Forum Santé qui s’est tenu à Carhaix en mai 2015, Roselyne Fleury et Alain Riaucourt, vétérinaires Breizpig, ont réussi à expliquer de façon très pédagogique les mécanismes, pourtant complexes, qui régissent l’immunité. D’où une meilleure compréhension du rôle des vaccins et des recommandations pratiques.

1 - Des barrières naturelles avant tout
Le système immunitaire est constitué de trois « étages ». L’immunité commence tout « naturellement » par des barrières que possèdent les animaux. Ces barrières sont à la fois mécaniques : la peau, les mucus… ; chimiques : le pH acide de l’estomac, les acides gras de la peau, les enzymes… ; et microbiologiques, avec un rôle majeur de la flore intestinale. Celle-ci agit à deux niveaux puisqu’elle met en compétition des flores « bénéfiques » et pathogènes, mais aussi parce qu’elle synthétise des substances antibactériennes. Moins souvent évoquée, mais pourtant très importante, la flore de la peau constitue aussi une barrière contre les organismes pathogènes. « Ces différentes barrières qui sont les premiers remparts contre les pathogènes ne fonctionnent que si les organes et la peau conservent une bonne intégrité physique », souligne Roselyne Fleury qui ajoute que toutes les blessures consécutives à des bagarres, des soins, peuvent diminuer ces défenses locales.
2 - L’immunité innée est locale, rapide, mais sans mémoire
L’immunité innée est dans l’immense majorité des cas suffisante pour que l’organisme combatte les pathogènes qu’il rencontre. « Cette défense de base grossière, immédiate, est furieusement efficace », souligne Roselyne Fleury. Cette immunité repose essentiellement sur des cellules qui tuent les pathogènes, les dévorent (les phagocytes) et qui alertent l’immunité adaptative via les cellules dendritiques présentes dans le sang et la peau. Un système complexe de molécules fabriquées par le foie, le complément assure la communication entre ces différentes cellules. Le processus inflammatoire est indissociable de cette immunité. On comprend donc que cette immunité n’est pas spécifique, puisque le système s’attaque à tout « indésirable ». Mais elle est aussi rapide, locale. En revanche, elle est sans mémoire, c’est-à-dire que l’organisme devra remettre en place son « armée » dès qu’il sera à nouveau confronté au germe pathogène.
3 - L’immunité acquise est retardée, spécifique et durable
L’immunité qualifiée d’adaptative ou acquise se différencie de l’immunité innée par un fonctionnement basé sur les lymphocytes. Ces cellules prennent naissance et sont « éduquées » dans les organes lymphoïdes présents dans tout l’organisme : dans la moelle osseuse, la rate, le thymus, les ganglions lymphatiques… Ces lymphocytes se multiplient de manière colossale et sont capables de produire des milliers d’anticorps à la seconde. Une partie d’entre eux est mise en mémoire.
Cette immunité est donc spécifiquement dirigée contre les agents pathogènes rencontrés par l’animal. À la différence de l’immunité naturelle, elle met du temps à se mettre en place, compte tenu de cette cascade d’événements préalables, et en particulier en raison de la mise en place relativement longue des lymphocytes. Enfin, cette immunité reste en mémoire. C’est précisément sur tous ces éléments que repose le principe de la vaccination.
4 - Le mode de vaccination dépend de la cible
Reposant sur cette immunité acquise, tout vaccin possède un antigène, qui est une bactérie vivante ou tuée ou bien une fraction de cette bactérie, un virus vivant ou tué, une toxine… ainsi qu’un adjuvant qui est spécifique à l’antigène et un excipient qui peut être de l’eau ou de l’huile. Alain Riaucourt, vétérinaire, explique clairement que le mode d’administration du vaccin dépendra avant tout de la cible, de l’antigène et de l’adjuvant. Ainsi, un vaccin tué ou inactivé va déclencher une immunité « naturelle » qui va essentiellement faire appel aux cellules impliquées, donc avec peu de mémoire. D’où la nécessité de rappels avec ce type de vaccin. À l’inverse, un vaccin vivant ou atténué déclenche une immunité adaptative ou acquise, plus longue à s’installer, mais, capable d’être « mémorisée », et ne nécessitera généralement pas de rappels.
« Vacciner en dernier recours »
Les vétérinaires intervenant au forum santé Aveltis ont bien souligné les multiples défenses de l’organisme face aux pathogènes. Et concluent que, compte tenu de la capacité qu’ont les animaux à se défendre, la vaccination ne doit être envisagée qu’en dernier recours. Alain Rioucaurt résume en dix commandements les règles d’une bonne vaccination, essentiellement le respect des doses, programmes, préparation et conservation des vaccins… Il rappelle que la biologie doit en particulier dicter le moment précis de la vaccination (et pas la conduite d’élevage) et qu’aucun animal ne doit être oublié, en particulier les verrats souffleurs qui, trop souvent « passent à côté » alors qu’ils sont potentiellement des sources de contamination majeures. Enfin, il juge que pour toute mise en place d’un nouveau vaccin dans l’élevage, la question de son arrêt futur doit toujours être envisagée.