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La Chine, variable d’ajustement des cours européens

Les besoins d’importation de produits porcins de la Chine pour les années à venir sont très difficiles à estimer. Dommage, car le marché chinois est devenu un élément essentiel dans l’évolution des cours européens du porc.

Tout le monde se souvient de l’effet de la progression des importations chinoises en 2016 sur l’évolution positive des cours du porc en Europe. La baisse de ces importations depuis ce printemps est logiquement l’une des explications majeures du retournement de tendance des cotations européennes de ces dernières semaines. Selon les dernières données disponibles, les Chinois ont diminué leurs achats de viande et produits de porc à l’étranger de 50 % cet été par rapport à l’été 2016. Tous les exportateurs mondiaux sont impactés : l’Union européenne (- 56 %), les États-Unis (- 52 %), le Canada (- 52 %) et le Brésil (- 61 %). L’Europe n’a donc pas perdu de parts de marchés au profit d’un autre bassin de production. Selon le département de l’agriculture des États-Unis (USDA), cette évolution est surtout le reflet d’une reprise de la production chinoise.

Les coûts de production les plus élevés du monde

Une reprise difficile à quantifier, tant les experts ont du mal à apprécier le niveau de la production chinoise. Beaucoup d’éléments militent pour une dépendance durable de la Chine vis-à-vis de l’étranger. Selon Yann Morel, le directeur de l’antenne Cooperl en Chine qui intervenait au Space à l’une des matinales de l’Ifip, le coût de production du porc chinois est le plus élevé du monde, avec notamment un prix d’aliment plus cher de 100 euros/tonne par rapport à l’Europe. Ensuite, la production du pays est encore assurée pour moitié par des petits paysans, qui possèdent quelques truies dans leur « basse-cour ». Cette production est difficilement mesurable et elle n’est pas intégrée dans les circuits de distribution classiques. « Tant que la grande industrie ne contrôlera pas l’ensemble du marché intérieur, il faudra s’attendre encore à une forte volatilité des prix », estime Yann Morel. Enfin, les problèmes structurels qui pénalisent la production demeurent. La biosécurité des élevages est mal maîtrisée. La gestion des effluents et des déchets est aléatoire. La disponibilité des terres est insuffisante pour la création de nouveaux élevages. La classe moyenne chinoise, de plus en plus importante, veut des produits de qualité et tracés. Si la production intérieure ne peut pas répondre à cette demande, elle se retournera de plus en plus vers les produits importés, comme c’est le cas également pour les produits laitiers.

Des aides gouvernementales importantes pour relancer la production

Malgré ces handicaps, le gouvernement chinois veut augmenter la production intérieure et n’hésite pas à actionner le levier des subventions. La viande de porc tient une part importante dans le panier de la ménagère chinoise. Une hausse des prix au détail aurait une action directe sur l’inflation sur le pouvoir d’achat de la population. « Le prix du porc est une référence pour le maintien de la paix sociale », affirmait Stéphane Gouault, lors d’une conférence organisée au Space par Abcis, une société de services crée par l’Ifip qui intervient en Chine. Fort de ce soutien gouvernemental, les grands groupes industriels chinois comptent augmenter fortement leurs capacités de production. Le leader du secteur, Wens Group, veut passer de 17,5 millions de porcs produits en 2016 à 50 millions en 2025. Le plus ambitieux, Mu Yuan Foodstuff, ambitionne d’atteindre 60 millions de porcs en 2020, contre 4 millions en 2016 ! Des porcheries à étage de plusieurs milliers de truies se construisent pour remédier au manque de disponibilités foncières (voir Réussir Porc, octobre 2017, page 5). Ces sociétés font appel aux compétences étrangères dans les domaines de la génétique, de l’équipement, et du conseil en élevage.

Cependant, certains experts estiment que l’expansion de ces grands groupes pourrait bien ne pas compenser l’arrêt des nombreuses petites structures qui cesseront leur activité dans les années à venir. D’autres émettent des doutes sur les chiffres officiels de consommation, et ne peuvent qu’émettre des hypothèses sur la base de la croissance économique du pays pour estimer son évolution. Difficile dans ces conditions de savoir si l’Europe pourra retrouver les niveaux d’exportation de 2016. Cette année-là, elle a fourni trois millions de tonnes à la Chine. Un tonnage exceptionnel pour le vieux continent, mais qui ne représente que quinze jours de la consommation chinoise.

La Chine sous la menace de la peste porcine africaine

Selon le Cirad (1), le risque d’émergence de la peste porcine africaine (PPA) en Chine est important. Une étude internationale à laquelle participaient des chercheurs français souligne que le pays accueille un nombre croissant de voyageurs provenant de régions du monde où circule le virus. Or, ce virus survit très bien dans les produits transformés comme les charcuteries. "Un reste de sandwich contaminé jeté, puis consommé par un porc, suffit à déclencher une épidémie", explique François Roger, chercheur au Cirad. Or, les détritus ou les eaux grasses des avions, bateaux ou restaurants sont souvent utilisés dans les élevages chinois. "Chaque année, la Chine produit 500 millions de porcs, dont 40 % dans de petites fermes familiales ne comptant parfois qu’un ou deux cochons. Le pays constituerait un réservoir de virus énorme si la PPA s’y implantait", s’inquiète le chercheur. "L’impact économique et culturel serait dévastateur, car l’animal occupe une place centrale dans les sociétés asiatiques." Le Cirad souligne que les autorités chinoises ont conscience du danger, et qu’elles souhaitent améliorer la préparation du pays avant l’arrivée de la maladie.

(1) Le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (Cirad) est un établissement public français spécialisé dans la recherche agronomique appliquée aux régions chaudes.

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