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La prolificité des truies évolue, leur alimentation aussi

Lors de la troisième édition du forum Trans porc-in', la firme service Wisium et trois coopératives du Grand Ouest ont dévoilé les points stratégiques essentiels pour bien alimenter les truies hyperprolifiques.

« La nutrition est au cœur de la compétitivité des élevages et des attentes sociétales », soulignait Éric Schetelat, responsable porc Wisium France. À charge pour la firme service de proposer des solutions pour répondre à ces deux objectifs. À partir des travaux de son équipe Recherche et Développement et les retours terrain de ses clients du Grand Ouest (Agrial, Cecab-Eureden et Porcineo) avec lesquels elle coorganisait la troisième édition des Trans porc-in', un forum technique dédié aux éleveurs à Saint-Gilles, elle a élaboré une série de préconisations pour bien gérer la conduite des truies, de la quarantaine jusqu’à la maternité. Avec en toile de fond le développement de l’alimentation de précision, « une voie de progrès à la fois pour l’amélioration des performances, la limitation des rejets et le bien-être des animaux ».

Pas de restriction alimentaire en quarantaine.

L’objectif est d’éviter de perturber l’évolution de l’appareil reproducteur de l’animal, et de l’amener dans un état optimal à la première insémination artificielle (IA). L’évaluation des réserves corporelles (épaisseur de lard et de muscle dorsal, ELD et EMD) est un bon indicateur de cet état. « Une prise d’ELD continue est préférable. Il faut aussi viser l’homogénéité entre les animaux pour éviter les complications de gestion du troupeau. » Pour cela, un aliment de gestation est préférable pour privilégier le dépôt de gras (entre 2,5 et 3,0 kg) « Un flushing avant l’IA est cependant nécessaire, comme pour les multipares », souligne Éric Schetelat. L’objectif est d’apporter un supplément d’énergie et de protéines pour favoriser une bonne venue en chaleur.

Le gabarit des truies, premier critère de calcul de la ration

En gestation, les besoins de la truie sont principalement des besoins d’entretien (environ deux tiers du total), qui dépendent avant tout du poids vif des animaux. Wisium a reconstitué le poids vif des truies des adhérents Porcineo, Cecab-Eureden et Agrial à partir des données d’Uniporc Ouest. Le poids vif moyen est de 242 kilos. Il va de 220 à 270 kilos pour 45 % d’entre elles. « Ces 50 kilos d’écart génèrent un différentiel de besoin énergétique équivalent à 340 grammes par jour d’aliment de gestation », indique Éric Schetelat. Une enquête similaire réalisée en 2008 avait révélé un poids vif moyen des truies à l’abattage de 230 kilos. « En dix ans, le poids de réforme a augmenté de 11 kilos, correspondant à un écart de 70 grammes par jour d’aliment de gestation. » Il souligne cependant l’intérêt de la mesure d’ELD pour contrôler la bonne adéquation du plan d’alimentation aux besoins des animaux. « 200 grammes d’aliment distribués en plus par jour ont pour conséquence une augmentation de 3 millimètres d’épaisseur de lard dorsal sur une durée complète de gestation. »

Rapprocher le dernier repas et le début de la mise bas

Wisium est revenu sur une étude publiée par des chercheurs danois (voir Réussir Porc juillet-août 2019 page 36) qui démontre que la durée de la mise bas dépend beaucoup du statut énergétique de la truie. Si le délai entre le dernier repas et le début de la mise bas est inférieur à trois heures, la truie aura un meilleur statut énergétique quand la mise bas commencera, ce qui lui permettra d’augmenter la fréquence des expulsions des porcelets. « La mise bas s’apparente à un marathon dans sa durée et son intensité, souligne la firme service. Pas question, donc, de commencer en étant en hypoglycémie ! » Concrètement, elle préconise de répartir les apports nutritionnels sur la journée et de ne pas trop rationner les truies avant la mise bas. « Il faut apporter de l’aliment le soir à celles qui risquent de mettre bas la nuit. » Les aliments péri-mise bas présentent également un intérêt pour favoriser un bon déroulement des mises bas, grâce à leurs fibres et à leurs apports d’électrolytes favorables aux contractions utérines.

3 kilos d’aliment le lendemain de la mise bas

L’objectif d’un plan d’alimentation en maternité est que la truie consomme un maximum d’aliment sans qu’il y ait de blocage de consommation en cours de lactation. Pour cela, Wisium préconise une courbe qui démarre à 3 kilos d’aliment dès le lendemain de la mise bas, puis une progression modérée des quantités distribuées de 500 grammes par jour jusqu’au plafond. Éric Schetelat conseille également d’utiliser des complémentaires de lactation pour reconstituer des aliments de concentration nutritionnelle différente, notamment pour les primipares qui consomment 20 à 25 % de moins que les multipares. « C’est une première étape vers une alimentation biphase en maternité », conclut-il.

Au Gaec des Frênes, les porcelets des cochettes sont sevrés à 21 jours

En réduisant la durée de lactation des cochettes d’une semaine, les truies en secondes portées du Gaec des Frênes, en Vendée, sont passées de 14,37 à 15,31 porcelets nés totaux, et de 11,80 à 12,80 sevrés, soit un porcelet de plus par portée. Leur taux de fertilité a progressé, passant de 77,4 % à 92,9 %. « Le sevrage à 21 jours a permis d’atténuer le syndrome deuxième portée, en évitant d’épuiser les cochettes en fin de lactation », constate Yannick Picard, le gérant de l’élevage. Il a également été appliqué aux multipares les plus maigres. Dès la veille du sevrage, elles sont mises sous traitement aux progestagènes. Elles sont amenées le lendemain en verraterie. La distribution de progestagènes est arrêtée le mercredi suivant, la veille du sevrage de la bande. En parallèle, l’éleveur a mis en place une gestion des truies en groupe basée sur les mesures d’ELD. « Elles permettent notamment une meilleure gestion des extrêmes. La remise en état des cochettes est plus facile, souligne l’éleveur. Mais cette solution demande cependant un peu plus de main-d’œuvre. »

À la SCEA Phisapig, les truies sont rationnées selon l’ELD

En fonction des valeurs d’épaisseur de lard dorsal (ELD) établies à l’entrée en verraterie et à l’échographie, Isabelle et Philippe Gaucher, éleveurs à Vivoin dans la Sarthe, distribuent une quantité prédéfinie d’aliment à chaque groupe de truies regroupées dans des cases de sept places. Ces quantités sont exprimées en pourcentage d’une ration de base. En verraterie, elles varient de 160 % pour les ELD inférieures à 10 mm jusqu’à 85 % pour les ELD supérieures à 18 mm. En gestante, les rations peuvent varier de 125 à 90 % entre 13 et 20 mm d’ELD. L’objectif est d’avoir un troupeau homogène à l’entrée en maternité, avec une valeur ELD comprise entre 18 et 19 mm. Une mesure d’ELD est faite à l’entrée en maternité, où les truies sont nourries selon une courbe prédéfinie. Isabelle Gaucher peut reprendre une mesure d’ELD sur certaines en cours de lactation pour réajuster la ration. Celles dont l’ELD est inférieur à 13 mm sont systématiquement sevrées à 21 jours. Les truies les plus grasses (plus de 23 mm à l’entrée en maternité) ont un plafond d’alimentation limité à 90 % de la ration standard. Outre de bons niveaux de prolificité (13,3 sevrés par portée), cette stratégie permet surtout d’avoir des truies ayant de longues carrières (5,9 portées par truie réformée) et des performances techniques régulières quel que soit le rang de portée.

Des performances techniques en constante progression

La synthèse de 151 GTTT de 2018 issues d’élevages Agrial, Porcineo et Cecab-Eureden représentant 37 000 truies révèle la constante progression de la prolificité des truies. En 2018, elles ont fait naître 15,7 porcelets nés totaux et 14,5 nés vivants par portée, ce qui leur a permis de sevrer 12,1 porcelets par portée. Par rapport aux derniers résultats nationaux datant de 2015, l’augmentation se chiffre à + 0,4 porcelet sevré par portée en trois ans. « La barre des 30 porcelets sevrés par truie productive et par an est désormais dépassée (30,1) », souligne Audrey Budant, chargée d’études Wisium. À noter que le tiers supérieur atteint 32,6 porcelets, et les 10 % supérieurs 34,6 ! L’âge au sevrage est très discriminant : « + 1,2 porcelet par truie productive et par an pour les élevages qui sèvrent à moins de 24 jours ». Le taux de pertes moyen sur nés vivants est de 16,3 %. « Il est moins élevé dans les élevages de taille importante (plus de 250 truies), du fait d’une spécialisation de la main-d’œuvre », constate Audrey Budant. La taille d’élevage moyen de l’échantillon est de 248 truies présentes. Les élevages de plus de 250 truies représentent 30 % de cet échantillon, mais 55 % des truies.

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