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Laine des Pyrénées
Une filière à reconstruire

Tondeurs, éleveurs, négociants, entreprises de filature et créateurs se sont retrouvés aux rencontres de la laine pyrénéenne, à Bagnères-de-Bigorre, les 22 et 23 novembre.

© Halte-Laaa, DR
La laine n’a plus la valeur d’autrefois. Mais le prix d’achat est malgré tout en train de remonter, ce qui pourrait encourager des éleveurs à mieux la valoriser. Plusieurs régions se posent la question et des initiatives sont lancées, comme dans le Limousin avec Laines locales réseau Limousin, ou plus récemment dans les Pyrénées avec l’association Halte-Laaa. Cette dernière a organisé une rencontre transfrontalière franco-espagnole les 22 et 23 novembre à Bagnères-de- Bigorre, dans les Hautes-Pyrénées.
Ceux qui vendent de la laine n’en connaissent pas souvent l’origine, car le produit manque de traçabilité. Les transformateurs ont de grandes difficultés à gérer les toisons locales, en raison de la disparition des unités de traitement dans les régions de production. La quasi-totalité des laines produites en France sont donc exportées en suint à des prix dérisoires.
L’objectif de l’association Halte-Laaa, constituée de tondeurs, éleveurs, négociants, entreprises de filature et créateurs, est de créer une image de marque « laine des Pyrénées », avec l’aide de tous les maillons de la filière.

UN BON TRI AVANT TOUT

Mieux tondre et mieux trier serait déjà un bon commencement pour reconstruire une filière. Christelle Loyer, bergère d’alpage, fait partie d’une équipe de tondeurs qui exerce en Ariège, dans les Pyrénées- Orientales, en Andorre et en Espagne. Elle exige, lors des chantiers de tonte, un tapis de feutre, un balai, une personne supplémentaire et une séparation des laines blanches et noires. La laine propre a été payée entre 0,70 et 0,80 euro le kilo cette année.
« Le territoire des Pyrénées dispose de vingt-trois races ovines aux laines très différentes, il faudrait commencer par les analyser » reconnaissent les organisateurs. Le centre d’innovation technologique de Terrassa, près de Barcelone, dispose d’un laboratoire d’analyse des fibres pour répondre à ce besoin.
Finesse, dispersion, taux de graisse, couleur, longueur et gonflant sont quelques-unes des caractéristiques pouvant être mises en évidence. Les éleveurs peuvent aussi réaliser des essais pour connaître le rendement de leur laine, car deux kilos de laine « sale » peut donner à la fin seulement un kilo de propre. Les pertes vont de 30 à 60 %, suivant le taux de graisse et de poussière.

CRÉATION D’EMPLOI

Une fois que l’on connaît mieux sa laine, il faut tondre et trier. Dans l’idéal, il faudrait faire appel à des personnes formées à ramasser la laine et qui ont appris à la classer. Un pré-tri en plusieurs catégories selon ce que l’on souhaite valoriser peut aider à faire baisser le coût du transport et de la transformation. Un agriculteur pourrait bien se charger de cette tâche. En le rémunérant, cela permettrait de créer un emploi à temps partiel, en complément de son activité de paysan. Car pour avoir un lot homogène, il vaut mieux une seule personne qui fasse le tri.
Olivier Chautard, des Bergers Cathares en Ariège, explique que, pour les éleveurs de chèvres angoras, la laine a une grande valeur. La tonte coûte 4,50 euros par animal, et se fait sur un plancher propre, la toison est triée en cinq catégories sur une table grillagée chez l’éleveur. Il fait de même pour les toisons de ses 500 moutons.

SOLUTIONS ENVISAGÉES

Pour le circuit pyrénéen, des solutions pour relancer la laine pyrénéenne, du circuit court au circuit long, ont été présentées à cette rencontre avec le tri et le classement comme outil transversal. L’Atelier (Laines d’Europe) a proposé un centre mobile de tri et de compactage, au service des éleveurs, qui pourrait aller de ferme en ferme, par exemple. Il proposerait un service de conseils pour le tri et le classement. Des experts lainiers en Italie et en Grande- Bretagne réalisent ce genre de prestations. Plus onéreuse sans doute, la création d’une micro-filature appelée Mini Mill, pour filer de petites quantités de laine. Ce dernier outil est fabriqué au Canada et des exemplaires ont déjà été diffusés en Grande- Bretagne, en Suède, en Norvège, en Belgique et en Allemagne. Le coût est autour de 120000 euros. Il traite la fibre depuis le lavage jusqu’à l’écheveau et permet d’obtenir des nappes de laine pour le feutrage, des rubans semipeignés, ou du fil. Autre solution, la modernisation de la filature de Niaux (Ariège), l’un des rares endroits où l’on peut encore laver la laine. Le directeur actuel Jean-Jacques Laffont part en retraite dans un an et demi. Une association « Atout laine » a été créée pour sauvegarder cet outil. Mais il lui faut rapidement transmettre les compétences de l’équipe en place. Il n’existe presque plus de capacités de traitement dans le territoire franco-espagnol des Pyrénées. Comme le souligne l’Atelier, il y a donc urgence à mobiliser toutes les énergies pour sauver les petites unités qui subsistent.

Ce qu’ils en pensent du côté espagnol

- Pedro José Escuda de la Cotega, coopérative d’éleveurs d’Aragon, représente 500 000 brebis en grands troupeaux
(700 brebis et plus). La coopérative propose un service de tonte et un groupage de la laine pour diminuer les coûts de transport. Elle demande aux éleveurs de faire attention à la laine, la tonte coûte 1,50 euro par brebis. La coopérative s’occupe de la vente de la laine à des acheteurs espagnols et internationaux.

- Melquiades, tondeur, explique les difficultés de la filière par la globalisation de la laine. La tonte est une nécessité physiologique du mouton et il est nécessaire ce jour-là de faire venir du monde pour aider à bien faire ce travail. Mais aujourd’hui, les éleveurs sont très solitaires, il n’y a plus de grandes familles. La laine n’est plus une matière première utile, on n’aime pas la laine, la tonte devient une corvée. Sa seule potentialité est sa valeur culturelle, c’est ce qui lui ouvrira des marchés.

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