Aller au contenu principal

En Ariège
Une caravane-boutique itinérante de laines paysannes et locales

L'entreprise Laines paysannes est née de la rencontre entre l’élevage de brebis de Paul et la partie tissage et valorisation des laines locales menée par Olivia.

Olivia et Paul sont convaincus de la valeur de la laine et sont déterminés à produire des articles de qualité. « Ma rencontre avec la laine est d’abord passée par la teinture naturelle et le tissage artisanal à l’occasion de plusieurs voyages en Amérique centrale », raconte Olivia Bertrand, 31 ans. Paul de Latour, lui, s’est installé en 2012 avec son père Éric sur la ferme familiale, située à Saverdun en Ariège, aux pieds des Pyrénées. En Gaec, ils élèvent un millier de brebis tarasconnaises en agriculture biologique et en plein air intégral. « La race tarasconnaise est une race rustique des Pyrénées parfaitement adaptée à la transhumance », indique Paul. Chaque été, de juin à septembre, les brebis transhument dans les montagnes de la Haute Ariège. Les agneaux naissent en plein air et ne sont engraissés en bergerie qu’au moment de leur sevrage. Toute la viande d’agneaux est commercialisée en vente directe localement, via le bouche-à-oreille, les boutiques de producteurs ou La Ruche qui dit Oui. Ce réseau d’acheteurs de viande formera ensuite les premiers clients de la laine valorisée.

« C’est dans la démarche de proposer des produits de qualité et de valoriser au mieux toutes les productions du troupeau que nous avons envisagé de valoriser notre laine », explique Paul, 34 ans. Séduite par la douceur de la laine, Olivia se forme au tri des toisons, au filage, à la teinture, au tissage… Après sa formation professionnelle en "techniques des fibres et du tissage", elle lance en 2015 une petite production d’articles en laine tissée. La laine est lavée à Saugues puis filée en Ariège. La plus grosse partie est ensuite tricotée par Misseigle, dans le Tarn, et une partie est transformée en plaids par Teixidors en Espagne.

Le tri permet de ne garder que les plus belles laines

Au fil des rencontres et de nouvelles expériences, le projet s’élargit autour de la valorisation des laines locales. En effet, l’Ariège est un département pastoral où la laine « pousse » en abondance. Olivia passe des accords avec des éleveurs de la région et Laines paysannes grandit vite. De 800 kilos de laine triée brute collectés en 2016, l’entreprise passe à 1,6 tonne en 2017 puis 5 tonnes en 2018. « Nous collectons aujourd’hui la laine de 12 éleveurs et de sept races différentes » détaille Olivia. Chaque race a ses valorisations. Les Tarasconnaise, Rouge à Roussillon, Mérinos et Romane donnent une laine à tricot. Les Scotch mule possèdent une laine longue et lustrée qui sert à faire les plaids. Et les laines, grossières et colorées, des races locales manech et basco-béarnaises vont servir à faire de solides tapis.

Les éleveurs partenaires peuvent adhérer à la société coopérative. Le prix de la laine est décidé en concertation lors de l’assemblée générale en février-mars. En 2018, ils étaient payés un euro du kilo de laine triée en suint. La laine de Mérinos était, elle, payée une fois et demie le prix du marché. « Les éleveurs sont contents de ce partenariat qui les rémunère davantage, remarque Olivia. Ils sont aussi contents de voir comment leur laine est valorisée ». La récolte de laine est aussi un moment très convivial. Une équipe d’une dizaine de trieuses rejoint le chantier de tonte et y ajoute un chantier de tri. Les plus belles qualités de laine sont valorisées en produits finis, le reste rejoint la filière du négoce.

Une caravane-écrin pour aller au contact de la clientèle

Pour la jeune équipe de Laines paysannes, aujourd’hui constituée de quatre personnes, il a fallu apprendre à vendre pulls, chaussettes, bonnets, pelotes, couettes ou oreillers. « Nous avons appris à communiquer auprès du grand public, résume Olivia. Il faut sensibiliser la clientèle à cette fibre particulière, lui expliquer comment l’entretenir ». Il faut aussi pouvoir plaider le prix du local puisque les pulls sont vendus à partir de 120 euros et la paire de chaussettes est à 19 euros. Heureusement, « il y a un vaste regain d’intérêt pour les laines locales et naturelles ».

Pour vendre, Laines paysannes a soigné le marketing. Cela commence par le logo représentant une cardère, ce chardon qui servait autrefois à peigner la laine. Laines paysannes s’est aussi doté d’un très beau site internet (laines-paysannes.fr) avec de la vente en ligne. Et pour développer la vente directe, Laines paysannes a imaginé une caravane boutique très originale. Après avoir voyagé sur la route, la caravane en bois s’ouvre et se transforme en écrin pour accueillir les lainages et les clients. « La réalisation de cette boutique itinérante a été rendue possible par un financement participatif réussi qui a permis de collecter près de 14 000 euros auprès de 150 personnes », sourit Olivia. La caravane en bois sert maintenant d’emblème à Laines paysannes qui multiplie les salons et les marchés de Noël. « L’an dernier, nous avons sorti la caravane une vingtaine de fois » calcule Olivia en citant par exemple la tournée des magasins Biocoop de la région. Laines paysannes s’aventure aussi un peu plus loin, à Felletin ou à Paris par exemple, pour le salon Marjolaine ou le salon de l’agriculture.

Le chiffre d’affaires a suivi le développement de l’entreprise, passant de 56 000 euros en 2017 à plus de 150 000 euros en 2018. « Le passage dans l’émission Des racines et des ailes en novembre a boosté nos ventes, apprécie Olivia. Mais l’entreprise est encore fragile et je ne me paye un salaire que depuis avril. On aurait encore du potentiel commercial pour grandir mais on veut maintenant se stabiliser pour souffler un peu ». Pour elle, il y a de la place pour d’autres projets lainiers. « Plus on est nombreux à parler de la laine et mieux ce sera ». Olivia voit beaucoup d’avantages à être éleveur ovin et vendre de la laine. « Cela nous a rendus tout de suite crédibles auprès des éleveurs et on a pu faire nos essais doucement avec notre laine ».

Un marketing soigné pour une laine de qualité

Un cahier des charges pour une laine de qualité

Laines paysannes a mis en place une démarche de qualité concernant la production et la récolte de laine. Ce cahier des charges insiste par exemple sur le bon état sanitaire du troupeau et sur la propreté de la toison. Par exemple, il faut limiter le paillage ou l’affouragement quand les brebis sont là. Le jour de la tonte, les bêtes, sèches et à jeun, sont tondues sur une aire qui peut se balayer facilement : bâches, panneaux bois ou aire raclée de son fumier.

Les plus lus

Darius Filipiak, 29 ans, s'est installé dans le Lot après un CS ovin et plusieurs expériences professionnelles en élevage ovin.
« J’arrive à vivre avec mes 250 brebis, élevées en plein air intégral »
Darius Filipiak, 29 ans, passionné par l’élevage de brebis, s’est installé en 2019, à Montcuq dans le département du Lot, avec…
Les éleveurs de brebis laitières des Pyrénées-Atlantiques s'investissent pour trouver des pistes d'adaptation de leur activité face au changement climatique.
Changement climatique : la filière lait de brebis des Pyrénées Atlantiques prend la mesure de l'enjeu
L'interprofession lait de brebis des Pyrénées-Atlantiques dans un projet franco-espagnol à la recherche de pistes pour adapter…
Benoit Toutain, 17 ans et originaire de l'Oise, a été sacré meilleur jeune berger 2024 lors de la finale des Ovinpiades, le 24 février, à Paris.
Salon de l’Agriculture : Le meilleur berger de France 2024 vient de l’Oise
Le champion de la 19e édition des Ovinpiades, Benoît Toutain, est originaire de l’Oise et possède déjà son propre troupeau.
Baptiste Soulat, 27 ans, s'est installé en Haute-Vienne sur l'exploitation paternelle. Passionné par la génétique, il est devenu sélectionneur en Suffolk.
« J’ai concrétisé ma passion pour la génétique et la Suffolk sur la ferme de mon enfance »
Baptiste Soulat, 27 ans, s’est installé sur l’exploitation bovine de son père en Haute-Vienne, créant du même coup l’atelier…
Parmi les céréales qui peuvent être distribuées aux brebis, l'avoine est la moins énergétique et n'est pas acidogène.
Quelles céréales intégrer dans la ration des brebis ?
Les céréales sont des concentrés d’énergie qui sont essentiels dans la ration des brebis selon leur stade physiologique. Tour d’…
Légende
"Nous avons choisi le pastoralisme itinérant"
Après avoir été bergers durant cinq ans, Juliette Martorell et François Oriol pratiquent depuis deux ans le pastoralisme…
Publicité
Titre
Je m'abonne
Body
A partir de 93€/an
Liste à puce
Accédez à tous les articles du site Réussir Pâtre
Consultez les revues Réussir Pâtre au format numérique, sur tous les supports
Ne manquez aucune information grâce à la newsletter Réussir Pâtre