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Les promesses de la sélection génétique

Les journées génétiques de France génétiques élevage ont permis de faire le point sur les recherches dans la génétique et la sélection des ovins allaitants.

Les villes de Laon et La-Vallée-au-blé, dans la région Hauts-de-France, ont accueilli les 4es journées génétiques de France génétiques élevage (FGE) les 23 et 24 mars derniers. Ce rendez-vous, organisé par les équipes de l’Institut de l’Élevage, de l’Inra et Races de France a rencontré un franc succès. Une quarantaine de personnes a participé avec convivialité à ces deux journées d’information génétique et d’échanges. Ce fut l’occasion de partager les dernières avancées de la recherche en matière de sélection des ovins allaitants. Les techniciens de terrain, issus des structures de contrôles de performances, d’organismes de sélection ou encore d’organismes de producteurs ont participé activement à ces journées. Certains d’entre eux ont d’ailleurs témoigné de leur engagement dans les travaux présentés.

Anticiper un nouveau cadre réglementaire

Dans le domaine de la sélection, un changement important d’organisation du dispositif génétique se profile d’ici fin 2018. En effet, l’encadrement législatif de l’amélioration génétique va évoluer fortement. Agathe Cheype de l’Institut de l’Élevage a rappelé que « depuis les années soixante, des directives européennes et des lois françaises comme la Loi d’orientation agricole de 2006 cohabitent pour réglementer le dispositif français ». Désormais, la Commission européenne souhaite unifier ces textes dans un règlement unique qui soit applicable à l’ensemble des états membres. Un nouveau texte réglementaire a donc été produit et adopté en juin 2016 ; son application est prévue d’ici novembre 2018. Ce cadre juridique s’appliquera aux reproducteurs de race pure et au matériel de reproduction (semence, ovules…) des espèces bovines, ovines, caprines, équines et porcines. Il propose un cadre uniforme pour les échanges d’animaux. Bertrand Bouffartigue de Races de France a expliqué que « l’organisme de sélection (OS) sera placé au centre du dispositif génétique. Les missions historiques relatives à la tenue du livre généalogique des animaux de race pure et à la réalisation des programmes de sélection continueront d’être confiées à l’OS. Nouveauté pour ces structures, elles auront également la responsabilité d’organiser les activités de contrôle des performances de leurs races et ses évaluations génétiques, missions qu’elles pourront réaliser en direct ou déléguer. » Les responsables professionnels ovins allaitants devront œuvrer afin de trouver la meilleure organisation possible dans ce nouveau contexte. Quoi qu’il en soit, les responsables professionnels de cette filière ont la volonté de conserver une « mutualisation » forte de l’organisation de la sélection française ovine.

De nouvelles cibles dans le viseur de la sélection

Au niveau technique, de nouvelles pistes de sélection émergent avec l’étude de caractères nouveaux ou de caractères venant renforcer la connaissance de ceux déjà en sélection. Prenons l’exemple des projets sur la survie des agneaux qui complètent les données de mortalité déjà valorisées en évaluation génétique. Plusieurs projets sont en cours actuellement. L’un vise à valider la possibilité d’enregistrer des performances de vigueur des agneaux en ferme en race Rouge de l’Ouest et en Mouton vendéen et l’autre cherche à faire la lumière sur les paramètres génétiques de la qualité du colostrum des brebis sur la ferme expérimentale de Fedatest. Avec ces nouveaux éléments, la génétique pourrait contribuer à faire baisser la mortalité des agneaux en élevage. L’objectif est non seulement d’impacter positivement le revenu des éleveurs mais également de libérer du temps de travail en sélectionnant des animaux plus autonomes, particulièrement autour de la mise-bas.

Valérie Loywyck de l’Institut de l’Élevage et Dominique François de l’Inra ont présenté le cas de nouveaux caractères à l’étude comme les caractères décrivant les facultés d’adaptation des animaux, leur efficacité de production à l’échelle de la carrière ou encore leur efficacité alimentaire (valorisation de concentrés ou de fourrages). L’UMT Génétique et génomique des petits ruminants contribue à de nombreux partenariats européens sur ces thématiques nouvelles.

Les analyses génomiques, de nouveaux outils pour compléter la boîte à outils de la sélection

Actuellement, les ovins allaitants ont accès aux analyses génomiques dans deux cas : pour assigner un agneau à son père, c’est-à-dire retrouver par comparaison d’ADN le père d’un agneau parmi une liste de pères possibles ou encore pour connaître le génotype d’un animal sur quelques gènes à effets majeurs connus.

Pour Flavie Tortereau de l’INRA, « l’assignation de parenté est une technique intéressante pour les races qui travaillent en sélection avec un faible taux de paternité connu comme la Préalpes du Sud, la Noire du Velay, et beaucoup d’autres… Cette nouvelle technologie a aussi un avenir dans les schémas des races bouchères car le fort taux de paternité connu de leurs agneaux s’obtient au prix de contraintes fortes ». En effet la logistique liée à l’organisation de luttes naturelles en petits lots est contraignante sans compter le temps à passer. L’assignation de parenté par analyse génomique est promise à un fort développement dans les élevages de sélection sur les prochaines années à condition que les gains réalisables sur le progrès génétique et que ceux espérés sur la fertilité (en mélange plutôt qu’en paternité) couvrent les coûts de l’assignation, ce qui est également à l’étude !

Maîtriser la variabilité en parallèle de l’objectif de progrès génétique

Autre domaine abordé : l’importance de la gestion de la variabilité génétique dans les races. En effet, tout le monde sait que « choisir, c’est renoncer ». Et sélectionner, par principe, c’est choisir des reproducteurs pour favoriser la reproduction des plus prometteurs, donc renoncer aux autres. Cela revient alors à déséquilibrer les contributions des béliers dans la constitution de la génération suivante. La recherche de progrès génétique induit une baisse de variabilité génétique. Et pourtant, la variabilité génétique est essentielle dans une population. Elle permet de garantir une certaine capacité d’adaptation des populations mais aussi de pouvoir continuer à sélectionner.

Les attentes de l’OP Bergers du Nord-Est en matière de génétique

Thierry Vroman, directeur de l’organisation de producteurs Les Bergers du Nord-Est, a présenté la coopérative aux participants des journées génétiques. La structure de 16 salariés apporte ses services à 320 éleveurs, soit près de 70 000 brebis. Implantée sur 10 départements du nord-est de la France, elle propose trois centres d’allotement répartis dans l’Aisne, les Ardennes et la Marne, afin de rassembler les animaux, de les trier avant de les orienter vers la meilleure valorisation possible. Ses deux marchés principaux sont la vente d’animaux vivants (brebis de réforme et agneaux) et la vente d’agneaux (environ 35 000 agneaux) en carcasse abattus en prestation de service à l’abattoir du Nouvion-en-Thiérache (02). La coopérative est impliquée de l’appui technique aux éleveurs, en passant par le tri des agneaux en ferme, jusqu’à la préparation des commandes et l’expédition de viande. Ses produits sont commercialisés à 35 % en grandes surfaces, à 15 % en boucherie/cheville, à 20 % de transformation et à 30 % dans d’autres abattoirs. Son implication génétique se caractérise par la commercialisation de 2 000 à 2 500 reproducteurs par an : 150 à 180 béliers qualifiés, 1 000 à 1 500 agnelles/antenaises et 500 à 800 reproductrices adultes (cas des cessations d’élevage). Les attentes de la coopérative en matière de génétique doivent correspondre à un objectif simple : améliorer la rentabilité économique des ateliers ovins. Thierry Vroman a d’ailleurs évoqué différents leviers sur lesquels la génétique a son rôle à jouer : « la productivité numérique, l’efficacité de production, la qualité des carcasses en maintenant la pression sur la conformation des agneaux, la longévité des brebis, la résistance aux problèmes sanitaires et le confort de travail les éleveurs. »

Focus sur les systèmes ovins des Hauts-de-France

La région Hauts-de-France est une grande région de production agricole avec les deux tiers de son territoire en surface agricole utile. Elle se distingue par une importante production de céréales et de cultures industrielles. L’élevage régional s’inscrit donc en complémentarité des productions végétales. Près d’une exploitation sur deux possède un atelier d’élevage. L’élevage ovin est présent sur tout le territoire, avec une concentration plus importante dans les zones herbagères (Thiérache, Pays de Bray, Boulonnais). Avec 500 détenteurs (déclarants à l’aide ovine 2014) et 87 000 brebis, l’élevage ovin des Hauts-de-France se caractérise par deux tiers d’ateliers producteurs d’agneaux de bergerie en complément de cultures de vente et un tiers d’ateliers présents sur des exploitations bovines qui produisent des agneaux d’herbe. Les races les plus représentées y sont l’Ile de France, la Romane et la Texel. Originaire du nord de la France, la Boulonnaise, est présente, en conservation, dans des troupes de taille plus modeste. La région se démarque par son taux important d’animaux suivis en contrôle de performances (16 % contre 8 % en moyenne nationale). La synthèse des appuis techniques réalisés dans la région (Inosys - réseau d’élevage) fait apparaître une rentabilité en hausse sur ces dernières campagnes. Les marges brutes atteignent 85 à 100 euros par brebis en moyenne en fonction des systèmes.

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