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Les Blanches valorisent le Causse

En Lozère, les Blanches du Massif central parcourent les prairies, les landes ou les sous-bois et produisent des agneaux vigoureux.

Sur la commune de Prévenchères en Lozère, plus de 4 000 moutons blancs s’épanouissent sur les plateaux caillouteux qui surplombent les gorges du Chassezac. Au Gaec du Roure, on élève des Blanches du Massif central depuis les années soixante-dix. Aujourd’hui, plus d’un millier de brebis, 250 agnelles et 20 béliers valorisent 580 hectares de SAU. Mais sur cette vaste surface, seuls 40 hectares sont cultivables en céréales et 75 en prairies temporaires. Le reste de surfaces, composé de terres acides très caillouteuses, forme le parcours à brebis à base de lande, de bois et de sous-bois. « La Blanche valorise bien les parcours, explique Guillaume Calcat qui a rejoint le Gaec en 2015. Elles aiment bien marcher et peuvent faire jusqu’à 20 kilomètres par jour si le temps le permet. »

De bons aplombs pour descendre les gorges

Elles sortent sur les parcours vers la mi-mars, dès que l’herbe commence à pousser. « C’est une bonne débroussailleuse qui maintient le genêt bas et limite ainsi les risques d’incendies », apprécie Arnaud Morin, un de ses voisins éleveurs. Quand elles commencent à sortir, la distribution de foin est réduite progressivement jusqu’à fin avril et les brebis sont dehors jour et nuit vers le 15 mai. L’été, les brebis partent deux mois sur les estives d’un groupement pastoral avec un berger et un aide-berger.

À l’automne, elles descendent dans les gorges du Chassezac et se régalent de châtaignes et de glands. « Pour descendre dans ces gorges escarpées, il faut des brebis avec de bons aplombs », observe Guillaume Calcat. Quand les brebis sont rentrées vers la fin novembre, elles reçoivent du foin de prairie ainsi que du regain de luzerne et du triticale ou du seigle pour celles qui attendent un agneau. Le Gaec organise en effet quatre périodes d’agnelage pour répondre à la demande du groupement Elovel, de la coopérative Celia et de l’entreprise Lozère viande qui commercialisent l’agneau IGP de Lozère. « Le cahier des charges impose un agneau de race Blanche du Massif central, explique Olivier Morin, associé du Gaec et président de l’ODG Elovel. Ce sont des agneaux légers, autour de 16 kilos de carcasse, jeune, moins de 130 jours, et non sevré. La viande est rosée clair, savoureuse mais au goût pas trop fort ».

Des agneaux débrouillards à la naissance

Au Gaec du Roure, la prolificité tourne entre 1,5 à 1,6 et un peu plus pour le lot d’IA qui agnelle à l’automne. Par rapport à d’autres éleveurs du département, Guillaume Calcat observe que les agneaux blancs sont plus vigoureux que les Lacaune. Certains éleveurs de Lacaune laitières croisent d’ailleurs leurs brebis avec des béliers BMC pour avoir des agneaux qui se débrouillent bien. Ici, le lot qui agnelle du 25 mai au 15 juin est dehors à côté de la bergerie lors des naissances. « Nous les surveillons puis nous mettons les doubles et leur mère en cases et les brebis avec un seul agneau en petits lots ».

En plus de l’insémination animale, les éleveurs essaient de se rendre aux trois ventes de béliers des stations de contrôle de Paysat-Bas (Haute-Loire) ou d’Antrenas (Lozère). En plus de regarder les notes de prolificité et de conformation, le Gaec n’achète que les béliers nés et élevés en double.

Le loup menace la sélection

Depuis les premières attaques du loup en 2011, l’élevage ovin à Prévenchères a été complètement bouleversé. Les jeunes éleveurs Arnaud Morin et Guillaume Calcat n’en décolèrent pas. « Rien qu’en 2016, c’est une centaine d’agneaux de la commune qui ont péri sous les crocs du carnassier, calcule Arnaud. C’est énorme. Un paysan à la retraite y a perdu ses trente brebis. » Le loup attaque au printemps et à l’automne et lors de l’estive sur le Mont Lozère. Auparavant, les quatre exploitations du groupement pastoral se relayaient toutes les semaines pour garder les 2 500 brebis sur 600 hectares d’estive. « Depuis les attaques, nous avons été obligés de prendre des professionnels, un berger et son aide-berger, pour garder les animaux, explique Guillaume. Avant, on ne s’inquiétait pas quand 50 brebis restaient dehors, maintenant, ce n’est plus possible. »

À quoi bon s’échiner à produire des brebis de qualité

En plus, il n’est pas possible d’utiliser des chiens de protection car l’estive est coupée en deux par le chemin de Stevenson où peuvent passer jusqu’à 200 marcheurs par jour. « Avec nos quatre lots de mise bas, il faudrait au moins une vingtaine de chiens pour tenter de dissuader le loup… ».

En plus des pertes directes et des pertes invisibles liées au stress et aux avortements, la prédation par le loup affecte le travail de sélection. « Maintenant, on ne choisit plus trop pour la reproduction, explique amer Guillaume Calcat, on cherche surtout à produire des brebis pour remplacer celles qui sont tuées. Si le loup continue ses attaques, nous serons obligés d’arrêter le schéma de sélection. À quoi bon s’échiner à produire des brebis de qualité si c’est pour les voir agoniser sous les crocs du loup… » Même s’ils parviennent à impliquer une partie des médias et des politiques à leurs côtés, les éleveurs de Lozère n’en n’ont hélas pas fini avec le carnassier…

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