Aller au contenu principal

5 et 6 dédembre à paris
La recherche se modernise aux 3R

Les Rencontres autour des recherches sur les ruminants présentaient un programme varié et dynamique. Synthèses de quelques études ovines.

La cité des Sciences et de l’Industrie à Paris a accueilli les 5 et 6 décembre les Rencontres autour des recherches sur les ruminants (3R). Le congrès, qui a lieu tous les deux ans, est un concentré de présentations d’études terminées ou en cours, concernant les quatre filières ruminants. Coorganisées par l’Institut de l’élevage et l’Inra, les 3R ont rassemblé pas moins de 700 chercheurs et techniciens, dont 7 % d’étrangers provenant de 12 pays. « Les 3R ont débuté en 1994, rappelle Joël Merceron, directeur général de l’Institut de l’élevage. Cela représente quasiment une génération de chercheurs qui se sont succédé pour présenter leurs études. » L’évènement s’adapte à son public qui rajeunit, notamment avec des formats de présentation plus courts, de cinq à quinze minutes, afin de donner également la parole à un plus grand nombre. Et pour les études qui n’ont pu être présentées à l’oral, les participants ont pu les découvrir les 125 posters les résumant. Les 80 études ont été réparties en 14 grands thèmes et un créneau de présentation des expériences et innovations de terrain a permis aux chercheurs de s’adresser à un public plus restreint. « Ces journées sont un message d’espoir pour la recherche agronomique et les filières ruminants qui vivent aujourd’hui des situations compliquées, annonce Philippe Mauguin, PDG de l’Inra. Il est primordial que le monde scientifique s’ouvre à la discussion avec les producteurs. »

Des arbres et du lien social pour les agneaux

La notion de bien-être animal comporte de nombreuses facettes, méconnues des consommateurs mais qui sont pour les éleveurs autant de paramètres sur lesquels ils doivent être vigilants. Qu’il s’agisse d’animaux conduits à l’herbe ou en bergerie toute l’année, il existe une multitude d’indicateurs et de mesures pour analyser une situation et accompagner l’éleveur dans l’évolution de ces pratiques. Luc Mirabito (Idele) a présenté les évolutions historiques autour de la prise en compte du bien-être animal dans la législation. Cécile Ginane, chercheuse à l’Inra, s’est questionnée sur les aménités positives de la présence d’arbre sur les parcelles de pâturage, concernant les ovins. L’étude a montré que les brebis utilisent les arbres comme abris naturels, pour se protéger des intempéries, de la chaleur et pourquoi pas, des prédateurs. La présence d’arbres ne va pas à l’encontre de la productivité car les agneaux qui ont grandi sur des parcelles arborées sont de bonne conformation et ont eu une bonne croissance. Une autre étude de l’Inra portait sur la création de lien social entre agneaux à l’allaitement artificiel et des brebis taries et les effets positifs que ces liens ont sur la santé des agneaux.

L’heure des grands changements du travail en élevage

Sujet d’étude en plein développement, le travail agricole est confronté à une multitude de tabous et de non-dits. Gérard Servière, chef de projet à l’Institut de l’élevage, est revenu sur les grandes mutations du travail en élevage. D’une part les attentes des éleveurs évoluent, ceux-ci veulent bien entendu gagner leur vie, gagner du temps sur les tâches quotidiennes pour en approfondir d’autres telles que l’observation des animaux, mais aussi se dégager du temps libre, à consacrer à sa vie de famille, à ses hobbies et ménager sa santé pour pouvoir continuer jusqu’à la retraite. L’étude explique également que le secteur agricole se féminise davantage, alors que le salariat agricole est, lui, à la peine, souffrant d’une image très négative. Gérard Servière rappelle d’ailleurs que les chefs d’exploitation peuvent suivre des formations de management. Sur le volet social dans le monde rural, Véronique Louazel de l’association Solidarité Paysan, rappelle l’importance de parler avec son entourage de ses problèmes et de ne pas s’enfermer dans une situation pénible, cela menant hélas trop souvent à des situations désespérées.

Prévenir de la paratuberculose chez les ovins

Fabien Corbière, chercheur à l’école vétérinaire de Toulouse, a partagé les résultats du programme Picsar-paradigm qui vise à évaluer des méthodes pour gérer la paratuberculose en élevage ovin. L’étude s’est déroulée dans 14 élevages, pour certains non vaccinés et connus pour être infectés par la mycobactérie responsable de la maladie. Certains élevages au contraire étaient dans des stratégies de vaccination en prophylaxie des agnelles de renouvellement, depuis quatre ans. L’étude a révélé que les animaux vaccinés étaient toujours excréteurs de la mycobactérie, le vétérinaire recommande donc de poursuivre la vaccination, car les niveaux d’infestation dans les élevages vaccinés restent inférieurs à ceux qui ne le sont pas. L’étude visait principalement à comparer deux méthodes d’analyse, la sérologie Elisa et la PCR sur les fèces. La PCR est ressortie comme étant la plus fiable et la plus spécifique.

Prédation et attentes des consommateurs face à l’élevage

Analyser les attentes sociétales et les évolutions des stratégies de consommation à venir est l’objectif principal de l’étude d’Anne-Charlotte Dockès (Institut de l’élevage). À travers cinq scénarios prospectifs, qui donnent une vision chacun de ce que serait l’agriculture demain si une typologie de consommateurs était dominante (pro-élevage, progressistes, fast-food, végan, etc.), l’étude donne aux filières animales des outils pour établir des stratégies pour les années à venir. Autre sujet sociétal complexe, la prédation du loup. Dans le Sud aveyronnais, l’Inra a conduit une étude de grande ampleur pour évaluer le coût de la protection des troupeaux de brebis face aux loups. En reprenant les outils de protection envisagés par le plan d’action national loup (chien de protection, surveillance humaine, clôture, etc.), les chercheurs ont pu chiffrer ce que va coûter la prédation aux éleveurs. De même, plusieurs scénarios d’avenir ont été imaginés sur la conduite des troupeaux (maintien du pâturage, brebis à l’intérieur toute l’année, etc.) et les changements que cela pouvait occasionner au niveau écologique, économique et en termes de charge de travail pour les éleveurs.

Sélectionner des animaux sur l’efficacité alimentaire

Jusqu’à maintenant, la sélection génétique des animaux portait principalement sur la performance des animaux. Aujourd’hui, la demande se porte plutôt vers des animaux efficaces, c’est-à-dire qui valorisent bien l’alimentation tout en limitant les émissions de polluants, gaz à effet de serre et résidus azotés notamment. Pour mettre en place cette sélection, l’Inra a mesuré la consommation résiduelle, c’est-à-dire l’ingestion réellement observée auquel on retire l’ingestion théorique calculée en fonction du poids des animaux ou de leur croissance. On retrouve alors des animaux efficaces et d’autres, gaspilleurs, qui mangent plus que ce qu’ils devraient. Ce caractère efficace ou gaspilleur peut se transmettre génétiquement d’une génération à l’autre avec une héritabilité assez forte.

À la ferme expérimentale du domaine de la Sapinière dans le Cher, l’Inra a choisi ses romanes les plus efficaces et les plus gaspilleurs pour créer deux lignées divergentes. La troisième génération vient de naître mais l’analyse sur la deuxième génération montre déjà une différence d’ingestion de 130 grammes de céréales et de 100 grammes de fourrages par jour entre les deux populations. Tout en mangeant moins, les animaux « efficaces » ont des niveaux de croissance équivalents aux « gaspilleurs ». Ces différences d’efficacité pourraient être liées à la capacité de l’animal d’accueillir dans son rumen différents microbiotes. Ainsi, les plus efficaces avaient davantage de bactéries fibrolytiques dans leur rumen. Pour affiner et poursuivre ces recherches, la ferme expérimentale s’est dotée de distributeurs automatiques qui pèsent les animaux et mesurent les gaz émis.

Les plus lus

Darius Filipiak, 29 ans, s'est installé dans le Lot après un CS ovin et plusieurs expériences professionnelles en élevage ovin.
« J’arrive à vivre avec mes 250 brebis, élevées en plein air intégral »
Darius Filipiak, 29 ans, passionné par l’élevage de brebis, s’est installé en 2019, à Montcuq dans le département du Lot, avec…
Les éleveurs de brebis laitières des Pyrénées-Atlantiques s'investissent pour trouver des pistes d'adaptation de leur activité face au changement climatique.
Changement climatique : la filière lait de brebis des Pyrénées Atlantiques prend la mesure de l'enjeu
L'interprofession lait de brebis des Pyrénées-Atlantiques dans un projet franco-espagnol à la recherche de pistes pour adapter…
Benoit Toutain, 17 ans et originaire de l'Oise, a été sacré meilleur jeune berger 2024 lors de la finale des Ovinpiades, le 24 février, à Paris.
Salon de l’Agriculture : Le meilleur berger de France 2024 vient de l’Oise
Le champion de la 19e édition des Ovinpiades, Benoît Toutain, est originaire de l’Oise et possède déjà son propre troupeau.
Baptiste Soulat, 27 ans, s'est installé en Haute-Vienne sur l'exploitation paternelle. Passionné par la génétique, il est devenu sélectionneur en Suffolk.
« J’ai concrétisé ma passion pour la génétique et la Suffolk sur la ferme de mon enfance »
Baptiste Soulat, 27 ans, s’est installé sur l’exploitation bovine de son père en Haute-Vienne, créant du même coup l’atelier…
Parmi les céréales qui peuvent être distribuées aux brebis, l'avoine est la moins énergétique et n'est pas acidogène.
Quelles céréales intégrer dans la ration des brebis ?
Les céréales sont des concentrés d’énergie qui sont essentiels dans la ration des brebis selon leur stade physiologique. Tour d’…
Légende
"Nous avons choisi le pastoralisme itinérant"
Après avoir été bergers durant cinq ans, Juliette Martorell et François Oriol pratiquent depuis deux ans le pastoralisme…
Publicité
Titre
Je m'abonne
Body
A partir de 93€/an
Liste à puce
Accédez à tous les articles du site Réussir Pâtre
Consultez les revues Réussir Pâtre au format numérique, sur tous les supports
Ne manquez aucune information grâce à la newsletter Réussir Pâtre