Améliorer son autonomie alimentaire avec les cultures fourragères d’été
Les fourrages d’été sont des espèces particulièrement adaptées aux conditions météorologiques estivales, avec un meilleur rendement photosynthétique, notamment en présence de luminosité et de températures élevées.
Les fourrages d’été sont des espèces particulièrement adaptées aux conditions météorologiques estivales, avec un meilleur rendement photosynthétique, notamment en présence de luminosité et de températures élevées.
« Avec le changement climatique, on observe un pic de production de biomasse précoce, en avril plutôt qu’en mai. Pendant l’été, il n’y a pas de production de biomasse et celle-ci reprend plus tardivement à l’automne, d’où la nécessité de se tourner vers des espèces végétales qui répondent mieux à ces évolutions climatiques », décrit Clémentine Bourgeois, d’Arvalis. Les plantes en « C4 » ont un meilleur rendement photosynthétique dans les conditions estivales, ce qui amène à les nommer « cultures fourragères d’été ».
Dans le cadre du projet Cap Protéines, plusieurs essais ont été conduits sur toute la France. La ferme de Carmejane (Alpes de Haute-Provence) a participé aux dispositifs d’essais de démonstration. Cela consiste en l’implantation de différentes espèces de graminées et de légumineuses. En première observation, les légumineuses fourragères sont beaucoup moins productives que les graminées fourragères estivales.
Sorgho et teff-grass s’adaptent à notre climat
En moyenne la récolte des légumineuses était autour de quatre tonnes de matière sèche (MS) par hectares, contre 10 tonnes MS/ha pour les graminées. Le teff-grass est intéressant à implanter l’été car sa croissance nécessite beaucoup de chaleur. La première coupe va pouvoir être réalisée à 50 jours après semis, puis tous les mois. Cependant il a besoin de beaucoup d’eau au démarrage et il craint le froid. D’autres espèces, plus tropicales ont également été testées, telles que le Lablab ou le Campi. « Ce sont des variétés trop exotiques, nous n’avons pas ici les paramètres qui leur conviennent pour leur développement, autant en termes de climat, d’environnement que de microsphère », pointe Clémentine Bourgeois. Le sorgho est l’espèce de graminée la plus productive en condition estivale.
Pour estimer au mieux le potentiel des différentes variétés de sorgho, des essais ont été réalisés en élevage bovin laitier à Gap (Hautes-Alpes). Cinq variétés ont été mises sur le banc d’essai, sur un hectare chacune : Piper, Latte, Sherkan, Honey Graze et Octane. Après un travail du sol rigoureux, l’implantation a eu lieu le 22 mai 2024 avec une densité de semis de 25 kg/ha. « Pour les variétés BMR, reconnaissables à la nervure centrale brune que l’on observe sur les feuilles, on recommande plutôt un semis à 30-35 kg/ha », souligne Gaëlle Roubaud, de la coopérative Duransia, qui a supervisé les essais.
Combiner sorgho BMR et non BMR
Au moment du démarrage, les observations ont montré un net décalage de croissance entre les sorghos BMR, qui sont plus feuillus, plus petits, plus grosse valeur alimentaire et moins lignifiant, mais plus tardifs, et les autres. Il faut compter une quinzaine de jours pour que les BMR rattrapent leur retard. À noter que le sorgho est toxique à moins de 50 cm.
Concernant les valeurs alimentaires, les niveaux d’énergie (UFL) sont assez proches entre les variétés, allant de 1,15 à 1,18 (l’étude ne fournit pas de donner pour la variété Sherkan, qui s’est mal développée). Les variétés BMR présentent un taux de protéines supérieur, soit autour de 10 points de plus par rapport aux variétés non BMR. Les variétés BMR sont également un peu moins encombrantes. L’éleveur confirme ces mesures en observant une nette augmentation de la production de lait (+ 1,5 litre/jour/vache) lors du passage aux variétés BMR en affouragement en vert.
Peu d’irrigation et un itinéraire simplifié
« Quand on dispose de suffisamment de surfaces, il va être intéressant de faire du sorgho Piper pour attaquer la saison puis passer sur des variétés BMR pour prendre la suite », explique Gaëlle Roubaud. La technicienne rappelle de ne pas se laisser déborder par la pousse du sorgho, car cette graminée va se lignifier, empêchant la consommation des tiges par les animaux. « Le sorgho est devenu très populaire dans les départements alpins du sud car les besoins en irrigation sont très faibles et l’itinéraire technique est plus simple à raisonner que pour du maïs fourrage par exemple », conclut-elle.
Retour à Carmejane. D’autres essais ont été conduits en méteils fourragers, qui sont intéressants pour leurs rendements mais les valeurs alimentaires peuvent être parfois médiocres. Les essais de Carmejane avaient pour objectifs de livrer des premières références de valeurs alimentaires suivant les stades de récolte.
Un mélange du commerce (mélange M-protéique Jouffray – Drillaud) a été implanté à l’automne 2022 et un mélange de vesce – avoine simple à l’automne 2023. Trois stades ont été observés. Pour les céréales : montaison – début épiaison – fin floraison et pour les légumineuses : bourgeonnement – début floraison – début du développement de la gousse. La production de matière sèche était deux fois plus importante au stade fin floraison/grain laiteux des céréales par rapport aux précédents stades. Vu les valeurs alimentaires relevées, il ne semble pas intéressant de faire une récolte précoce pour alimenter des brebis allaitantes. Une récolte au stade fin floraison, qui correspond dans les deux cas à la période fin mai – début juin, semble permettre d’obtenir des fourrages de qualité.