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Les interactions entre antibiotiques et désinfectants confirmées dans l’eau de boisson

Une récente étude de l’Agence nationale du médicament vétérinaire (ANMV) confirme que le chlore et le peroxyde d’hydrogène dégradent certains antibiotiques en fonction des caractéristiques de l’eau utilisée.

Deux substances actives semblent plus sensibles : l'amocilline et la colistine
© réalisé par Réussir Volailles

La vérification de la compatibilité entre les désinfectants et les antibiotiques administrés via l’eau de boisson ne fait pas encore partie des exigences européennes actuelles de leur autorisation de mise en marché, mais cela pourrait évoluer avec une réglementation européenne à venir. C’est dans cette optique que l’ANMV, en partenariat avec l’Itavi, l’Institut technique du porc et la SNGTV, a vérifié dans le  temps (jusqu’à 36 heures) les pertes de concentrations de dix spécialités antibiotiques du commerce (deux par substance active) mises en présence de peroxyde d’hydrogène (à 50 ppm) stabilisé à l’acide orthophosphorique ou d’hypochlorite de sodium (eau de javel) dosée à 0,5 ppm de chlore actif. Le test a été réalisé avec deux eaux standardisées (douce et acide, dure et basique). Deux concentrations antibiotiques étaient testées pour simuler une solution mère concentrée , ou dilués une solution diluée à 5% pour simuler une distribution dans le circuit.

 

Le chlore plus impactant  que le peroxyde

 

Parmi les cinq substances actives testées (amoxicilline, colistine, doxycycline, sulfamides-TMP, tiamuline), seules les spécialités sulfamides-TMP montrent une stabilité sans faille, quel que soit le désinfectant et la dureté.

Le peroxyde d’hydrogène n’interfère qu’avec l’amoxicilline, avec une perte de concentration d’environ 30 % à 24h et jusqu’à 70% à 30h dans une eau diluée. Une spécialité commerciale y est plus sensible, sans doute en lien avec l’excipient. Les effets sont plus marqués dans l’eau dure..

L’acide hypochloreux impacte moins les antibiotiques en eau douce qu’en eau dure, seule la colistine étant réduite avec une perte au maximum de 26% après dilution. En eau dure toutes les formulations antibiotiques sont affectées (de 15 à 35 %), avec la colistine pouvant être aux trois quarts inactivée. Le protocole expérimental pourrait en partie expliquer ce résultat. En effet, à pH 8 le chlore est surtout sous forme d’ion hypochlorite et non d’acide hypochloreux. Pour obtenir 0.5 ppm d’acide hypochloreux au pH 8, il a fallu tripler la dose d’eau de Javel. Comme l’ajout d’antibiotiques a abaissé le pH,  le taux de chlore libre a remonté. D’où l’inactivation supplémentaire d’antibiotique liée à l’excès de chlore. En pratique, cette situation devrait peu se rencontrer en élevage, puisque l'usage du chlore n’est pas recommandé dans une eau basique.

 

Plus complexe à interpréter en élevage

 

Pour finaliser son étude, l’ANMV a testé son protocole sur une eau provenant d’un puits, riche en fer et en manganèse (deux fois le maximum recommandé en eau potable). Trois antibiotiques (amoxicilline, tiamuline ou doxycycline) ont été testés avec du peroxyde. L’amoxicilline et la tiamuline ont eu un comportement similaire qu’avec les  eaux de laboratoire. Des concentrations fortes en fer et manganèse ne semblent pas affecter leur stabilité. Par contre, celle de la doxycycline s’est fortement dégradée. Pour expliquer ce résultat contradictoire entre les eaux de terrain et de laboratoire, l’ANMV invoque « une interaction complexe entre le biocide, les minéraux, la flore bactérienne (contamination à la suite de pluies) ou d’autres éléments non explorés. » Elle en conclut qu’ « en situation réelle, la stabilité des antibiotiques revêt un caractère plurifactoriel et complexe. » Il faudrait donc chercher à avoir une eau de boisson la plus stable possible et proche des critères de l’eau consommée par les humains. Par ailleurs, l’Anses souligne que ces résultats ne peuvent être extrapolés à toutes les spécialités contenant ces substances actives, puisque deux seulement ont été testées par molécule. L’étude complète est accessible sur le site de l’Anses.

 

Cinq recommandations pratiques aux prescripteurs

  1. Connaitre les caractéristiques physico-chimiques de l’eau utilisée et sa teneur en chlore actif ;
  2. Connaitre les facteurs influençant la stabilité des spécialités vétérinaires (tenir compte du pH, du désinfectant utilisé, de sa concentration). Par exemple, ne pas dépasser 0.5 ppm de chlore actif ;
  3. Vérifier la solubilité de l’antibiotique par l’absence de particules en suspension ;
  4. Préparer une solution destinée à être bue entièrement en 12 heures si possible ou en 24 heures au plus ;
  5. Purger l’ensemble du circuit avant l’administration de l’antibiotique pour que les animaux boivent l’eau médicamenteuse en temps réel.

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