Le lablab, une légumineuse tropicale qui s’associe bien au maïs
Le lablab forme des lianes qui s’enroulent sur les tiges du maïs. Par rapport à un soja ou à un trèfle dans cette configuration, il a un fort développement végétatif et s’ensile sans difficulté. Pour l’instant, son intérêt nutritionnel pour les bovins n’est pas bien connu en France.
Le lablab forme des lianes qui s’enroulent sur les tiges du maïs. Par rapport à un soja ou à un trèfle dans cette configuration, il a un fort développement végétatif et s’ensile sans difficulté. Pour l’instant, son intérêt nutritionnel pour les bovins n’est pas bien connu en France.
Le lablab – appellation scientifique lablab purpureus - est une légumineuse annuelle originaire d’Afrique. Si cette espèce n’est plus utilisée ni même connue en Afrique, elle est assez couramment rencontrée aux USA, cultivée en pur comme couvert. En Amérique latine, elle est semée en association avec du maïs ou du sorgho. En Australie, elle est conduite en mélange ou en pur, et récoltée en ensilage et en foin. Le lablab est également parfois pâturé, dans le respect des précautions d’usage s’appliquant à une légumineuse, et se révèle appétent avec ses larges feuilles. « Pour tester cette culture en France, nous avons d’abord mené un essai au Pays basque », explique Yann Cannistraro, de Semental. Par rapport à un trèfle associé à un maïs, son développement végétatif s’est montré très supérieur. L’année suivante, le lablab a été essayé un peu partout en France, en particulier dans le Nord-Est, en Bretagne et en Pays de la Loire. « Il s’est toujours développé, quelles qu’aient été les conditions de température et de sécheresse. » Il est conseillé d’attendre que la température du sol atteigne 10 à 12 degrés pour semer. Le semencier commercialise depuis maintenant deux ans la variété de lablab appelée Rongaï. L’an prochain, une ou deux autres nouvelles variétés seront proposées. Il y a très peu de sélection sur cette espèce. « Pour l’itinéraire cultural, nos équipes et nos clients conseillent les éleveurs en fonction des expérimentations que nous avons menées ces deux dernières années. Nous ajustons cet itinéraire suivant les contraintes pédo-climatiques », précise Yann Cannistraro.
Poids de mille grains et taille de graine semblables à ceux du maïs
Le lablab a le grand avantage d’avoir à peu près les mêmes poids de mille grains et taille de graine que le maïs. On peut ainsi semer ces deux espèces en mélange sur le même rang, en un seul passage. On peut aussi semer le lablab sur l’interrang, après avoir semé le maïs. En France, le lablab a levé en même temps que le maïs ces deux dernières années. Il ne fleurit pas avant la récolte du maïs et il n’y a donc jamais de graines dans l’ensilage. C’est une bonne chose, car les graines doivent être toastées ou cuites pour être consommées par les bovins (comme celles du soja). « On a pu remarquer sur plusieurs parcelles que le maïs était plus vert quand il est associé au lablab, mais on ne sait pas expliquer encore pourquoi, note le semencier. Ce peut être dû à la meilleure couverture du sol, ou bien à l’azote apportée par la légumineuse. »
Le lablab se développe en lianes qui grimpent sur le maïs. " Les premières expérimentations ont amené à se poser la question d'une concurrence entre les deux espèces, vu la masse de végétation développée par le lablab. Ce phénomène a été étudié dans les pays tropicaux, et l'itinéraire cultural a été adapté en conséquence. Ceci étant, en conditions françaises et en respectant les préconisations de semis, notre expertise nous permet de penser que cette légumineuse pousse en symbiose avec l'hybride, sans le gêner. Nous faisons un essai cette année pour mesurer cet effet sur la richesse en amidon de l’ensilage. Nous pensons que l’impact n’est pas important par rapport à l’intérêt de cette plante. » Pour déterminer la date de récolte, on ne s’occupe que de l’état du maïs. Les lianes peuvent avoir un tel développement qu’elles passent d’un rang de maïs à l’autre, mais il n’y a pas de quoi se laisser impressionner. « Cela ne verse pas, et aucune difficulté sérieuse n’a été relevée pour ensiler, rassure Yann Cannistraro. Cela ne prend pas plus de temps qu’ensiler un maïs seul, et le silo est constitué de façon classique. »
Il n’existe pas encore de référence pour la valeur alimentaire du lablab avec la technologie d’analyse par infrarouge. « Pour l’instant, on se base sur des publications scientifiques australiennes et africaines. Nous avons fait trois analyses chimiques qui concordent avec ces chiffres. » Le semencier annonce une teneur en MAT de 150 à 170 g/kg MS. « Nous effectuons des analyses chimiques, comme nous l’avions fait pour le sorgho BMR il y a quelques années, et pour la prochaine campagne nous disposerons de nombreux résultats à communiquer », annonce Semental.
Le cow pea se développe en buisson
Semental propose une autre légumineuse tropicale annuelle : le cow pea (vigna unguiculata). « Le cow pea a un port érigé. Il monte à hauteur de 80 cm à 1,20 m en formant comme un buisson, puis en fin de cycle il fait des lianes », explique Yann Cannistraro. Le cow pea a le même poids de mille grains et la même taille de graine que le sorgho ensilage. Cette espèce peut aussi être semée en interrang d’un maïs associé à du lablab sur le rang. C'est souvent le choix des éleveurs en bio. En effet, le cow pea limite considérablement le développement des adventices. " Il étouffe ce qu'il y a dessous. C'est un véritable désherbant naturel. " Semental dispose d’une variété pour l’instant, Black Stallion, et prévoit de développer la gamme l’an prochain.
" Le lablab est à la mode "
Thierry Gallet, de l'EARL de Parigné, dans le Maine-et-Loire, cultive pour la deuxième année cinq hectares de lablab en association avec du maïs, dont une partie en irrigué. " Le lablab est impressionnant par son développement. L’an dernier, il dépassait le maïs d’un mètre. Cette année, ils faisaient la même hauteur ", témoigne-t-il.
Les semis ont été faits en deux temps mi-mai. L'éleveur a d’abord semé le lablab (à la densité de 88 000 pieds par hectare) avec un semoir à céréales couplé à la rotative, en alimentant un rang sur deux. Puis le maïs a été semé deux jours plus tard, à la densité de 95 000 pieds par hectare. " La semence de lablab m’a coûté 4,50 €/kg, ce qui revient à 100 €/ha. Il a bien levé, mais un peu moins bien là où il y avait davantage de mottes. J’ai effectué un désherbage en prélevée du maïs. Il était grand temps car le lablab a levé le lendemain ! Cela ne l’a pas pénalisé. Par contre, il n’a pas résisté au désherbage de rattrapage que j’ai dû faire dans quelques ronds de chardons. "
Pas de souci de conservation au silo
Le semencier annonce une teneur de 15 % de MAT pour le lablab, mais difficile de savoir quel est l’impact sur la valeur du mélange récolté. Tout dépend de la proportion de lablab dans le mélange. " J’ai fait des analyses chimiques l’an dernier et on n’a pas vu de différence de MAT entre le maïs cultivé en pur et le mélange. Je n'ai rien observé non plus au niveau des performances du troupeau " , précise l'éleveur. La conservation au silo n’a pas posé de souci particulier.
Cette année, Thierry a comptabilisé au champ la densité de maïs et lablab. " J'ai compté huit pieds de lablab et neuf pieds de maïs par mètre carré. " En poids brut, un pied de lablab (250 g) représente 30 % du poids d'un pied de maïs en vert (860 g).
" J'attends de voir ce que ça va donner cette année avant de savoir si je vais en resemer, conclut l'éleveur. J'ai surtout voulu tester le lablab pour voir ce que ça donne. Mais finalement, je me demande s'il ne vaut pas mieux miser sur un bon ensilage d'herbe. "