Un colon rebelle et récidiviste

debout grâce à la morphine.
« Lorsque Raymond part en vacances, il se passe systématiquement quelque chose ! ». C’est ainsi que son père, nommé superviseur du troupeau, m’accueillit au pied de cette multipare vêlée depuis quelques mois, qui du soir au matin n’a plus une goutte de lait et refuse de se nourrir. Sortie de la salle de traite, elle s’est couchée illico et quelques heures plus tard elle est exactement dans la même logette.
Il a fallu insister pour qu’elle se lève afin de l’examiner : ni fièvre, ni anomalie cardiaque ou respiratoire, la panse creuse et au ralenti, sans une bouse dans le rectum et pourtant avec un petit ventre rond et un bruit bien liquidien du côté des boyaux. Voilà qui oriente vers une occlusion intestinale… J’en fus certain après avoir perçu par voie rectale une franche anomalie dans l’agencement des intestins.
DES BOYAUX VRILLÉS
Y a-t-il autre chose à faire que d’aller voir ce qui se passe ? Le temps de trouver du renfort et de rassembler le matériel spécialisé, la voici le ventre ouvert. Une grande partie de l’intestin est effectivement remplie de fèces et de gaz tandis que le reste est parfaitement vide. L’inspection révèle aussi qu’une anse du colon subit une torsion sur elle-même de sorte que l’intestin bien plein avant l’obstacle devient bien vide après. Pour corriger ce problème il n’y a qu’à détordre le colon qu’il faut d’abord vidanger partiellement. Mais pour le vidanger il faut pouvoir l’amener dehors et pour l’amener, il faut remettre le caecum à sa place. Pour que le caecum puisse revenir à sa place, il faut avant détordre le colon… Dans les intestins, tout se tient !
La vache patiente et tient vaillamment debout grâce à la morphine. Au bout d’un moment, nous y voilà… la vrille se détord et les boyaux reprennent leur place. Le temps de refermer la plaie, la vache se met à bouser. Parfait ! Sauf que trois semaines plus tard, elle récidiva… en pire.