Trois conditions pour qu’un marché à terme fonctionne
Alors que le secteur laitier commence à s’intéresser à cet outil pour limiter les effets de la volatilité, retour d’expérience de la filière grain.
Alors que le secteur laitier commence à s’intéresser à cet outil pour limiter les effets de la volatilité, retour d’expérience de la filière grain.
Dans le blé, le marché à terme ne s’est pas fait du jour au lendemain ; il a fallu une dizaine d’années, rappelle Jean-Loïc Bégué-Turon, en charge de l’activité matières premières agricoles chez Caceis (groupe Crédit agricole)(1). Il fonctionne depuis dix ans. La filière blé ne peut plus s’en passer aujourd’hui : toutes les transactions au sein de la chaîne se traitent en référence au marché à terme. »
C’est un marché financier qui n’est pas fait pour les spéculateurs. « Il est fait pour que chaque maillon de la chaîne, indépendamment l’un de l’autre, puisse aller couvrir son prix de revient, fixer un prix objectif et gérer sa marge » . Les producteurs y accèdent via leur coopérative, le collecteur privé ou directement. « La fin en soi n’est pas de faire ouvrir un compte de marché à terme à tous les producteurs, mais toute la filière doit s’y intéresser : c’est une boîte à outils qui fonctionne uniquement si tout le monde se met à l’utiliser».
Couvrir son prix de revient et gérer sa marge
« Aujourd’hui, les marchés à terme du lait ne fonctionnent pas très bien, notamment en Europe ». Celui lancé par Euronext il y a quelques années a été « un fiasco total ». Mais les Allemands sont en train de s’y mettre. En France, des formations producteurs vont être organisées par l’Ifocap avec Agritel à l’initiative de la FNPL. « Trois conditions sont nécessaires pour qu’un marché à terme fonctionne », affirme ce spécialiste qui gère 1200 comptes dont 900 pour des agriculteurs.
1- « Il faut qu’il y ait un environnement de prix favorable pour que tout le monde se réveille ». Sur le blé, le marché à terme s’est mis à fonctionner « quand le prix s’est mis à monter et baisser en 2007-2008 » et que « tout le monde a réclamé la même chose (un prix moyen) en même temps ».
2- L’ensemble de la filière doit être d’accord et accepter la transparence des prix : c’est le point clé. « Ce qui a bloqué la filière blé à certains moments , c’est la réticence d’acteurs dominants à accepter cette transparence, la compréhension de la construction de la marge des opérateurs. Il a fallu se battre y compris dans le monde coopératif ».
3- La formation est essentielle. Le problème de compétence est un point de blocage. "Il y a vingt ans, les premiers opérateurs de la filière grain sont allés sur le marché à terme pour ne pas stocker. Il ne sert pas à çà ! ».
(1) Lors de l’AG de la FNPL le 15 mars 2018.