«Tous les détails comptent pour gagner du temps»
Dans le Maine-et Loire, Patrick Drouin et Jean-François Cogné accordent tous deux une grande importance à l’organisation du travail. Tout est réfléchi pour être efficace.
Dans le Maine-et Loire, Patrick Drouin et Jean-François Cogné accordent tous deux une grande importance à l’organisation du travail. Tout est réfléchi pour être efficace.
Notre objectif est de produire sereinement 800 000 litres de lait à deux tout en maîtrisant les coûts de production », déclarent Patrick Drouin et Jean-François Cogné, associés du gaec Toucheronde(1), à Andard dans le Maine-et-Loire. Créé en 1994 par regroupement des deux exploitations familiales, le gaec compte 85 vaches laitières et 178 ha, dont 80 ha de blé, 20 ha de colza, 50 ha de maïs, le reste en herbe. Après l’installation d’un premier robot de traite en 2009, il a eu l’opportunité en 2015 de reprendre du lait. Le choix a été fait de vendre le premier robot et d’en installer un nouveau à deux stalles, sans dépasser 85-90 vaches. «Quand un robot est saturé, on passe du temps à pousser les vaches, estiment les deux associés. Nous ne voulons pas augmenter les volumes mais gagner en efficacité et en prix du lait.»
Rationnaliser le travail grâce à la réorganisation du bâtiment
L’exploitation étant en zone périurbaine, avec seulement 2 ha autour des bâtiments, seules les génisses et les vaches taries vont au pâturage. «Comme les vaches passent beaucoup de temps à l’intérieur, l’organisation du bâtiment est essentielle», soulignent les éleveurs. L’installation du robot a été l’occasion d’une réorganisation des bâtiments permettant de rationaliser le travail. Les vaches et les génisses sont installées de part et d’autre du couloir central, les vaches dans des logettes, les génisses par lots sur litière accumulée. «Ainsi, quand on surveille les vaches, on peut surveiller les génisses en même temps.» La nurserie, auparavant située dans un appentis, a été ramenée près des logettes et du robot, dans un bâtiment créé à cette occasion. Les box à vêlage, équipés d’une caméra de surveillance, sont également installés dans ce bâtiment. «On peut ainsi surveiller les veaux et les vêlages en même temps que l’on travaille au robot.» Les silos et le stockage des tourteaux et minéraux sont tous proches de la stabulation, ce qui permet de charger le bol et de distribuer rapidement.
Une grande attention est également portée à l’organisation du travail. Le matin, un associé s’occupe de l’alimentation des vaches et des génisses, du paillage et du raclage. L’autre nettoie les logettes, y apporte éventuellement de l’asséchant et s’occupe du robot et des veaux. Le travail est fait en 1h30. Les tâches, qui peuvent toutes être faites à une personne, sont alternées une semaine sur deux entre les deux associés. «Cela évite la lassitude et permet d’être au courant de tout et donc d’être plus polyvalent et de faire plus facilement face à un imprévu.» Les changements se font le le lundi soir, ce qui leur donne la journée du lundi pour informer l’autre de ce qui s’est passé le week-end.
La même alternance, moins formalisée, se retrouve pour les travaux des champs. La moisson, l’ensilage et bientôt le bottelage sont toutefois délégués à entreprise. «Jusqu’à présent, nous faisions le bottelage en Cuma. Mais avec la diminution de l’élevage dans cette zone périurbaine, le choix, à l’heure du renouvellement du matériel, a été de ne pas réinvestir. Cela nous fera aussi gagner du temps car c’est une Cuma sans chauffeur et nous devions conduire la botteleuse.»
Simplifier les tâches quotidiennes et automatiser
Tout est réfléchi pour simplifier le travail. Les rations sont simples : 2/3 de maïs, 1/3 d’herbe et du tourteau de soja ou colza pour les vaches, 1/3 de maïs, 1/3 d’enrubannage, 1/6 de foin et 1/6 de paille pour les génisses. La même ration est distribuée de 10 à 24 mois, en augmentant les quantités. Des passages canadiens aux entrées du bâtiment permettent de ne pas perdre de temps avec des barrières. Les bottes de paille, apportées toutes les trois semaines, sont stockées sur les logettes puis reprises à la fourche.
L’automatisation et les équipements sont également une aide précieuse. Le robot, outre la traite, est utilisé pour la détection des chaleurs des vaches et des génisses, celles-ci étant équipées d’un collier dès 12 mois. «La fiabilité atteint 90% et nous n’avons plus à surveiller les chevauchements.» Les éleveurs se fient aussi au robot pour détecter les vaches à problème. «Ainsi, nous avons plus de temps pour nous occuper des 10-15 vaches qui en ont besoin.» L’exploitation est aussi équipée de racleurs pour les vaches et les génisses et d’un robot qui repousse l’aliment 7 fois par 24 h. «On n’a plus à s’en occuper et cela évite le gaspillage.» La nurserie de 25 places est équipée d’un DAL et d’un DAC qui limitent le travail et facilitent les transitions alimentaires. Enfin, les éleveurs utilisent Ori-automate, logiciel d’échange de données entre le logiciel de l’éleveur et la base de données régionales, qui évite les doubles saisies.
Le travail d’astreinte limité à 3,5 heures par associé
Au final, le travail d’astreinte est limité à 3,5 h par associé par jour. «En général, nous travaillons de 6h30 à 19h, avec une grande souplesse pour les rendez-vous, les enfants. Et nous prenons chacun un week-end sur deux, deux semaines de vacances l’été, en juin et en août, et une semaine l’hiver.» L’été est la période de pointe. Les vêlages, s’ils ont lieu toute l’année, sont concentrés surtout de juin à septembre. «Cela représente un pic de travail, mais les veaux sont moins malades quand il fait beau. De plus, comme notre objectif est de faire vêler à 24 mois, il est difficile de décaler les génisses.» Les travaux des champs les occupent aussi beaucoup de juin à novembre, notamment la moisson et l’irrigation. Depuis deux ans, le gaec fait donc appel au service de remplacement quand l’un des associé est en vacances. Et, dès cette année, il devrait embaucher un salarié de juillet à mi-août.
(1) Le Gaec Toucheronde a ouvert ses portes dans le cadre des rendez-vous de l’élevage organisés Elevage Conseil Loire AnjouAstuce d’éleveurs
Pour faciliter le nettoyage des cases à veau individuelles, les éleveurs ont eu l’idée de recouvrir le caillebotis d’un morceau de filet brise-vent. Au moment du nettoyage, il n’y a ainsi plus qu’à soulever le filet avec le fumier, à le vider dans une remorque et à le laver d’un coup de jet.
« L’organisation du bâtiment est un facteur clé »
« L’organisation du travail du gaec Toucheronde est très bonne. Le travail est rationalisé : chacun sait ce qu’il a à faire, les priorités. La clé du gain de temps d’astreinte est l’organisation du bâtiment. Avec un bâtiment compact, bien conçu, sans trop de barrières à ouvrir et fermer, on gagne vite du temps. Un système simple est également important. L’automatisation vient ensuite. Elle fait gagner du temps mais n’explique pas tout. Alors que le temps moyen d’astreinte par associé est de 4 h ou 4,5 h, ici il n’est que de 3,5 h. L’efficacité économique, avec deux robots pour 85-90 vaches, est assurée notamment par la maîtrise des charges. Les bâtiments sont en grande partie amortis. Les tourteaux sont achetés par camion benné, en soja ou colza selon les cours. La moyenne de production est de 9600 l/an et les éleveurs ne cherchent pas à l’augmenter à tout prix. La maîtrise de la qualité des fourrages permet aussi de limiter les concentrés apportés aux vaches et de ne pas en distribuer aux génisses. Le coût de concentré n’est que de 50 €/1000 l, au lieu de 70 € en moyenne. Les frais de maintenance sur le robot sont limités pour l’instant. Et les éleveurs ont aussi travaillé les frais vétérinaires.»