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Sélection : la contractualisation va se renforcer

L’évaluation génétique s’est toujours appuyée sur de gros volumes de données. Mais le nouveau règlement zootechnique européen va bouleverser la donne sur leurs modalités d’échanges et de valorisation.

Les éleveurs seront sollicités pour signer des contrats pour apporter des données aux entreprises de sélection et pourraient obtenir en retour des avantages.
© F. Mechekour

Le prérequis pour calculer des index, c’est la collecte des données en élevage (production, pointage…). Cela reste vrai même avec l’avènement de la sélection génomique en 2009. Le nouveau règlement zootechnique européen, qui sera mis en place en novembre 2018, prévoit la création d’organismes de sélection. Ces derniers devront gérer, en interne ou avec des partenaires, le schéma de sélection, le contrôle de performance… Le règlement va conduire à plus de contractualisation. « Il va créer une véritable rupture parce que nous allons passer d’un système mutualisé et administré à un système plus libéral. Quelle touche de mutualisation va-t-on garder ? C’est la question, souligne Michel Pivard, président de FEIA (1). Jusqu’ici, les données étaient mutualisées et accessibles à tous. Demain, il y aura des apporteurs de données qui contractualiseront avec les autres opérateurs. Les éleveurs seront sollicités pour signer des contrats, pour apporter des données aux entreprises de sélection et ils pourraient obtenir en retour des avantages comme l’accès en primeur à certains taureaux ou à des outils pour saisir et gérer leurs données. En revanche, cela risque d’être plus difficile pour ceux qui voudraient sortir du système et qui n’apporteraient pas de données. »

Les éleveurs sollicités pour signer des contrats

Il est encore trop tôt pour avoir une vision précise sur les stratégies qui seront mises en place dans les prochains mois. D’autant que la concurrence entre certaines entreprises de sélection et la poursuite des échanges entre les acteurs, ne poussent pas à dévoiler trop tôt sa stratégie. C’est notamment la position d’Évolution au moment où nous mettons sous presse 19 janvier). Quels que soient les scénarios retenus, « l’éleveur devra rester au centre du dispositif. Il fournit des données brutes qui doivent être agrégées et analysées pour être valorisées sous forme de services ou de publication d’index », explique Xavier David, directeur d’Allice. Le nombre important d’acteurs impliqués dans le dispositif génétique complexifie aussi la donne. L’un des rôles du réseau des Arsoé sera « de faciliter les échanges de données entre les acteurs qui seront d’accord pour le faire », précise Michel Pivard.

Dans tous les cas, l’intérêt de développer les partenariats ne fait aucun doute pour ne pas passer à côté d’opportunités pour Xavier David. « Les Européens ont abandonné leurs travaux sur le sexage de la semence pour se recentrer sur l’amélioration de la fertilité femelle. Depuis, il y A eu absence de réaction collective (sous forme de partenariat) sur un nouveau projet de R & D des coopératives européennes, voire avec les États-Unis pour apporter une alternative à la technologie commercialisée par la société américaine Sexing-Technologies, qui détient le brevet. Et nous payons cher aujourd’hui cette stratégie en versant des royalties à cette société."
Les partenariats se développeront aussi à l’international à l’image d’Interbull qui réalise des évaluations internationales et de la coopérative EuroGeomics qui regroupe sept organisations de sélection européennes en race Holstein.

Index santé du pied, acétonémie, efficacité alimentaire

L’innovation est un des principaux enjeux de ces rapprochements. Avec la sortie des prédicteurs génomiques de la santé du pied, Gènes Diffusion a proposé ses premiers « index maisons » dès 2014 en s’appuyant sur des données de parages remontées par des Ecel. Évolution a emboîté le pas en sortant un index acétonémie et de synthèse santé (officiels) l’été dernier dans le cadre du projet Génosanté. « Nous avons passé des accords, dont certains sont exclusifs, avec des entreprises de conseil en élevage, notamment dans les Hauts-de-France, mais également avec des entreprises privées à rayonnement national, voire mondial… », indique sans donner plus de précisions Gérard Heumez de Gènes Diffusion. L’entreprise de sélection va continuer sur sa lancée en valorisant les index génomiques de la santé du pied via la voie femelle d’ici le printemps prochain. « En reprenant la généalogie des femelles, on devrait pouvoir leur attribuer un indicateur de la santé du pied exprimé sous forme de pictogrammes. » Le CIA gènes diffusion propose également depuis décembre 2016 un outil d’aide à la décision permettant d’optimiser la réussite à l’IA grâce à la valorisation de données collectées sur sa zone d’activité. « Ses 7 500 adhérents peuvent être informés dès qu’ils appellent leur inséminateur grâce à une application gratuite disponible sur leur smartphone », souligne Gérard Heumez.

Développer des projets de R&D transversaux

De leur côté, Jura-Bétail et Jura conseil élevage fusionneront en décembre 2017, tandis que la chambre d’agriculture et le GDS apporteront une partie de leurs activités. Un des enjeux sera « de valoriser les informations collectées par les différentes structures et d’être en situation de collecter de nouvelles données pour compléter les services proposés aux éleveurs », explique Dominique Peinturier, directeur de Jura-Bétail. Des prédispositions génétiques à certains troubles de la santé, de la repro pourraient par exemple être détectées plus rapidement.

Le groupe Umotest développe quant à lui des partenariats avec plusieurs Ecel et des GDS intervenant sur sa zone d’activité historique (Bourgogne-Franche Comté, Auvergne-Rhône-Alpes…). « Nous construisons notamment des réseaux de collectes de données permettant à nos partenaires de développer de l’appui technique auprès des éleveurs et au groupe Umotest de lancer des projets d’évaluation de nouveaux prédicteurs génétiques », explique Mickaël Brochard d’Umotest. La mise en place depuis novembre 2015 d’un réseau de collecte de données de parages avec une douzaine d’équipes de pareurs (coop d’IA et GDS) en est une parfaite illustration. Un index dédié à la santé des pieds pourrait sortir en 2018. Par ailleurs, en avril 2016, Umotest et ses coopératives adhérentes se sont associés à trois GDS (départements 25, 70 et 90) et autant d’Ecel (CEL25-90, CEL70 et Fidocl) pour créer une nouvelle structure dénommée MO3. « Nous avions déjà tissé des liens informels avec ces différents partenaires depuis 2011. Mais nous sommes passés à la vitesse supérieure en créant cette nouvelle structure dont l’objectif est de développer des projets de R & D transversaux dans un esprit gagnant-gagnant. » L’étude des interactions entre la génétique et les systèmes d’élevage, la sortie de nouveaux index dédiés à la santé et l’efficacité alimentaire sont parmi les projets en cours ou à venir.

(1) Réseau des Arsoé en charge du développement des systèmes d’information et des logiciels qui leur sont associés.

Les pays scandinaves collaborent étroitement

Coopérer dans certains domaines tout en maintenant de la concurrence dans d’autres. Tel a été le choix du Danemark, de la Suède et de la Finlande. « Ces pays ont un programme de sélection commun en race Holstein, Rouge scandinave et Jersiaise, porté par Viking Génetics. C’est un bon exemple de co-construction dans lequel aucun pays n’a la majorité. Au départ, les Scandinaves mettent peut-être plus de temps pour prendre une décision, mais une fois qu’elle est prise, elle est partagée par tous », indique Xavier David, directeur d’Allice.

Une organisation très centralisée aux Pays-Bas

La coopérative CRV gère les programmes de sélection notamment en race Holstein, mais aussi le pointage, le contrôle de performance, la tenue du livre généalogique et l’appui technique auprès de ses adhérents. L’organisation de la collecte de données dans les 18 000 exploitations laitières et leur valorisation « est plus simple mais encore impossible à adopter en France », souligne Xavier David. CRV a par ailleurs des représentants dans une douzaine de pays (Allemagne, Brésil, USA…). Elle a développé des partenariats avec d’autres organisations de sélection européennes en race Holstein au sein d’EuroGénomics, avec des universités…

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