L’installation collective Desia25 de déshydratation d’herbe
Dans le Doubs, pour gagner en autonomie protéique,
cent vingt éleveurs ont initié la création de la SAS Desia25.
Ils récupèrent leur herbe sous forme de granulés d’herbe déshydratée.
(ensachage des granulés d’herbe et de bois), et le matériel de récolte.
Mieux valoriser toute leur herbe, et remplacer la VL18 de la ration hivernale par des granulés d’herbe déshydratée provenant de leur exploitation, est une des motivations des 120 éleveurs adhérents de Desia25. Mais c’est loin d’être la seule…
La SAS Désia25 est une jeune entreprise, regroupant 79 exploitations, deux scieries et quelques investisseurs privés sympathisants au projet. Son objet est la récolte, la déshydratation de l’herbe des adhérents et sa transformation en granulés, mais aussi la fabrication de granulés de bois (pellets).
En 2013, 1075 tonnes de granulés d’herbe ont été produites à partir de 600 hectares fauchés, 100 tonnes de maïs plante entière ont été transformées en granulés, et 1000 tonnes de bois transformées en pellets. « En 2014, nous monterons en volume », affirme Emmanuel Marguet, président de Desia25.
Desia25 est née de l’envie d’éleveurs laitiers de gagner en autonomie alimentaire, notamment protéique. L’exploitation moyenne adhérente est une ferme à 170000 litres de quota pour 40 à 45 vaches laitières, sous cahier des charges AOP morbier et mont d’or. Le cahier des charges exige un minimum de surfaces en herbe (au moins 1 ha/VL) et interdit une liste d’aliments (par exemple l’ensilage et l’enrubannage).
« Les élevages ne sont pas forcément autonomes en énergie. Nous n’avons donc pas cherché à développer la luzerne. Nous sommes partis sur la déshydratation de l’herbe pour constituer des stocks d’aliment à base d’herbe, équilibré en énergie et protéines », expose Emmanuel Marguet.
Cette herbe, aujourd’hui stockée et ramenée dans les rations hivernales, était mal valorisée auparavant. « Dans les parcelles éloignées, elle était perdue ou seuls quelques animaux la pâturaient, elle était rarement fauchée. »
Désia25 récupère de la chaleur dégagée par une usine d’incinération à deux kilomètres, qu’elle ne parvenait pas à valoriser l’été. « Nous avons un contrat sur quinze ans, pour une énergie très compétitive. » L’intégration de deux scieries permet de consolider le projet économique et d’assurer une activité toute l’année aux onze salariés de Desia25. Un partenariat a été trouvé avec un bûcheron qui fournit la main-d’oeuvre pour assurer la récolte et le transport de l’herbe et des granulés.
Une Commission environnement a rédigé un Document unique
Desia25 va encore plus loin, avec la création d’une Commission environnement où siègent des associations environnementales, et avec la rédaction par cette Commission d’un Document unique qui recense les objectifs des actionnaires. « Dès le début du projet nous avons fait entrer dans le débat des non-agriculteurs, associations, élus… Nous avons rédigé le Document unique en tenant compte de ces discussions », raconte Emmanuel Marguet.
Par exemple, la fauche précoce inquiétait les associations à cause de ses conséquences négatives sur la biodiversité. « Ils ont compris l’intérêt de la fauche précoce pour la protéine et pour réduire ainsi les besoins en concentrés. On en est arrivés à l’idée qu’il faut qu’elle soit compensée par des hectares conduits en fauche tardive, pour du foin de juillet. Au début, ce sera dur pour nous, avec un changement à mener dans l’organisation du travail, mais aussi dans la conduite des prairies (fertilisation, diversité des espèces prairiales). »
Des critères d’exclusion pour que les agriculteurs ne se transforment pas en marchands de granulés
Des critères d’exclusion de membres de la SAS sont recensés dans le Document unique : s’il n’y a pas de création de surfaces en fauche tardive, si une part trop importante de granulés d’herbe est vendue, s’il est constaté une hausse significative de la fertilisation (la qualité de l’herbe est inversement proportionnelle à la hausse des doses d’engrais)… Si trop de dérives sont constatées, l’agriculteur passe devant la Commission environnement qui décidera de son exclusion. « Nous ne voulons pas que les éleveurs se transforment en marchands de granulés, et qu’ils sortent de nos objectifs d’autonomie alimentaire et d’empreinte environnementale positive… », résume Emmanuel Marguet.
Selon le président, « le modèle idéal serait une ferme avec quelques hectares de prairies temporaires conduites en fauche précoce, pour la production de granulés. Et le reste de la surface en prairies permanentes, conduites de façon plus extensive, en fauche tardive, pour faire un foin diversifié. Nous avons constaté que les bio ont les meilleurs résultats. C’est lié au fait que même s’il y a un retard de quelques jours pour faucher, leur herbe perd très peu de valeur alimentaire. Les systèmes plus extensifs sont moins stressants et répondent à notre objectif de systèmes vivables. »
16 % de MAT en moyenne sur la troisième coupe 2013
En 2013, l’année de démarrage, la première coupe a eu lieu trop tard, les valeurs ont donc été décevantes : 10 à 12 % de MAT et 0,72 à 0,76 UFL. « Heureusement, la troisième coupe a révélé des analyses bien meilleures : 0,77 UFL et près de 16 % de MAT en moyenne, avec des valeurs pouvant atteindre 19-20 % MAT sur certains échantillons. »
Cette première année a été riche d’enseignements. Le groupe se rend compte que certaines prairies manquent de légumineuses, et qu’il faut ramener de la biodiversité dans certaines prairies pour améliorer la qualité alimentaire.
Chaque éleveur récupère son herbe en granulés
Les 79 exploitations détiennent des actions, à hauteur de 3 000 euros par agriculteur.
Chaque exploitation récupère son herbe en granulés, ce qui permet d’intégrer des bio au projet.
Chaque année, trois tours de récolte sont organisés. Pour chaque tour, chaque exploitation décide quels champs elle veut faire déshydrater. La difficulté majeure est de passer au bon moment chez chacun.
L’éleveur adhérent paie une prestation de service de 200 euros HT/tonne de granulé.