Projet Green Dairy
Les régions ne sont pas égales face au risque de pollution de l´eau
Projet Green Dairy
Le projet Green Dairy conduit dans cinq pays montre la diversité des milieux et des systèmes laitiers, et leur nécessaire prise en compte dans les réglementations européennes.
Des élevages laitiers ayant de forts excédents d´azote ne sont pas synonymes de mauvaise qualité de l´eau dans leur région, et inversement. C´est ce que montrent les résultats du projet Green Dairy, qui s´est intéressé à neuf régions de l´axe atlantique, regroupés ici en trois zones.
Ce constat s´explique par la grande diversité des milieux et des systèmes d´élevage, de l´Irlande au Portugal. Il conduit les scientifiques et les experts à conclure que « face à une réglementation environnementale commune (directive nitrates et directive cadre sur l´eau) et contraignante, cette diversité justifie des adaptations régionales pour une meilleure efficacité écologique et économique. »
La Bretagne, milieu sensible, doit être économe
Dans cette étude, la Bretagne et les Pays de la Loire présentent les eaux de plus mauvaise qualité alors que les élevages laitiers étudiés affichent les plus faibles excédents d´azote (environ 100 kg d´azote par hectare). L´Ouest de la France est un milieu à risque, avec une large part de sols limoneux-sableux favorables au lessivage des nitrates, et une SAU qui valorise deux tiers du territoire, peu de forêts, une part importante de cultures annuelles et une forte densité d´élevages intensifs.
D´autre part, les efforts en matière de gestion des effluents et de réduction de la fertilisation minérale sont encore récents : il y a un décalage de 10 à 20 ans entre le moment où l´azote se perd dans le sol et celui où l´on peut constater une modification des teneurs en nitrates dans l´eau. « Avec l´évolution des pratiques de fertilisation observées et le traitement des lisiers, les simulations montrent que les excédents vont se réduire sensiblement et que la qualité de l´eau va s´améliorer dans l´Ouest. mais il faudra plus d´efforts ici que dans les autres régions d´Europe pour descendre en dessous de 25 mg/l de nitrates, voire 10 à 15 mg, pour résoudre le problème des algues », résume André Pflimlin, de l´Institut de l´élevage.
Le climat, avec des étés séchants, est moins avantageux que dans le Nord de l´Europe ou en Galice.
Les systèmes laitiers herbe et maïs de l´Ouest génèrent des fuites de nitrates après le retournement des prairies. Ainsi, dans les fermes expérimentales de Trévarez et de Derval, entre 30 et 50 % de l´azote en excédent part dans l´eau. Comment améliorer la qualité de l´eau en Bretagne ? « L´Ouest de la France, très tôt confronté au problème de la qualité de l´eau, a une longueur d´avance en matière de mise aux normes et de gestion des effluents. Il reste néanmoins des marges de progrès, pour réduire au maximum la fertilisation minérale sans pénaliser le rendement. » Passer les systèmes d´élevage laitier bretons en tout herbe est-il une solution ? « On gagnerait sûrement en qualité de l´eau, mais il ne faudrait plus labourer les prairies. »
Au Nord, les prairies pérennes protègent l´eau
Au Nord-Ouest de l´Europe, la qualité de l´eau est bonne, alors que les élevages laitiers irlandais et britanniques dégagent des excédents d´azote deux fois plus importants que dans l´Ouest de la France.
Ces élevages sont intensifs, avec plus de 2 UGB par hectare. Ils utilisent environ 250 kg d´azote minéral et ont des excédents de 200 à 250 kg d´azote par hectare, car ils ont des capacités de stockage insuffisantes pour réduire les achats d´engrais. « Mais on ne retrouve que 10 à 20 % des excédents d´azote dans l´eau, le reste étant stocké par les prairies et rejeté dans l´atmosphère. La nature des sols, plus argileux, l´absence de retournement des prairies et de cultures, une pluviométrie et une pousse plus régulière, jouent aussi en faveur des régions du Nord », explique André Pflimlin.
Pourtant, les éleveurs de ces pays devront appliquer la directive nitrates et se mettre aux normes. « L´Irlande est passée en zone vulnérable depuis le 1er janvier 2005. La totalité du pays est concernée, pour une question d´image bien plus qu´à cause des teneurs en nitrates. L´eau doit rester très propre, notamment pour le tourisme et la pêche. Ce choix politique s´accompagne de subventions généreuses, pour que les élevages augmentent leurs capacités de stockage. Mais dans ce pays aujourd´hui très riche, l´élevage est considéré comme une activité économique comme une autre, et bon nombre d´éleveurs hésitent à investir dans la mise aux normes. Il risque d´y avoir une forte restructuration des élevages. »
De gros excédents en Galice, mais une eau de qualité
Dans le Sud de l´Europe, les élevages laitiers qui se développent sont très intensifs : 3 UGB/ha SFP en Galice, 6 dans le Nord du Portugal ; 300 à 400 g de concentré par litre de lait. L´eau y est encore de bonne qualité malgré des excédents d´azote très élevés : 350 kg/ha de SAU en Galice et 500 dans la région de Porto.
C´est que la SAU ne représente qu´un tiers du territoire, et que les élevages intensifs n´occupent qu´une faible part de la SAU. Le reste du territoire est couvert de prairies extensives et de forêts en Galice, de parcours, de vignes, d´oliviers et de forêts au Portugal. Les excédents d´azote sont donc dilués sur le territoire.
D´autre part, l´intensification des élevages est récente et ne concerne que le secteur laitier. Ici plus que dans le Nord, les marges de progrès sont très importantes.
« Mais comme il n´y a pas encore de zones vulnérables définies, il y a peu de contraintes réglementaires, et pas de subvention pour la mise aux normes. Ce qui freine les changements souhaitables pour rendre ces systèmes plus durables. »
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Source : Institut de l´élevage. |