Les avantages fiscaux des Allemands n’expliquent pas tout
La compétitivité de la filière laitière
allemande ne peut être imputée uniquement
à des facteurs comme la TVA. Premiers résultats
d’une étude de l’Institut de l’élevage.
DANS LE SCHLESWIG-HOLSTEIN, le prix du foncier est passé à 30000-40 000 euros/ha,
un effet pervers du développement du biogaz.
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A. Mottet
un effet pervers du développement du biogaz.
Beaucoup de bruits circulent sur les avantages dont bénéficient les éleveurs allemands. Qu’en est-il réellement? À la demande des interprofessions laitières et viande, l’Institut de l’élevage planche sur ces facteurs de compétitivité. L’étude, et les comparaisons chiffrées, seront finalisées en octobre. « Le « plus » de compétitivité de l’Allemagne ne vient pas seulement des facteurs étudiés, mais il est vrai que la TVA représente un certain avantage », estime Anne Mottet, de l’Institut de l’élevage. Voici les premières grandes tendances pour chaque facteur.
Une fiscalité assez avantageuse
Un plan laitier qui reste limité
Une détaxation comparable sur le fuel
Un complément très significatif avec le biogaz
Aides bâtiment et transmission
Des avantages liés à la main-d’oeuvre
Une fiscalité assez avantageuse
Les exploitations allemandes bénéficient d’un régime fiscal spécial pour la TVA. Celui-ci est très ancien, mais les taux ont été revus à la hausse en 2007. « Pour celles ayant opté pour le forfait (80 % d’entre elles), la TVA s’apparente davantage à une subvention à la valeur ajoutée qu’à une taxe », explique Anne Mottet.
Elles vendent en effet leur lait avec une TVA à 10,7 % et achètent une partie des intrants (aliments, semences…) avec une TVA à taux réduit à 7 %. « Il existe un avantage certain mais le gain n’est pas aussi important que ce à quoi on pourrait s’attendre. En moyenne, entre 2000 et 2008, il reste inférieur à 1 % du chiffre d’affaires. Mais ce gain est très variable. Il est lié au chiffre d’affaires et donc au prix du lait, et il dépend aussi du profil d’exploitation : pour les exploitations très économes avec peu d’investissements, le gain est évident; il l’est beaucoup moins pour des exploitations en phase d’investissement. » Des simulations à partir du Rica et des cas types sont en cours.
Hors investissements, l’avantage se situerait dans une fourchette de 7 à 10 c/l par exploitation, et si l’on tient compte des investissements de 0 à 3,5 c/l.
Un plan laitier qui reste limité
L’enveloppe laitière du « Sonderprogram» (plan spécial agricole) s’élève à 400 millions d’euros répartis sur 2010 et 2011. Elle comporte une aide à la vache de 21 euros, une aide à l’hectare de prairie de 37 euros, et un allègement des cotisations sociales. « D’après les simulations du DBV (syndicat agricole allemand), le montant serait d’environ 5 000 euros par an pour une exploitation de 90 vaches dont les 2/3 de la SFP seraient en prairie », souligne Anne Mottet. La règle des minimi s’applique pour la prime à la vache laitière avec un montant d’aides plafonné à 7 500 euros par exploitation sur trois ans, ce qui pénalise les grandes exploitations du Nord et de l’Est.
Une détaxation comparable sur le fuel
Les grandes exploitations bénéficient par contre à plein pot de la détaxation sur le fuel, car le plafonnement de cette aide a sauté en 2010 ; celle-ci se chiffre à 15 000 euros par an pour une exploitation de 300 vaches sur 900 hectares. D’après les chiffres disponibles auprès des pouvoirs publics, le remboursement de la TIPP pour les agriculteurs en 2010 représenterait un budget de 170 millions en France contre 270 millions annoncés côté allemand.
Un complément très significatif avec le biogaz
La loi allemande impose le rachat de l’électricité produite à partir de biogaz à prix très élevé, avec une garantie sur 20 ans (22 c/kWh en moyenne mais jusqu’à 30 centimes en incluant tous les bonus contre 14 centimes en France). Plus de 5 000 installations de biogaz ont vu le jour en une quinzaine d’années. « Elles peuvent générer un revenu complémentaire très significatif et garanti », constate Anne Mottet. Toutefois, seulement la moitié des installations seraient rentables et cet engouement a provoqué une hausse de 42 % des surfaces en maïs entre 2000 et 2009. Cela a un effet pervers sur le prix du foncier et celui du fermage qui ont doublé depuis 2004.
Aides bâtiment et transmission
L’Institut de l’élevage planche sur d’autres facteurs comme les aides bâtiments, variables selon les Länder. « On a visité des grands bâtiments de plus de 900 000 euros subventionnés à 30 % par des aides du second pilier. » Une comparaison avec le plan bâtiment français est en cours. « Il semblerait que l’enveloppe globale soit comparable mais qu’elle soit répartie sur moins d’exploitations côté allemand. »
L’Allemagne a par ailleurs un système de transmission qui facilite l’installation. L’héritier qui reprend l’exploitation est privilégié et ne rachète pas l’exploitation au moment de son installation. « Les » cohéritiers « sont dédommagés à un prix très inférieur à la valeur vénale des terres, mais l’exploitant a en revanche l’obligation de loger ses parents et de leur verser une pension à vie. » Une comparaison du coût d’installation sur des exploitations de structure comparable est envisagée. ■
Des avantages liés à la main-d’oeuvre
■ Salarié : les éleveurs peuvent bénéficier d’une exonération de 20 % de charges sociales pour l’emploi d’un salarié à condition qu’il travaille moins de 50 heures par mois et gagne moins de 400 euros.
■ Système d’apprentissage : c’est une tradition, il est généralisé en Allemagne et fonctionne très bien. Avant de s’installer, les Allemands effectuent deux à trois ans de stages en alternance. Ils emploient donc beaucoup de stagiaires qui fournissent un travail important rémunéré à moindre coût.
■ Salariés des abattoirs : ceux-ci emploient une main-d’oeuvre d’origine roumaine et polonaise très faiblement rémunérée, via des sociétés de services localisées dans le pays d’origine. Il n’y a pas de Smic en Allemagne et pas d’accord de branche dans le secteur de la viande. L’avantage au kilo de viande produit est en cours de calcul.