Pierre Billon, ingénieur à l’Institut de l'élevage
LE MARCHÉ DU ROBOT DE TRAITE EST EN PLEIN BOOM
Les ventes de robots de traite connaissent actuellement un réel engouement en France. Aujourd’hui, ils sont plus fiables mais pas moins chers à l’achat.

Comment évolue le marché du robot de traite ?
Pierre Billon - Fin 2006, on estime qu’il y avait environ 700 fermes équipées avec au moins une station robotisée en France et ce chiffre évolue tous les jours. On va vite dépasser les 1 000 installations. Ce marché est en plein boom car les éleveurs ont compris que c’est la solution technique la plus facile à mettre en oeuvre pour se libérer de l’astreinte et gagner un peu sur le temps de travail. Leur objectif est d’avoir un mode de vie plus conforme à celui des autres catégories socioprofessionnelles. L’expérience des pionniers rassure. Aujourd’hui, au moins un devis sur deux demandé à un concessionnaire dont la marque dispose d’un tel équipement dans son catalogue, inclus un robot de traite. Cet engouement est d’ailleurs européen ; en effet, par exemple au Danemark entre 4 et 5 installations neuves sur 10 est une installation robotisée avec le plus souvent deux stations et, aux Pays-Bas, c’est plus d’un tiers.
Un système de traite robotisé est-il vraiment plus coûteux ?
P. B. - L’investissement est lourd. Mais si on compte tout ce que le robot de traite peut apporter (la traite automatisée avec compteur à lait, gestion de la conductivité, de l’activité, gestion technique de la production, la distribution automatique des concentrés…), le différentiel de prix avec les systèmes de traite conventionnels n’est pas aussi important qu’on peut le penser. Par exemple, Pour un troupeau de 60 vaches laitières, il faut compter entre 150000 à 160 000 euros pour acquérir une station de traite robotisée bien équipée. Le différentiel de prix avec un système classique, y compris la réalisation d’un bloc traite neuf tourne autour de 40 000 à 50 000 euros. Pour un amortissement sur dix ans, cela représente 4 000 à 5 000 euros par an. Si on rajoute le prix d’un DAC (qui n’est pas obligatoire), le différentiel est pratiquement comblé. Les éleveurs font vite le calcul au regard des services que ce système peut apporter.
Est-ce que les prix baissent ?
P. B. - Non. Cela fait quinze ans que les robots de traite existent mais leur prix n’a pas baissé. Et je ne suis pas certain que leur prix va baisser parce que le marché potentiel n’est pas si énorme que cela. Ce qui est souhaitable, c’est de trouver des services après vente de plus en plus abordables d’autant que les robots sont de plus en plus fiables. Actuellement la maintenance est encore chère.
L’engouement va-t-il durer ?
P. B. - Personne ne le sait parce que cela dépend aussi de l’évolution de la politique agricole et laitière en particulier. Ceux qui s’équipent semblent relativement confiants. S’il y a la fin des quotas et que l’éleveur veut augmenter sa production laitière, il faut savoir que jusqu’à 60 ou 70 vaches ou 650000 litres de lait produits, avec une seule station ça va. Au-delà, cela commence à poser des problèmes. On trouvera certainement des solutions pour améliorer la productivité des robots, mais les limites seront vite atteintes. On voit aussi de plus en plus d’installations avec deux stations pour des troupeaux de 100 à 120 vaches. Les éleveurs peuvent également se tourner vers des robots multi-stations qui sont peut-être plus adaptés aux effectifs plus importants. Dans le cas des grands troupeaux les éleveurs semblent plus se tourner vers les salles de traite rotatives. Cependant, ces systèmes peuvent coûter aussi chers qu’un robot pour traire un même nombre de vaches.
Quels sont les points à améliorer ?
P. B. - Pour la plupart des robots, le nettoyage des trayons n’est pas optimisé. Que la mamelle soit propre ou sale, les trayons sont lavés de la même manière. La meilleure solution consiste à assurer la propreté des animaux en amont. A priori la qualité sanitaire des laits issus de robots de traite est équivalente aux autres systèmes de traite. Mais il faut que le troupeau soit bien mené. Par ailleurs, la détection des laits anormaux en temps réel n’est pas encore totalement possible. Si on détecte facilement et précisément du sang dans le lait, il n’existe pas actuellement de détecteur de mammites à la fois suffisamment sensibles pour détecter toutes les vaches laitières à problème tout en ayant une grande spécificité (quartiers faux positifs). C’est le nouveau pari des constructeurs qui ont réalisé ces dernières années des recherches importantes afin de mettre au point des capteurs performants qui arrivent actuellement sur le marché.
IDENTITE
Pierre Billon est le spécialiste traite de l’Institut de l’élevage. Il a mené de nombreux travaux sur les différents systèmes de traite.