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Aides bovines
Le couplage ne sauvera pas l´Europe du déficit

Le couplage des aides bovines en France et en Espagne devrait juste permettre de maintenir l´offre actuelle. Le découplage total chez leurs voisins entretiendrait le déficit européen.


Choix de la date de découplage, couplage possible dans certaines productions. la diversité de la mise en application de la réforme de la PAC a fait de la carte de l´Europe un patchwork !
La France a choisi des couplages maximums afin de perturber le moins possible son paysage agricole. A l´inverse, l´Allemagne, le Royaume-Uni, l´Irlande et l´Italie ont opté pour un découplage total de toutes leurs aides. Ces différences pourraient générer des distorsions de concurrence entre pays. La viande est le secteur où les choix sont les plus variés : cinq possibilités de recouplage pour 15 pays.

Les relations France-Italie en dents de scie ?
Les Italiens pronostiquent une légère baisse de la production, mais surtout ils considèrent que leurs engraisseurs gagneront en pouvoir de négociations face aux fournisseurs français de broutards. En effet, contrairement aux Français ils pourront choisir de produire ou non suivant l´état du marché. « Les études italiennes prédisent une baisse minime de la production. Mais cumulée à une baisse de l´activité de l´engraissement en France, que l´on observe aujourd´hui, elle pourrait conduire à une réduction des débouchés pour les animaux jeunes français. Les Italiens se remettraient à engraisser une fois les prix du maigre rendus attractifs. Il y a donc un risque de cycles », développe Jacques Mathé, du CER des Deux-Sèvres(1).
L´Institut de l´élevage estime que la pression environnementale pèsera encore plus sur la production. « Un gros retard va être rattrapé dans l´application de la directive nitrates. De nouvelles zones vulnérables sont définies, les normes de rejets azotés sont augmentés. Cette situation va générer beaucoup de concurrence pour les surfaces, entre les éleveurs de bovins viande, lait, et de porcs », détaille Geneviève Cotto.

Elle ajoute que les relations France-Italie pourraient aussi évoluer du fait d´un revirement stratégique de la grande distribution italienne. « Basée depuis 4 ans sur des viandes italiennes produites à partir de maigre français, la stratégie de la GMS évolue avec le développement d´un segment premier prix avec des viandes importées (Irlande, Pologne, Amérique du Sud). »
Les relations France-Italie risquent d´être perturbées par une baisse de l´engraissement italien. ©F. d´Alteroche

Chute de production prévue pour l´Allemagne et l´Irlande
Le déficit de la production de viande bovine de l´Europe risque de s´accroître encore. Des baisses de production ont déjà commencé, et pourraient se poursuivre en Allemagne et en Irlande. Et le couplage adopté par la France et l´Espagne ne serait pas synonyme d´essor du cheptel et de la production de viande.
D´après l´Institut de l´élevage, en Espagne, le couplage évitera que le cheptel allaitant ne décline trop. En cause, les sécheresses à répétition, la pression environnementale, le cheptel allaitant qui dépasse les références primes à la vache allaitante, etc. Par contre, « la France détiendrait un atout majeur avec un puissant cheptel allaitant qui se renforcerait ».

Vaches allaitantes : pas d´effet dopant du couplage
Vincent Chatellier, de l´Inra de Nantes, considère que seule une augmentation du plafond national des primes (3,8 millions de têtes en France) aurait un effet stimulant sur la production de vaches allaitantes. « Il reste en effet économiquement peu rentable de produire sans les primes, même dans le contexte où les prix sont porteurs. Mais cette hypothèse est peu probable dans un contexte de maîtrise des dépenses de la Pac. Face au déficit communautaire en viande bovine, les autorités risquent de préférer un renforcement des importations en provenance du Mercosur. »
Jacques Mathé, du CER des Deux Sèvres, développe une autre explication de la stagnation du troupeau allaitant. « L´agriculteur ne fait pas ses arbitrages qu´en fonction du revenu. Faire du jeune bovin est coûteux en main-d´oeuvre et en capital. Aujourd´hui, quand il y a un regroupement d´exploitations, les éleveurs remodèlent le système pour qu´il corresponde à leur choix de vie. On constate que les éleveurs préfèrent alors garder les vaches allaitantes et abandonner leur atelier taurillons. Les systèmes se simplifient, se désintensifient. »
« D´autre part, si jusqu´à présent les exploitations se concentraient sans se restructurer, demain, avec plus de surfaces et d´animaux pour une main-d´oeuvre équivalente, les changements de systèmes pourraient être assez radicaux.»

L´engraissement français en difficulté ?
Pour Jacques Mathé, le découplage des aides représente un risque de déstabilisation de toute l´industrie vivant de l´engraissement. L´économiste estime que « si la transformation souhaite conserver sa matière première, elle aurait intérêt à investir dans la production. Ce ne seront pas les éleveurs qui le feront, puisqu´il leur sera plus facile de se spécialiser en vaches allaitantes que de développer l´engraissement. »
Cette vision rejoint celle de l´Institut de l´élevage, qui estime que la position d´engraisseur de la France sera affaiblie, car « la marge apportée par l´activité d´engraissement apparaît comme spéculative, aléatoire, par rapport au gain certain, connu et acquis au sevrage de l´animal ».

Futur : découplage pour tout le monde ?
« Le lait a pris une longueur d´avance, avec la réforme de l´OCM lait, et le découplage total de l´aide laitière dans tous les pays. Le régime à la carte pour les autres productions était nécessaire à l´établissement d´un accord entre les pays sur la réforme de la PAC. Mais dans un avenir relativement proche, Bruxelles cherchera vraisemblablement à harmoniser à nouveau la PAC. dans un souci de simplification des primes et des couplages. Mais aussi pour éliminer les distorsions de concurrence que ces différences engendrent. A terme, le couplage ne durera pas », estime Alain Le Boulanger, du CER France-Normandie.



Source : CER 53

(1) CER : Centre d´économie rurale.
(2) Fin 2004, La France comptait quatre millions de têtes.

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