La râpe à pieds
Elle avait tellement mal aux pattes arrière qu’elle ne savait comment s’y prendre pour se déplacer et tout en tremblant, étendait les pattes comme si elle avait des crampes et c’est sans doute la raison pour laquelle elle avait perdu pas mal de poids en un rien de temps. Vous voyez ces deux ulcères de la sole situés en pince et vous voyez aussi le pododerme qui fait hernie à travers la corne ? Vous voyez comment cette extrémité des onglons a été râpée mais ce que la photo ne montre pas c’est la corne fine et dépressible disposée tout autour des ulcères. Elle ne montre pas que même plus haut vers le talon la douleur est très vive lorsque j’appuie fermement sur la sole parce que le tissu producteur de cette corne est enflammé sur toute la surface d’appui et pas seulement en pince. Aussi les cales échancrées que j’ai collées pour réaliser une suppression d’appui en pince ne suffisent pas à abolir la douleur qui reste vive. La photo ne montre pas non plus le pied gauche exactement dans le même état. Mais comment a-t-elle pu en arriver là ? Pour expliquer cette usure exagérée en pince, je me suis dit qu’elle avait pu tomber sur le ventre et patiner beaucoup avant de parvenir à se relever sur le béton neuf mais neutralisé de la stabulation.
Un béton comme du papier de verre
Mais lorsque quelques jours plus tard d’autres vaches lui ont emboîté le pas de la même façon avec des ulcères situés strictement au même endroit, il a bien fallu pointer du doigt le béton et particulièrement celui de l’aire d’attente de la salle de traite, pentu et très abrasif qu’il a fallu recouvrir de tapis avant que toutes les vaches y passent les unes après les autres. Une d’elles a même dû être euthanasiée après bien des souffrances à cause du désengrènement de l’étui corné et d’une complication suppurative. Cet éleveur aurait-il pu se douter de l’agressivité mécanique du béton ? Peut-être car l’usure très excessive du rabot et de la semelle de ses propres bottes ne lui avaient pas échappé.