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« J’ai mûrement réfléchi mon projet »

Dans le Cantal, Emmanuel Job, porté par une motivation familiale très forte, s’est installé avec son père en reprenant l’exploitation d’un voisin. Les investissements ont été prudemment raisonnés.

Emmanuel Job a attendu patiemment avant de s’installer, mais sans jamais dévier de son idée de devenir éleveur laitier. Pendant presque dix ans, après sa formation agricole (BPREA), il a exercé deux métiers : intérimaire dans une usine de fromage à raclette durant six mois l’hiver, conducteur de moissonneuse-batteuse l’été. Il s’est installé en août 2015, en créant un Gaec avec son père, Hervé, après avoir trouvé une opportunité foncière pour agrandir l’exploitation familiale. Sa mère gère l’activité chambres d’hôtes. Ses parents produisaient près de 300 000 litres de lait avec un troupeau de 30 vaches Prim’Holstein. La reprise de l’exploitation laitière d’un voisin a permis de porter la surface de 60 à 112 ha (dont 11 ha de maïs ensilage et 14 ha de céréales) et de construire un projet sur la base de 700 000 litres de lait. « J’ai mûrement réfléchi mon projet », dit le jeune éleveur. Sa coopérative, Volcalis, lui a attribué un droit à produire supplémentaire de 465 000 litres. Le cheptel sera à son niveau de croisière (70 vaches à 10 000 litres) dès cet automne et l’objectif de production devrait être atteint en 2018.

Projet chiffré avec un prix de base à 300 euros

Le jeune éleveur a élaboré son projet lorsque la conjoncture laitière était au plus haut, en 2014-2015. La prudence l’a néanmoins guidé. Un mot qui revient souvent dans la conversation. « Nous avons chiffré le projet sur la base d’un prix du lait de 300 euros par mille litres. Finalement, nous y sommes." [NDLR : prix payé en 2016, 302 € avec 33,1 TP et 41,5 TB, l’exploitation n’étant pas engagée dans les AOP du département].
Prudence également dans les investissements. Le Gaec a rallongé la stabulation existante (1994) pour la porter à 62 places et construit un deuxième bâtiment pour les génisses et les vaches taries, ainsi qu’une fosse à lisier de 1 200 m3. Il a également aménagé une salle de traite. Avant, la traite se faisait dans une cabane utilisée depuis quelques années à poste fixe dans le bâtiment. Le Gaec a renouvelé un peu de matériel : autochargeuse, pailleuse, robot repousseur… Soit au total un investissement de 400 000 euros. La grande fosse permettra de mieux valoriser le lisier pailleux et donc d’intensifier légèrement la production fourragère.

Retard des aides PAC financé par un court terme

Ces investissements ont été financés par les aides (18 500 euros de DJA, dont 80 % versés rapidement, et 130 000 euros de subvention bâtiment, toujours en attente de paiement), par un prêt JA de 150 000 euros et un court terme TVA de 50 000 euros. L’accroissement du cheptel s’est fait à la fois par du croît interne et par des achats de génisses, une trentaine au total. Mais, la montée en charge n’a pas été aussi rapide que prévu parce que l’entreprise qui devait monter les charpentes a pris six mois de retard. Parmi les mauvaises surprises encore : le retard de versement des aides. Pour la subvention bâtiment, c’était attendu et financé par un prêt court terme. Mais, pas pour les aides PAC. La transformation du statut de l’exploitation (changement de N° Pacage) a fait que le dossier a été instruit plus tardivement. Mi-juin, il manquait encore 25 000 euros à l’appel. Le court terme TVA a donc été prolongé. Si Emmanuel Job déplore la lourdeur administrative du parcours d’installation, il estime avoir été bien conseillé par les différents intervenants : comptable, conseillère agricole, banquier…

« Aujourd’hui, j’ai une autre vie »

Il apprécie d’autant plus son métier d’éleveur qu’il a pu voir « comment ça se passe ailleurs ». Notamment le travail en trois x huit, de nuit et le week-end. « Aujourd’hui, j’ai une autre vie », dit-il. Dans sa commune, il y a essentiellement des éleveurs laitiers. Cela crée une ambiance stimulante : « Il y a beaucoup de jeunes motivés, avec des projets ». La Cuma « marche bien ». Il participe régulièrement à des formations avec sa coopérative, la chambre d’agriculture, le conseil en élevage… Il commence à prendre des responsabilités professionnelles et envisage de s’engager davantage, quand les travaux de la maison d’habitation seront terminés. « S’il n’avait pas repris l’exploitation, cela m’aurait ennuyé, reconnaît son père. Mais, ce qui me fait le plus plaisir, c’est qu’il est vraiment motivé. » Et, regardant babiller son fils qui vient tout juste de naître - son premier enfant - Emmanuel Job ne peut s’empêcher de penser qu’il lui succédera peut-être un jour. En attendant, sa compagne, salariée dans une fromagerie, envisage de le rejoindre sur l’exploitation, lorsque son père prendra sa retraite. Assurément, une famille qui sait transmettre le goût de la production laitière.

Le message d’Emmanuel Job

« On ne peut pas toujours avoir peur : il faut avancer. Si on ne fait plus de lait, que vont devenir nos campagnes ? Avec la volatilité du prix du lait, il faudra à l’avenir gérer autrement. Les périodes où on touchera beaucoup d’argent, il faudra en mettre de côté pour passer les mauvais jours, comme en élevage porcin. On devra aussi être le plus autonome possible. »

Côté éco

Installation en août 2015

400 000 euros d’investissement
302 €/1 000 l : prix du lait payé en 2016
35 % EBE/produit
56 % de taux d’endettement

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