Quelles premières propositions faites-vous pour améliorer les sols en béton ?
François Gervais - "La première recommandation est de bien finir les sols notamment avec le bouchardage (1). Cela consiste à réaliser une empreinte avec un rouleau juste après le coulage et la finition du béton pour obtenir dès le départ une caractéristique antidérapante. Le rainurage mécanique doit être considéré comme une opération de réfection des sols et réalisé le plus tard possible. Laissons au sol le temps de se stabiliser ! Il a besoin au moins d’un an pour obtenir une résistance mécanique maximale : un rainurage trop précoce entraîne une diminution de sa durée de vie. Les sols à pentes transversales avec écoulement vers le rail sont un bon moyen d’éliminer l’humidité (favorisant la dermatite digitée). Nos premières expériences nous incitent à recommander des pentes transversales à 2,5 % (et des pentes longitudinales de 1 à 2 %). Or les mesures réalisées en élevages indiquent dans la majorité des cas des pentes entre 0,5 % et 1 %, bien inférieures aux 2 % annoncés. Nous allons poursuivre nos observations. Il reste à convaincre les artisans de l’intérêt de ces pentes et les fournisseurs de racleurs pour qu’ils adaptent leur matériel (certains l’ont fait)."
L’écart de coût entre les différentes solutions de sol est-il très important ?
F. G. - "Oui, le coût d’un sol peut varier de 1 à 4 (30 à 130 €/m2) selon l’option choisie. Il existe une grande gamme de solutions, des innovations dans les différents types de sols et des produits de nouvelle génération, tant chez les fournisseurs français qu’étrangers. Les innovations avec des sols limitants les émissions gazeuses ammoniacales (souvent plus coûteux) se développent dans les pays nord européens en particulier aux Pays-Bas. Citons l’exemple des caillebotis mixtes combinant caoutchouc et béton profilé avec une version antiammoniac en plein développement aux Pays-Bas dans le cadre de l’amélioration de la qualité de l’air. Ceci explique aussi la présentation de ces innovations dans les salons de l’élevage.
Comment optimiser le coût ?
F. G. - "Il faut distinguer les solutions en neuf et les solutions de réfection. Dans le cas de sol plein, le béton reste la base de départ qu’il faut réaliser de manière durable avant d’envisager plus tard d’autres solutions de réfection. Au moment où on fait un sol, il faudrait déjà prévoir ce que l’on fera en réfection. La durabilité des sols et leur évolutivité ne sont pas assez prises en compte aujourd’hui. On ne peut pas parler de coût sans parler de durée de vie, et aussi de rapport coût/bénéfices, même s’il est difficile à évaluer. Un sol où les vaches ne glissent pas, ne s’équasillent pas et circulent bien, surtout avec un robot, c’est essentiel. Un sol qui se nettoie bien et élimine l’humidité permet non seulement d’améliorer l’hygiène des pieds mais aussi de limiter les émissions d’ammoniac, ce qui permettra aussi de gérer ce problème à l’avenir. Dans un bâtiment où les animaux sont très présents, il faut veiller à mettre en place des sols très protecteurs : la fréquence de raclage augmente donc ET ?? la durée de vie des sols diminue. Les élevages qui ont réduit fortement voire complètement le pâturage auraient tout intérêt à transférer sur les sols des bâtiments les investissements qu’ils n’ont pas à faire pour le pâturage comme les aménagement de chemins.
La mixité des sols devrait également être développée. Il n’existe pas de sol parfait : jouons la complémentarité et la compensation des effets. C’est aussi une façon d’optimiser les coûts. Par exemple, on peut mettre des tapis dans les zones d’alimentation très fréquentées (solution plus coûteuse qui n’use pas les onglons) et un sol plus rugueux comme du béton ou de l’asphalte (plus abrasif et moins coûteux que les tapis) dans les autres zones de circulation entre rangées de logettes ou les passages".
Quelles sont les pistes pour améliorer l’entretien des sols ?
F. G. - "Il y a effectivement autant à travailler sur le raclage que sur la nature des sols. D’autant plus que les animaux passent davantage de temps en bâtiment et que le raclage est plus difficile l’été avec les risques d’assèchement.
Des marges de progrès sont possibles sur la fréquence de raclage (l’idéal serait toutes les deux heures), mais aussi avec l’amélioration des racleurs mécaniques. De plus en plus de fournisseurs proposent des racleurs équipés de pièces d’usure à changer régulièrement (matières synthétiques, brosse…), comme le sont les racleurs tracteurs ou les robots pour caillebotis.
Les zones non raclées entretenues manuellement, comme les zones de passage entre logettes ou le couloir de retour de salle de traite, ne doivent pas être négligées. Réfléchissons au positionnement des abreuvoirs : ils gagneraient à être orientés de façon à ce que les vaches défèquent dans les couloirs raclés. Leur positionnement dans les passages obligent en plus à accroître la surface de ces zones et gêne la circulation des animaux.
Les robots racleurs développés pour les caillebotis sont une très bonne solution : ils peuvent passer partout, adaptent la fréquence selon les zones plus ou moins souillées, et peuvent pulvériser un jet d’eau, ce qui évite les problèmes de croûtage l’été."
(1) Lire Réussir Lait, n°????, septembre 2014, p.164.