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En route vers l’éradication de la BVD !

Un plan national et obligatoire de lutte contre la BVD a été validé par la quasi-totalité des organisations professionnelles en octobre. Il laisse le choix entre différentes modalités de dépistage. Illustration en Bretagne et dans le Grand Est.

Troubles de la reproduction, avortements, immunodépression, baisse de production laitière, retards de croissance, maladies opportunistes… la BVD coûte cher aux élevages bovins. L’impact économique est évalué entre 30 et 80 euros par 1 000 litres de lait selon la gravité de l’infection. Au niveau national, il est estimé à plus de 30 millions d’euros par an. Cette maladie se transmet essentiellement par l’introduction d’animaux infectés (IPI ou virémiques transitoires) ou par contact entre troupeaux voisins. Si elle est efficace à l’échelle d’un élevage, la lutte individuelle ne permet pas de diminuer la proportion d’élevages nouvellement infectés. D’où la décision de mettre en place un plan national de lutte contre la BVD obligatoire avec comme objectif l’éradication. Ce plan définit les mesures techniques et réglementaires permettant l’assainissement des troupeaux infectés et les conditions d’attribution des garanties aux animaux.

L’arrêté devrait être publié d’ici la fin du premier semestre

Un projet d’arrêté a été présenté au Cnopsav (Conseil national d’orientation de la politique sanitaire animale et végétale) en octobre dernier et a reçu un avis favorable de la quasi-totalité des organisations professionnelles (sauf la Coordination rurale). L’arrêté devrait être publié d’ici la fin du premier semestre 2018, et rendra obligatoire la mise en œuvre du programme dans toutes les régions. Il laisse une certaine souplesse au niveau des modalités de dépistage engendrant des coûts de mise en œuvre et de vitesse d’éradication différentes. Il permettra aussi, à la demande d’une zone et sur dérogation, le report des volets surveillance des cheptels et circulation des animaux dans un délai maximum de quatre ans (voir encadré). En revanche l’assainissement des élevages infectés sera d’application immédiate partout. « L’objectif est que tout le monde parte en même temps dans une même région », explique Michel Combes, président de GDS France.

Les plans déjà en place en Bretagne et dans le Grand Est sont une bonne illustration de la déclinaison possible du programme national. La « méthode bretonne » repose sur un dépistage sérologique qui permet de savoir si le virus a circulé dans le troupeau, la détection des IPI ne se faisant que dans les élevages positifs. La « méthode Grand Est » s’appuie sur un dépistage systématique des IPI à la naissance par prélèvement de cartilage auriculaire. Ces deux plans d’éradication sont pour le moment basé sur le volontariat ; le plan national rendra la démarche obligatoire pour tous les élevages.

En Bretagne : un statut des élevages grâce à des sérologies

En Bretagne, la situation est déjà très assainie. Les GDS bretons ont démarré dès 2000 un plan de maîtrise. Il est basé sur la connaissance du statut de tous les élevages grâce à des sérologies réalisées tous les trimestres (recherches d’anticorps dans le lait de tank et sur sérum de mélange pour les troupeaux de plus de 20 vaches allaitantes) et sur la gestion des introductions (garantie bovin non IPI). En parallèle, la Bretagne a mis en place un dispositif original de garantie non IPI avec une vérification limitée à des documents, moins coûteuse que les analyses. Ce plan de maîtrise a permis de faire passer la proportion d’élevages indemnes de BVD de 37 % à plus de 80 % en 2017, et de garantir 70 % des bovins bretons non IPI. « Comme nous ne progressions plus, nous avons mis en place ce printemps un plan d’éradication sur cinq ans pour faire la chasse aux derniers animaux contaminés et contaminants, et stopper la circulation virale », explique Hervé Radenac, président de la commission technique de GDS Bretagne. L’enjeu est de moins exposer les élevages indemnes pour qui les conséquences économiques d’une contamination peuvent être dramatiques. Un million et demi d’euros vont être investis. L’objectif est d’atteindre 99,5 % de troupeaux garantis sans IPI en 2020 et 99,8 % en 2025.

Ce plan d’éradication comporte cinq axes :

- la mise en place d’un plan d’assainissement dans tous les élevages dont le statut est défavorable (500 dès 2017) ;

- la garantie Bovins non IPI pour tous les animaux introduits ;

- la connaissance du statut BVD de tous les élevages, en particulier celui des petits cheptels. Les troupeaux de moins de 20 vaches allaitantes qui passaient entre les mailles du filet seront tous testés en 2018 lors des prophylaxies ;

- la détection plus précoce des élevages nouvellement contaminés grâce à une nouvelle méthode d’analyse sur lait de tank (il permet de détecter le passage du virus à partir de 2 % d’animaux contaminés contre 10 % pour l’ancien test). Le délai d’intervention sera réduit de trois mois ceci pour protéger les futures gestations et réduire le nombre d’IPI à naître ;

- le renforcement de la collaboration entre le GDS et 125 cabinets vétérinaires.

Dans le Grand Est : une détection des IPI à la naissance

Le Grand Est a pris la décision d’éradication dès l’automne 2015, et le programme est bien engagé en 2017 dans neuf départements (Franche Comté, Alsace-Lorraine). Depuis octobre dernier, 100 % des veaux sont équipés à la naissance de boucles auriculaires « 2 en 1 » permettant l’identification et le prélèvement de cartilage. D’ici un an et demi, dix autres départements (Champagne-Ardennes, Hauts de France) feront de même. Le programme est basé sur la détection et l’élimination précoce des IPI avec la maîtrise des facteurs de risques : introduction d’animaux garantis non IPI, mise en pâture d’animaux non IPI. La phase d’éradication active avec un dépistage généralisé des veaux à la naissance est prévue sur quatre ans. Ensuite seuls les derniers élevages infectés continueront les tests individuels systématiques, les exploitations saines seront surveillées par sérologie sur lait de tank ou prise de sang en allaitant. L’objectif est d’arriver à zéro IPI en 2025.

« Cette méthode offre l’avantage d’aller vite. Plus on avance vite, moins on a de risque de réinfection des élevages sains, argumente Vincent Potofeu, directeur du GDS des Vosges. Elle permet aussi d’avoir un même protocole pour le lait et pour la viande. Cette méthode est celle retenue par la plupart des autres pays européens ; nous nous sommes appuyés sur leur expérience. »

Un choix déterminé par le contexte de la zone

« Les premières années, le coût est élevé : le coût du plan vient s’ajouter aux pertes liées à la BVD. Mais cet investissement permet de réduire nettement les pertes liées à la BVD au bout de quelques années. Nous estimons le retour sur investissement entre six et huit ans après le démarrage du plan. » Si l’on prend l’exemple du département des Vosges en 2017 : 60 000 veaux sur les 77 000 ont été dépistés, le coût du plan (bouclage et dépistage à la naissance, contrôle des positifs, dépistage à l’introduction, frais de gestion des GDS) est chiffré à 8,5 €/veau dont 4,5-5 €/ veau sont à la charge de l’éleveur. « Pour ramener le coût au bovin, il faut diviser par un facteur de 3,5. En 2018, le coût devrait baisser à 7,5 € (voire 6,5 € avec une aide de la région). »

« Ce sont les conditions d’élevage de la zone qui déterminent le choix de la méthode. Nous avons 50 % d’élevages laitiers et 50 % d’élevages allaitants, beaucoup de troupeaux mixtes, et beaucoup d’animaux vaccinés, insiste Vincent Potofeu. Les taux d’introduction et de mise en pâture, les mouvements à l’intérieur de zones de mise en pâture interviennent également. Dans les Vosges, les élevages ont six à huit voisins de parcs au pâturage donc beaucoup de risques de se recontaminer : il est nécessaire d’enlever les IPI au plus vite. »

Les trois volets du plan national BVD

1- Assainissement : le déclenchement d’un plan d’assainissement dans les élevages où le virus a été mis en évidence sera obligatoire (minimum 12 mois). Cette mesure sera d’application immédiate dans toutes les régions après la parution de l’arrêté.
2- Surveillance : deux méthodes sont officiellement validées pour repérer les IPI. La première est un dépistage systématique à la naissance. La seconde est une surveillance par sérologie sur lait de tank ou sang, avec une détection des IPI uniquement dans les élevages séropositifs. GDS France propose un outil qui permet de déterminer la stratégie la plus efficiente en fonction du contexte épidémiologique et économique de la région.
3- Circulation des animaux : la garantie bovin non IPI sera exigée pour circuler.

Pour les volets 2 et 3, les régions peuvent demander un report sur dérogation avec un maximum de quatre ans.

Éliminer les IPI « bombes à virus »

° Un IPI (Infecté permanent immunotolérant) est un animal qui porte et excrète le virus de sa naissance à sa mort. Il est la principale source de contamination. Il devient IPI lorsqu’il est infecté durant la gestation entre le 30e et le 125e jour. Une femelle IPI donne toujours naissance à un veau IPI.

° Un virémique transitoire est un bovin infecté après sa naissance. Il s’immunise et élimine progressivement le virus. Mais pendant la virémie, il est particulièrement sensible aux autres pathogènes. Si c’est une femelle gestante, elle peut donner naissance à un veau IPI.

Un contexte européen en pleine évolution

° Les pays à situation très favorables vis-à-vis de la BVD : Finlande, Norvège, Suède, Danemark, Italie (en partie), Suisse et Autriche.

° Les pays ayant démarré un assainissement collectif avec des mesures réglementées : Allemagne, Irlande, Luxembourg et Belgique.

° Les pays en réflexion avancée : Écosse, Pays-Bas, Portugal et France.

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