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Contenir l'inflammation par et pour l'alimentation

La présence d'inflammation chronique dans un troupeau a des conséquences sur l'efficience alimentaire et les taux. Et parallèlement, l'alimentation peut favoriser ou prévenir les inflammations.

BLOC 1 L'inflammation est une réaction à une agression

L'inflammation est une réaction naturelle et importante de l'organisme à une agression. En envoyant des signaux, via des médiateurs comme les cytokines, elle permet l'adaptation de l'immunité. « Le problème, souligne Émilie Knapp, de la faculté de Médecine vétérinaire de Liège, est quand l'inflammation devient incontrôlable, chronique et provoque des lésions plus importantes que l'agression elle-même. Ces réactions sont souvent incriminées dans les métrites, mammites et maladies métaboliques.» Parmi les marqueurs de l'inflammation, certains, comme l'haptoglobuline, augmentent dans le sang en cas d'inflammation, d'autres, comme l'albumine, diminuent. « L'albumine, qui est la réserve en acides aminés de l'animal, est synthétisée par le foie, explique la vétérinaire. S'il y a inflammation, sa synthèse est en compétition avec celle des protéines inflammatoires. » Le dosage de l'albumine et des globulines peut ainsi permettre de confirmer la présence d'inflammation.

La période du vêlage est particulièrement sensible. Le système immunitaire est alors affecté par des changements hormonaux et métaboliques qui entraînent plus d'inflammation et créent un état de stress métabolique. La balance énergétique négative à cette période et la mobilisation graisseuse qui en résulte exacerbent aussi l'action des médiateurs de l'inflammation.

BLOC 2 - L'inflammation chronique réduit l'efficacité alimentaire


Plusieurs facteurs alimentaires influencent les réactions inflammatoires. « Le niveau énergétique de la ration au tarissement est crucial, insiste Émilie Knapp. Des vaches taries nourries avec une ration en excès d'énergie à base de maïs, avec une part d'amidon by-pass importante, sont plus sensibles aux inflammations.» Le risque est accentué chez les Holstein où le stockage de la graisse se fait plus au niveau viscéral et abdominal, cette graisse facilement mobilisable favorisant les inflammations. Un excès d'énergie, qui provoque un état pro-inflammatoire, est aussi néfaste chez les génisses en croissance car les cytokines interfèrent avec l'hormone de croissance. Une ration qui permet plus de 950 g de croissance chez les génisses de plus de 300 kg peut réduire jusqu'à 50 % le tissu mammaire. Les réactions inflammatoires entraînent également une augmentation des radicaux libres qui peuvent aggraver les lésions tissulaires. Et l'acidose chronique liée à l'apport de concentrés riches en amidon entraîne une inflammation du tube digestif, notamment du gros intestin. La dérive de flore et la baisse d'efficacité des fermentations dans le rumen et l'intestin diminuent par ailleurs la digestibilité des fibres qui peuvent alors « racler » la muqueuse intestinale et accentuer l'inflammation. Enfin, la qualité des protéines de la ration est importante. Une supplémentation en méthionine, qui régule l'équilibre entre la synthèse des protéines inflammatoires et celle des protéines antioxydantes et ????????? a un impact sur l'extraction des graisses par le foie, peut permettre de réduire l'inflammation.

Pour évaluer l'importance de l'inflammation dans les troupeaux à problèmes d'efficacité alimentaire, une étude a été menée par la faculté de Médecine vétérinaire de Liège sur 131 vaches de 20 troupeaux ayant des chutes d'efficacité alimentaire. L'étude a montré que 70 % des troupeaux de Holstein avaient des inflammations chroniques liées en général à un excès d'amidon by-pass (maïs) et à un défaut de digestion des fibres. « La présence d'inflammation chronique est donc à considérer en cas de mauvaise efficacité alimentaire ou de défauts de taux, résume Émilie Knapp. Le diagnostic se fait par prélèvement de jus de rumen et mesure des protéines pour un coût de 300 à 500 euros par troupeau. »

BLOC 3 - Abaisser le niveau d'inflammation en début de lactation


L'administration de salicylates (anti-inflammatoires) pendant 5 jours en début de lactation augmente la production laitière (+ 13 % au pic de lactation) chez les multipares, mais a un effet nul voire négatif chez les primipares. Des essais, encore non concluants, sont menés aussi sur l'apport de lipides extraits du lin ou du poisson, comme source d'oméga 3. L'intérêt de l'apport d'antioxydants pour lutter contre les radicaux libres est par contre bien démontré. « La couverture des besoins en vitamine E et sélénium avant la mise bas, au-delà des recommandations usuelles, diminue l'incidence et la sévérité des mammites et l'incidence de la rétention placentaire », indique Gilles Foucras de l'ENVT.

Mais l'élément essentiel de prévention des maladies inflammatoires du début de lactation est la gestion du rationnement en période sèche, pendant la transition et en fin de la lactation précédente. « Pour favoriser une meilleure ingestion après le vêlage, il faut éviter les apports au-delà des recommandations en fin de période sèche, préconise Gilles Foucras. Et les premières semaines après vêlage, la ration doit être d'excellente qualité et riche en amidon. Un additif comme le monensin, qui réduit la fréquence de la cétose, permet aussi de limiter l'inflammation systémique qui en découle. » Une transition alimentaire d'au moins trois semaines et le respect d'une fibrosité suffisante de la ration sont par ailleurs essentielles pour limiter le risque d'acidose ruminale subaiguë. L'apport de bicarbonate peut aussi être envisagé.
Enfin, la maîtrise de l'état corporel au vêlage est essentielle. « Une note de 3,25 semble optimale pour que la vache ait assez de réserves adipeuses en début de lactation, tout en prévenant le risque de cétose et stéatose, indique le vétérinaire. Et l'état corporel évoluant peu en période sèche, cela suppose d'agir en amont, en maîtrisant l'alimentation en fin de la lactation précédente. »  

Des rations à risques

Les races ont longtemps été sélectionnées sur leur capacité de production laitière. Les concentrés et le maïs, plus riches en énergie que l'herbe, permettent de couvrir les besoins liés à des niveaux de production élevés. « Le risque d'acidose est toutefois fortement accru avec des rations riches en glucides fermentescibles, note Gilles Foucras. Et les composés produits dans le rumen en cas d'acidose influent sur l'inflammation. » La volatilité des prix du lait et des céréales accroissent de plus le risque d'une couverture insuffisante des besoins imposés par un potentiel de production élevé. « Si l'apport en énergie est insuffisant, il conduit à un bilan énergétique négatif, plus marqué en début de lactation, qui favorise l'apparition d'inflammations », précise le vétérinaire. La relation entre les maladies métaboliques comme l'acidose ruminale subaiguë et la cétose subclinique, fréquentes en début de lactation, et l'incidence de maladies infectieuses comme les mammites et métrites a été décrite au plan épidémiologique. Et une étude sur brebis a montré que la prédisposition à la cétose clinique est génétiquement corrélée à la sensibilité aux mammites.

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