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Connaître son sol pour adapter ses pratiques agricoles

L'approche Hérody, présentée par le GAB en Bretagne et Loire-Atlantique, vise à comprendre le fonctionnement des sols pour l'améliorer. Elle distingue notamment différentes formes de matière organique présentes dans les sols.

Une fosse donne de nombreuses indications sur le sol. Paul Mauguin (debout au centre), qui accueillait la journée sol du Morbihan, a aussi fait analyser une de ses prairies en vue de l’installation de sa fille en maraîchage.
Une fosse donne de nombreuses indications sur le sol. Paul Mauguin (debout au centre), qui accueillait la journée sol du Morbihan, a aussi fait analyser une de ses prairies en vue de l’installation de sa fille en maraîchage.
© V. Bargain

« Il est important de connaître la diversité des sols de l’exploitation pour identifier les pratiques à adopter par parcelle », a rappelé Maëla Peden, du GAB 56, à l'occasion d'une semaine des sols organisée par le GAB-Frab(1) de Bretagne et le GAB 44. La méthode Hérody mise en avant par le GAB vise à comprendre le fonctionnement d’un sol pour l'améliorer.

Celui-ci repose sur sa texture, sa structure et la matière organique qu’il contient. Sa porosité est essentielle pour un bon développement racinaire et une bonne circulation de l’eau et de l’air, nécessaire aux organismes vivants.

De la matière organique plus ou moins stable

La structure la plus stable, assez rare en Bretagne, repose sur des feuillets d’argile sur lesquels, grâce au fer, est fixé de l’humus, le tout stabilisé par du calcium. Les limons forment avec l’humus un complexe plus instable, sensible au lessivage. Enfin, le sable ne fixe l’humus que grâce aux colles organiques produites par les microorganismes, rendant le sol sensible aux actions mécaniques et au lessivage. La méthode Hérody caractérise différentes formes de matière organique:

- la matière organique fugitive, facile à décomposer : elle nourrit les microbes qui la transforment en nutriments pour les plantes ;

- la matière organique stable, dont la décomposition est plus longue ;

- et parfois des NiNi (ni assimilables, ni solubilisables), longues chaînes carbonées difficilement dégradées par les microbes.

« La majorité des sols bretons sont riches en NiNi du fait de l’aluminium issu de la roche mère qui se fixe sur les chaînes carbonées et les rend inaccessibles aux microbes, précise Maëla Peden. Il faut apporter d’autres matières organiques facilement minéralisables. » Les parts d’argiles, limons et sables déterminent aussi la capacité de fixation de la matière organique du sol et donc les quantités, fréquences et types d’apports adaptés.

Faire une fosse ou un test bêche

En pratique, une fosse creusée à la main ou à la pelle mécanique donne beaucoup d’indications : profondeur de sol, présence de pierres, d’hydromorphie (rouille, glaise grise), développement des racines… « Un développement sur un seul plan signifie que le sol est trop tassé, que les racines occupent une faille. Les racines ne fissurent pas le sol mais occupent la porosité existante. » En enfonçant un tournevis ou un couteau à différentes profondeurs, on peut voir les zones de compaction. « S’il y a une zone compacte à 30 cm par exemple, il peut être utile de la casser avec un outil à dent pour aérer le sol. » La couleur donne des indications sur le taux de matière organique. Un sol marron foncé indique en général un taux assez élevé de matière organique.

Plus simplement, le test bêche, qui consiste à extraire un bloc de 20 cm sur 20 cm, permet d’analyser la structure du sol et la présence de vers. « En triant les mottes selon leur taille et leur état, poreux ou tassé, grâce à une grille d’interprétation, on peut situer l’état structural du sol et son niveau de compaction », précise Antonin Le Campion, de la Frab.

D’autres tests simples permettent d’évaluer la stabilité structurale du sol, son niveau de tassement, son taux de calcaire. « Pour fonctionner, un sol doit avoir une granulométrie moyenne, être assez poreux, bien oxygéné et pas trop humide, résume Maëla Pelen. Si sa granulométrie est trop fine, il risque de prendre en masse. S’il est riche en sable, il est plus drainant, se tasse moins mais est plus séchant l’été. » Des actions correctives sont possibles par la mécanisation, l’apport de matières organiques stables, le chaulage. « Le travail du sol est le moyen le plus simple et rapide pour oxygéner un sol. Les conditions de travail sont essentielles. Si le sol est trop humide, il peut se refermer. S’il est trop sec, le travail en fait de la poudre et il y a un risque qu’il se recolmate avec la pluie. »

(1) Groupement des agriculteurs biologiques - Fédération régionale des agrobiologistes de Bretagne.

Les vers de terre, laboureurs du sol

 

 
En moyenne, les sols français contiennent 1t/ha de vers, avec environ 100 espèces (27 en Angleterre).
En moyenne, les sols français contiennent 1t/ha de vers, avec environ 100 espèces (27 en Angleterre). © V. Bargain

 

« Dans 100 g de terre, il y a 5 g de matière organique, dont 85 % d’humus, 10 % de racines et 5 % d’organismes vivants dont 20 % de vers », rappelle Guénola Peres, d’Agrocampus Ouest. En moyenne, un sol en France contient 1 t/ha de vers. Certaines pratiques favorisent les vers : ne pas labourer chaque année et pas trop profond (15 cm), limiter le tassement par les engins ou le surpâturage, apporter de la matière organique. On distingue parmi les espèces de vers de terre :

- les épigés, petits vers colorés, qui vivent en surface et sont très actifs sur la dynamique de la matière organique ;
- les endogés, qui mesurent moins de 20 cm et sont peu colorés, consomment de la matière organique et rebouchent leurs galeries horizontales et ramifiées avec leurs déjections. « Ils mélangent la matière organique et la terre et créent une structure grumeleuse qui améliore les capacités de rétention et redistribution de l’eau. » ;
- les anéciques, qui mesurent 20-25 cm, et remontent en surface la nuit pour chercher de la matière organique. « Ils créent des galeries verticales qui sont de véritables drains et peuvent augmenter de 50 % l’infiltration. Ils déposent leurs déjections à la surface sous forme de turricules plus stables que le sol. Lors de grosses pluies, l’eau ruisselle entre les déjections, ce qui limite la vitesse de ruissellement et donc l’érosion. » On distingue les épianéciques, à tête rouge, actifs toute l’année, et les anéciques stricts, à tête grise, qui dorment l’été.

Avis d'expert : Blandine Lemercier, de l’institut Agrocampus Ouest

« Il faut observer et adapter ses pratiques »

 

 
Blandine Lemercier, de l’institut Agrocampus Ouest
Blandine Lemercier, de l’institut Agrocampus Ouest © V. Bargain
« En pâturage total, connaître ses sols est important, notamment pour savoir sur quelles parcelles mettre les vaches en sortie d’hiver ou après de grosses pluies. Il faut choisir les sols qui se ressuient le mieux. Sinon, les vaches compactent le sol, ce qui nuit à la pousse de l’herbe. Sur des prairies qui fonctionnent mal, un décompactage et un chaulage peuvent être intéressants. S’il y a des cultures, il est important de conserver une structure favorable, d’ intervenir au bon moment et de faire des rotations. La fertilisation et les amendements sont importants aussi pour nourrir le sol, qui lui-même nourrira les plantes. Un sol peu épais ou sableux ne peut retenir beaucoup d’éléments. Il faut alors fractionner les apports. »

 

Trois tests simples pour connaître son sol

1 - Le test d’humectation :

 

 
Test d'humectation.
Test d'humectation. © V. Bargain
C'est un test pour évaluer la stabilité du sol qui consiste à plonger une motte séchée dans l’eau. Selon sa vitesse de dégradation, une grille donne une note qui indique la capacité du sol à rester stable. Plus l’effritement est lent, plus la structure est satisfaisante. Plus la motte fond vite, plus le sol présente un risque de lessivage des particules fines et de battance. Ce test, à faire en début d’hiver, montre comment le sol va résister à des pluies intenses.

 

2 - Le test à l’acide :

 

 
Test à l'acide.
Test à l'acide. © V. Bargain
Le calcium est important pour la stabilité du complexe organominéral. En versant de l’acide chlorhydrique dilué sur le sol, on peut déterminer son niveau de calcaire. Si rien ne se passe, le système est dépourvu de calcaire et le chaulage est recommandé pour que les microbes continuent à fonctionner. Si on entend un pétillement mais qu’on ne voit rien, le système est légèrement carbonaté, un chaulage est à prévoir dans les années à venir. Si de grosses bulles se forment, l’apport de carbonates n’est pas nécessaire.

 

3 - Le test du pâton :

 

 
Test du pâton.
Test du pâton. © V. Bargain
Ce test permet d’évaluer le taux d’argile, important pour la structure du sol et sa capacité de fixation des éléments. Si en humectant la terre on arrive à former un boudin, le taux d’argile est d’au moins 10 %. Si on peut former un croissant, il est supérieur à 15 %. Et si on peut refermer le croissant, le taux d’argile dépasse 20 %. On peut aussi prendre une poignée de terre. Le sable crisse sous les doigts, les limons fins ont un toucher talqueux et l’argile colle.

 

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