Le maïs n’est pas une plante difficile à conserver sous forme d’ensilage. A son stade idéal de récolte, il contient assez de sucres pour nourrir les fermentations, et il est relativement pauvre en minéraux et protéines, éléments ayant un pouvoir tampon qui freinent l’acidification. Un véritable défaut d’acidification est en fait très rare en ensilage de maïs, contrairement à ce qui se passe en ensilage d’herbe.
Par contre, des pertes de qualité dues à une mauvaise stabilité de l’ensilage après l’ouverture du silo sont fréquentes. Les risques de perte se concentrent sur la phase d’ouverture du silo lorsque celui-ci est mal tassé. Alors l’oxygène entre en profondeur dans l’ensilage durant plusieurs jours voire plusieurs semaines avant d’être distribué.
Le développement visible de levures et moisissures, suivi d’un échauffement semblable à la combustion entraîne des pertes de valeur énergétique et de matière sèche. Une bonne partie de la stabilité de l’ensilage se joue d’ailleurs au moment de la confection du silo.
Si de l’air est piégé en quantité importante dans le silo au moment de sa fabrication, ou que son étanchéité n’est pas bonne, levures et moisissures se développent rapidement tant qu’elles disposent d’oxygène. Ces dernières restent ensuite stables tant que le silo est fermé. Mais au moment de l’ouverture, le stock de levures et moisissures se réactive à l’air et très vite, le silo chauffe. « Les pertes de matière sèche peuvent représenter 8 à 9 % par semaine pour un échauffement de 5 °C. Et souvent cela chauffe beaucoup plus » estime Gildas Cabon d’Arvalis Institut du Végétal. « En plus, c’est la partie la plus digestible de l’ensilage qui est ainsi consommée. Il y a aussi des pertes d’appétence. » Pour éviter cela, la conception du silo dans les règles de l’art conserve toute son importance.
La stabilité de l’ensilage se joue principalement à la confection du silo
Pour atteindre le plus vite possible l’anaérobie, le stade de récolte joue un rôle : « la respiration de la plante est plus active quand les tiges et les feuilles sont en pleine activité » explique Gildas Cabon. L’objectif de 30 à 35 % de matière sèche à la récolte a toujours cours. Cependant, la teneur en matière sèche ne reflète pas toujours le stade de la plante. En année froide par exemple, à 28–29 % de MS, la plante peut être à un stade aussi avancé qu’à 35-36 % de MS une autre année.
Il n’en demeure pas moins que la tendance des dernières années est à l’augmentation des récoltes réalisées à des taux de matière sèche plutôt supérieurs aux recommandations. « Prenons l’exemple d’un maïs récolté à 40 % MS. Il est desséché et donc respire peu. Il est en plus difficile à tasser donc il reste beaucoup d’air dans les porosités du silo » expose Gildas Cabon. «On peut dans ce cas se retrouver avec plus de 3 litres d’air pour 1 kilo de matière sèche alors qu’il faudrait ne pas dépasser 1,2 litre d’air pour limiter la multiplication des levures et moisissures ».
Rechercher une densité de l’ensilage plus élevée
Ceci revient à rechercher une densité plus élevée de l’ensilage. "Plus le maïs est récolté tard, plus il faudrait hacher fin et mettre du poids sur la bache », selon Gildas Cabon. Une longueur de coupe théorique de 7-8 mm représente le bon compromis entre facilité de tassement et facilité de mastication et rumination. Des brins de 10 à 15 mm risquent de favoriser les problèmes de conservation si le maïs est trop sec selon Arvalis.
Pour obtenir une forte densité du silo, l’organisation du chantier doit permettre un tassement soigné entre deux fines couches d’ensilage.
Les formats des ensileuses et les débits de chantier ont beaucoup augmenté ces dernières années, mais il y a souvent toujours le même tracteur dédié au tassement. Une solution mécanique peut être recherchée (deuxième tracteur tasseur? poids du tracteur tasseur? diminuer l’épaisseur de la couche à tasser ?) pour accompagner l’accélération de l’arrivée au silo des remorques.
Il faut savoir qu’un tracteur peut éliminer l’air que sur une épaisseur de 10 à 15 centimètres. Inutile donc de tasser longuement en fin de chantier en espérant se rattraper.
En ce qui concerne la qualité de la bâche, il n’y a pas de moyen facile aujourd’hui en France de s’assurer de sa qualité. La norme française, bien qu’elle existe toujours, n’est plus utilisée par les fabricants. Attention donc aux fausses économies sur les bâches. Les différences de prix d’une bâche à l’autre sont très inférieures à la valeur des pertes de fourrage occasionnées en cas de mauvaise étanchéité.
Ralentir les dégradations sur le front d’attaque
Le chantier doit être fini dans la journée. Une fermeture du silo très soignée permet ensuite de garantir l’absence d’entrée d’air pendant la phase de stabilité. Une fois le silo ouvert, un certain nombre de précautions permettent de ralentir les dégradations.
La taille ou la largeur des silos devrait être calibrée sur les besoins du troupeau pour permettre un avancement du front du silo suffisamment rapide, d’au moins 10 cm par jour en hiver et 20 cm en été. Prévoir une orientation des silos qui correspondent à une ouverture exposée au nord ou nord-est est aussi utile.
Le développement des microorganismes sera moins important sans exposition directe au soleil à la bonne saison. Le mode de distribution de l’ensilage peut aussi conduire à réoxygéner plus que souhaitable l’ensilage, s’il est manipulé de nombreuses fois entre le silo et l’auge des vaches. Ce peut être le cas en particulier en système ration complète. ■