Attention aux taux d’urée qui font le yo-yo
Une étude récente portant
sur 3 000 vaches vise à
approcher finement les facteurs
de variation de la teneur en
urée du lait, et à corréler taux
d’urée et pathologies sanitaires.
Le taux d’urée du lait est un indicateur d’équilibre de la ration. « La plage de confort classiquement définie pour les vaches laitières est comprise entre 200 et 300mg/l. Cela signifie que l’animal se trouve alors en capacité de produire et de se reproduire dans de bonnes conditions de santé. Au delà de 330 g/l, le taux est considéré comme excessif, et comme insuffisant en deçà de 180 g/l, rappelle Eric Bertrand, conseiller à Elevage Avenir 74. Globalement, en Rhône-Alpes, 60 à 65 % des élevages se situent dans la fourchette préconisée. Pour autant, certains troupeaux présentent des taux d’urée qui varient fortement d’une semaine sur l’autre, tout en restant entre les bornes de la zone de confort. Ce qui laisse penser, à tort, que la ration est bien calée. Or, non seulement ces élevages ne sont pas exempts de problèmes liés à un mauvais équilibre de la ration, mais pire, ils rencontrent davantage de soucis que les troupeaux dont les taux d’urée s’avèrent trop faibles ou trop élevés. »
Les taux d’urée variable constituent une classe à risques
Tel est le constat suite à une vaste étude menée dans six départements de Rhône- Alpes(1) et portant sur 96 élevages regroupant 3000 laitières de race Prim’Holstein, Montbéliarde, Tarine et Abondance.
L’étude a porté sur le lait de mélange lors des deux derniers hivers. Quatre classes ont été définies : urée stable (de 220 à 280 mg/l), urée forte (>350 mg/l), urée faible (<150mg/l), urée variable (de 200 à 330 mg/l), correspondant à quatre profils d’élevages.
L’enquête a permis de couvrir les principaux systèmes d’alimentation de la région basés sur l’ensilage d’herbe, l’ensilage de maïs, et le foin. « Dans chaque troupeau, le taux d’urée a été mesuré trois fois par mois et la ration passée au crible sur des critères sanitaires tels que le taux de MAT, le taux d’amidon + sucres, le rapport PDI/UF, le taux de cellulose brute, mais aussi sur l’aspect hygiène des fourrages (présentation à l’auge, finesse des particules, conservation, présence de moisissures, etc). »
Et en parallèle, une approche à l’animal a été associée à travers la note d’état corporel, la note de remplissage du rumen, l’observation des bouses, des troubles de la locomotion et des autres signes sanitaires (retournement de caillette, abcès, métrites, non-délivrances, etc) « pour voir s’il existe des corrélations entre certaines pathologies et le taux d’urée du lait ».
Une urée élevée favorise les métrites et non-délivrances
« Dans le groupe « urée variable », la proportion d’animaux présentant au moins une pathologie explose ! » Plus de 60 % d’animaux ont un problème de fonctionnement de rumen et 59 % une note d’état corporel insuffisante (voir graphique). « Par ailleurs, un tiers des troupeaux de cette classe reçoivent une ration excédentaire en amidon. D’où des problèmes d’acidose, qui entraînent aussi des troubles de locomotion. »
Dans les élevages dotés d’un taux d’urée faible, la ration n’affiche pas forcément un manque de protéines brutes. « Dans la moitié des cas, c’est le taux d’amidon qui se montre trop important par rapport à un niveau de protéines tout à fait correct », avance Eric Bertrand.
Dans la classe dotée d’un taux d’urée fort, les élevages présentent dans 60 % des cas une ration riche en protéines avec une MAT supérieure à 16 %, et 30 % d’entre eux utilisent des fourrages de qualité moyenne. « Nous avons aussi remarqué que les élevages avec des taux d’urée supérieurs à 330 mg/l sur une longue période développent davantage de métrites et de non-délivrances. »
L’étude se poursuit pour établir des valeurs repères propres aux systèmes alimentaires de Rhône-Alpes, approfondir un effet race émergent et développer le volet sanitaire.
(1) Rhône, Isère, Loire, Ain, Savoie et Haute-Savoie