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L'impact du libre-échange sur le marché américain de l'avocat
Le marché américain s'ouvre, la consommation progresse

Suite aux accords avec l'Amérique latine et le respect des exigences sanitaires, les volumes d'avocats exportés aux Etats-Unis ont progressé de 260 %.

Moins tournés vers l'extérieur que l'Europe, les Etats-Unis ont une quinzaine d'accords de libre-échange en vigueur, sans compter le partenariat transpacifique et transatlantique en négociation. Le pays s'est concentré sur ses voisins sud-américains et six accords de libre-échange existent avec cette zone : Pérou et Colombie (chacun signé en 2006), Mexique (2003), et Amérique centrale et République Dominicaine avec l'Aleac-RD (Accord de libre-échange Amérique centrale-République Dominicaine) signé en 2004. Tous ces pays sont producteurs d'avocats et potentiellement compétiteurs de la production américaine (Californie). Mais la plus grande “menace” pour l'avocat californien vient de son voisin mexicain. Soumis à un embargo depuis 1914, l'avocat mexicain voyait en l'Alena (Accord de libre-échange nord-américain), signé en 1992 et entré en vigueur en 1994, le moyen d'atteindre les Etats-Unis via la suppression progressive des barrières américaines. Mais accord de libre-échange n'est pas synonyme de libre-échange et les autorités américaines ont interdit l'importation d'avocats mexicains pour des raisons sanitaires (présence de mouches de fruits).

Accord de libre-échange n'est pas synonyme de libre-échange.

Le conflit de l'avocat mexicain

Accusant les Américains de protectionnisme, les Mexicains ont réagi en créant l'Apeam (Association des producteurs et exportateurs d'avocats du Michoacán), ouvert les discussions avec les autorités américaines, accepté les inspections américaines dans leurs vergers et mis en place des protocoles. En 1997, le Michoacán (principal producteur du Mexique) a été autorisé à exporter dans treize Etats de la région Nord-Est des Etats-Unis en hiver (la mouche des fruits étant sensible au froid). D'autres obstacles ont été assouplis la décennie suivante et le Mexique a obtenu l'accès total à tous les Etats des Etats-Unis en 2007, excepté la Californie, la Floride et Hawaï, pour protéger les productions locales. Ces importations restent soumises à des contingents et des règles sanitaires strictes. Seuls des exportateurs certifiés peuvent commercer avec les Etats-Unis.

La promotion augmenterait la consommation ENQUÊTE

Selon une étude sur la croissance de la demande et sur les promotions de l'avocat aux Etats-Unis (réalisée par Hoy F. Carman, Tina L. Saitone et Richard J. Sexton en 2013), la demande américaine pour l'avocat Hass peut être modélisée comme une fonction du prix, du revenu par habitant, du temps et des dépenses du Comité de l'avocat Hass (HAB) et de la Commission de l'avocat californien (CAC) pour la promotion de l'avocat. Sur le paramètre temps, il faut noter que la période de l'année joue énormément sur la consommation. Par exemple, les festivités du Super Bowl se trouvent être la période où l'avocat est largement consommé… en guacamole. Si au début du siècle, les Américains consommaient pendant cette période 3 600 t, aujourd'hui on est passé à 36 000 t ! Ce qui représente environ 158 millions de fruits. Sur le facteur “promotions”, les auteurs indiquent que ces « dépenses ont un impact statistiquement significatif et positif sur la consommation d'avocat par habitant aux Etats-Unis. » Il est intéressant de noter que les auteurs n'impliquent pas les promotions des importateurs, alors que les Californiens dépensent moins en promotion que les importateurs du Mexique (11,6 M$/8,8 M€ contre 17,7 M$/13,4 M€ en 2012). Une autre étude de 2013, du HAB, s'est intéressée aux motivations d'achat et a avancé cinq facteurs clés : la présentation du produit (importance de la disponibilité, apparence du produit et informations), la qualité et la maturité (couleur et fermeté), le prix (quoique les clients américains soient prêts à payer légèrement plus pour un avocat qu'un autre produit car il est perçu comme unique et difficilement substituable), la taille du fruit (en fonction de l'utilisation) et les autres facteurs : la variété Hass, le bio et le local sont des plus.

L'émergence du Pérou et de la Colombie

De la même manière, l'avocat péruvien s'est exporté pour la première fois aux Etats-Unis en 2010, avec des volumes négligeables (à peine 100 t), mais toutefois significatifs : le Pérou pouvait répondre aux exigences sanitaires américaines. Suite à ce test, le pays a obtenu un accès au marché américain fin 2011. Actuellement, une douzaine de zones de productions péruviennes sont autorisées à exporter aux Etats-Unis. Aujourd'hui, c'est la Colombie qui se prépare à exporter vers les Etats-Unis. Gros producteur, le pays s'était jusque-là concentré sur sa demande nationale. Mais depuis quelques années, la Colombie affiche son ambition d'être présente sur les marchés internationaux, comme en témoignent les nouvelles plantations de Hass. La production 2013 a avoisiné les 27 000 t et la Colombie espère atteindre 62 000 t en 2016, pour placer au moins 20 % des volumes sur le marché américain, grâce à l'accord de libre-échange. « Nous espérons obtenir l'autorisation d'exporter aux Etats-Unis d'ici la fin de l'année, a déclaré Rodrigo Garavito, président de Corpohass (Comité national des producteurs et exportateurs de Hass colombiens, créé en avril 2013). Nous avons mené une campagne d'informations dans les vergers. Nous nous sommes rendus au Mexique pour voir les protocoles en place. Le plan de travail est fait et nous sommes maintenant à l'étape des groupes de lobby. » En attendant, l'avocat colombien compte bien profiter de l'embargo russe sur les fruits et légumes européens et américains pour s'y exporter.

L'avocat colombien compte bien profiter de l'embargo russe sur les fruits et légumes européens et américains pour s'y exporter.

Ces successives ouvertures des frontières américaines ont coïncidé avec une progression des volumes d'avocats importés sur le marché américain. Avant les années 90, la majorité des avocats consommés aux Etats-Unis étaient produits en Californie et en Floride, et seulement 1 400 t étaient importées annuellement, soit 1 % de l'offre totale aux Etats-Unis. Avec une augmentation des surfaces et de la production au Chili et en République Dominicaine, et le Mexique qui obtient un accès limité au marché américain en 1997, les importations ont rapidement progressé, atteignant 66 200 t, soit presque un tiers de l'offre sur le marché américain en 2000.

En vingt ans, l'offre a progressé de 260 % et la consommation a quadruplé

Depuis le lancement en 2003 du HAB (Comité de l'avocat Hass) pour soutenir la promotion du Hass, la production américaine et les importations n'ont cessé de progresser, avec un record de 730 000 t en 2012. Le Mexique a totalisé 450 000 t en 20122013, soit 60 % de l'offre. Le Chili atteint des volumes allant de 42 600 t à 112 500 t, en raison de rendements variables et d'une diversification des destinations à l'export. Les arbitrages se font en fonction des marchés européen, américain et argentin et de la demande nationale. La saison dernière, le Chili a envoyé presque 52 000 t aux Etats-Unis.

Malgré une progression de 260 % de l'offre en vingt ans, les prix producteurs sont restés relativement stables, témoignage de l'augmentation de la consommation, qui est passée d'environ 0,7 kg par habitant et par an dans les années 90 à 2 kg en 2012. D'aucuns avancent que cette progression est le fruit de programmes de promotion réussis. Ainsi, la CAC (Commission de l'avocat californien) a été créée en 1978 avant de s'allier aux importateurs dans le HAB (Comité de l'avocat Hass) en 2003.

Cotisations et prélèvement sur les ventes assurent la pérennité des programmes

Avec la CAC, trois associations d'importateurs certifiées opèrent sous le HAB : l'Association des importateurs d'avocats du Chili, la Commission de l'avocat péruvien et l'Association des importateurs d'avocats Hass mexicains. Chacune verse une cotisation au HAB, basée sur ses volumes. Avec la croissance des importations et donc des cotisations, les revenus du HAB ont augmenté. D'autant plus que depuis 2003, 2,5 cents américains par livre (soit environ 0,04 euro par kilo) sont perçus sur chaque avocat vendu. Ces fonds sont utilisés pour des programmes, tels que la recherche sur la nutrition, le marketing et les informations destinées à tous les producteurs, ainsi qu'à aider les associations dans leurs propres programmes de promotion.

D'autre part, la CAC travaille en étroite collaboration avec le gouvernement sur les différents accords commerciaux dans le monde. L'avocat californien a en effet des vues sur la Chine, le Japon mais aussi l'UE, qui est le deuxième importateur mondial (derrière les Etats-Unis). La CAC essaye d'obtenir, via les négociations du partenariat transatlantique, une suppression des droits de douane pour l'avocat californien.

Les dernières news

Argentine-OMC : L'OMC a estimé que l'Argentine a violé les règles du commerce international en mettant en place une série d'obstacles aux importations de biens américains, japonais et européens. Le constructeur automobile allemand Porsche a dû s'engager à acheter du vin et de l'huile d'olive argentins pour faire entrer une centaine de véhicules. L'Argentine pourrait faire appel de cette décision publiée le 22 août.

UE-Cameroun : L'accord de partenariat économique UE-Afrique Centrale pour le commerce et le développement entre l'UE et le Cameroun est entré en application le 4 août. Il prévoit l'accès en franchise de droits de douane et sans contingent au marché européen des produits camerounais tandis que le Cameroun va ouvrir progressivement son marché à l'UE jusqu'en 2023, à l'exception de certains produits agricoles ou industriels jugés sensibles. L'UE encourage les autres pays de la région à rejoindre cet accord de partenariat économique.

UE-Etats-Unis : L'Italie, qui préside l'Union européenne, et Karel de Gucht, commissaire européen au Commerce, ont demandé aux Etats membres d'accepter de rendre public le mandat de la Commission dans les négociations transatlantiques avec les Etats-Unis, pour « favoriser une meilleure perception de l'opinion publique quant aux objectifs de la négociation avec les Etats-Unis ». Un sixième cycle de discussions entre Washington et Bruxelles s'est achevé mi-juillet, sur fond de critiques concernant le manque de transparence dans ces négociations.

L'Union européenne accélère les discussions avec l'Asie.

UE-Japon : Le Japon est la cible des coups de boutoirs commerciaux des Etats-Unis et de l'UE. « Avec ou sans négociations d'accord de libre-échange, il faut de toute façon réformer notre agriculture », a affirmé le ministre japonais de l'Agriculture, Yoshimasa Hayashi. Concernant l'accord avec l'UE, le ministre japonais de l'Agriculture croit qu'un accord est possible en 2015. Début juillet, les deux partenaires ont bouclé un sixième tour de négociations mais il semble que le volet agricole ait fait du surplace, notamment sur le dossier, sensible pour l'UE, des indications géographiques.

UE-Vietnam : Le Vietnam et l'UE espèrent conclure un accord de libre-échange dès octobre, a déclaré le 25 août le Premier ministre vietnamien Nguyen Tan Dung après un entretien avec José Manuel Barroso, président de la Commission européenne. Les négociations sur l'accord de libre-échange ont débuté en 2012. Le Vietnam exporte vers l'Europe des produits agricoles en particulier.

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